À André Falconet, le 7 mars 1661, note 20.
Note [20]

Mme de Motteville (Mémoires, pages 503‑504) :

« Le 7 mars, jour qu’il reçut l’extrême-onction, après avoir pris congé du roi, de la reine mère et de Monsieur, qu’il supplia de ne prendre plus la peine de le venir voir, il donna au roi dix-huit gros diamants, un fort beau diamant à la reine mère, un bouquet de diamants à la jeune reine et plusieurs émeraudes d’une prodigieuse grosseur à Monsieur. Il donna un diamant au prince de Condé avec beaucoup de louanges et de grandes marques de son amitié, {a} et un au maréchal de Turenne, et laissa pour successeurs au ministère ceux que j’ai déjà nommés. {b} Ensuite de toutes ces choses, il pria M. Joly, curé de Saint-Nicolas-des-Champs, de ne le plus quitter. Il ne s’était point confessé à lui, mais il parut ne penser plus qu’à sa conscience. Son confesseur ordinaire était théatin, homme simple et d’une singulière piété, mais qui peut-être ignorait les périls où peuvent tomber ceux qui ont trop adoré la fortune, la faveur et les richesses. Il voulut dans cet état envoyer à l’Assemblée du Clergé l’évêque de Poitiers pour les prier de croire qu’il mourait leur serviteur. Elle en fut si reconnaissante qu’ils voulurent tous aller l’en remercier, mais ils ne le purent voir. Il en fit autant au Parlement, les envoyant assurer qu’il mourait leur serviteur. Il reçut l’extrême-onction dans sa chaise, y répondit lui-même et remercia ceux qui la lui avaient administrée. Il fit venir tous ses domestiques, il se fit voir à tous, ayant la barbe faite, étant propre et de bonne mine, avec une simarre {c} de couleur de feu, sa calotte à sa tête, comme un homme qui voulait braver la mort. Il leur parla fort chrétiennement, leur demanda pardon avec de grandes marques d’humilité et confessa qu’un de ses crimes devant Dieu avait été la colère et la rudesse qu’il avait eues pour eux. Il leur dit à tous ce qu’il leur laissait, et fit toutes ces choses d’une manière douce et obligeante. Il embrassa ses amis et leur fit des compliments. Au milieu de cette occupation, une faiblesse le prit ; il dit “ Je m’affaiblis, qu’on me donne un peu d’eau de grenade ”. Après en avoir bu, il dit “ Je reviens ” et continua de parler à ceux qui étaient présents. Il s’occupa le reste du jour à faire des actes de foi et de contrition ; ce qu’il fit d’une manière dévote, ferme et tranquille. Il parapha son testament et signa encore sur le soir des dépêches pour le service du roi ; et quoiqu’il parût ne vouloir plus penser qu’à Dieu, tant qu’il put parler et entendre, il ordonna tout ce qui lui parut utile à l’État. »


  1. Vsupra note [6].

  2. V. note [1], lettre 676.

  3. Robe de chambre.

Imprimer cette note
Citer cette note
x
Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 7 mars 1661, note 20.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0678&cln=20

(Consulté le 20/04/2024)

Licence Creative Commons