À Charles Spon, le 8 janvier 1650, note 20.
Note [20]

Putatif : « qui est réputé être ce qu’il n’est pas. Il n’est guère en usage qu’en parlant de saint Joseph que l’on appelle le père putatif de Notre Seigneur parce qu’il était réputé en être le père » (Académie).

Les caprices épidémiques de la lèpre continuent d’intriguer : bien avant qu’on en eût découvert le traitement efficace, et même identifié la bactérie responsable (Mycobacterium lepræ, v. note [19], lettre 79), la maladie s’était éteinte d’elle-même en certaines parties de l’Europe, ainsi que Guy Patin le remarquait ici ; mais en d’autres, elle avait pu subsister sans grande variation ou éclore de nouveau après avoir disparu. Pour expliquer ces éclipses spontanées, on a invoqué plusieurs phénomènes (D. Sharp, Leprosy lessons from old bones [De vieux ossements nous renseignent sur la lèpre], The Lancet, 2007 ; volume 369 : pages 808‑809) :

  • amélioration de l’hygiène générale (mais dans ce domaine, il n’y eut pas de franc bond en avant entre le Moyen Âge, la Renaissance et l’ère classique) ;

  • succès des cruels règlements prophylactiques isolant les lépreux du reste de la société (crécelles, léproseries, etc.) ;

  • compétition entre mycobactéries, l’expansion de M. bovis ou de M. tuberculosis défavorisant M. lepræ ;

  • évolution des habitudes diagnostiques (on aurait auparavant appelé lèpre ce qui ne serait plus reconnu comme tel, mais les études paléoarchéologiques n’appuient pas cette thèse).

Quoi qu’il en fût, Patin se servait de la confusion entre lèpre et vérole pour étayer la thèse de l’antiquité de la syphilis dans le Vieux Monde : Charles viii a régné en France de 1483 à 1498 et Christophe Colomb est revenu de son premier voyage d’Amérique en mars 1493. V. note [12], lettre 14, pour ce que je crois être la toute première description imprimée de la maladie, par Antonius Benivenius (Florence, 1507).

En sa jeunesse, le même Patin, dans un commentaire de son édition des Opera omnia d’André Du Laurens (Paris, 1628), s’est néanmoins catégoriquement prononcé pour l’origine américaine de la vérole européenne à la fin du xve s. Ce texte est transcrit, traduit et annoté dans l’annexe que je j’ai consacrée à cet ouvrage (v. ses notes [40][46]).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 8 janvier 1650, note 20.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0211&cln=20

(Consulté le 19/04/2024)

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