Annexe : Les deux Vies latines de Jean Héroard,
premier médecin de Louis xiii, note 21.
Note [21]

Illustris est mon interprétation (douteuse) du I. imprimé dans le texte latin.

Jean était « fils de Michel Héroard, chirurgien, et de Catherine de Farges, famille farouchement protestante » (Dulieu, tome ii, page 389).

Dans ses Mémoires, {a} Felix i Platter {b} a donné un délicieux récit de sa singulière rencontre avec celui qu’il nommait Michael Edoardus (passage à Genève, à la mi-octobre 1554, lors du Voyage à Montpellier, pages 39‑43) :

« Je me rendis chez M. Calvin, à qui je remis la lettre par laquelle mon père lui recommandait Schoepfius et moi. {c} Dès qu’il en eut pris connaissance, Calvin me dit : “ Mi Felix, {d} tout s’arrange pour le mieux, j’ai justement un excellent compagnon de voyage à vous donner, un aide-chirurgien, Michael Edoardus, de Montpellier même. Il doit se mettre en route demain ou après-demain ; c’est le guide qu’il vous faut. ” […] À notre entrée à Avignon, cité considérable qui appartient au pape, Michael Edoardus me planta là. Il s’en fut loger chez un maître monnayeur de ses amis et me laissa de l’autre côté du grand pont sur le Rhône, dans la partie de la ville qui s’appelle Villeneuve. Je descendis à l’hôtellerie du Coq, un mauvais gîte hanté par des bateliers aux larges chausses {e} et aux bonnets bleus. J’avais grand’peur, car j’étais seul et ne pouvais me faire comprendre de personne. Les habitués du lieu m’inspiraient peu de confiance : de toute la nuit, à peine fermai-je l’œil. […]

Le lendemain matin, je me levai de bonne heure. J’étais au désespoir de ne connaître personne ; j’ignorais ce que mon compagnon était devenu. […] Je soupçonnais maître Michel d’être parti sans moi pour Montpellier. De noires pensées me montèrent au cerveau […] ; mais Dieu me vint en aide : j’entrai dans une église, c’était dimanche, on chantait, les orgues jouaient. Cette musique me rasséréna un peu. Je regagnai mon hôtellerie […]. Vers le soir, je me rendis à vêpres afin d’entendre de la musique ; je m’assis tout triste dans un coin. De retour au logis, je trouvai le valet de maître Michel qui m’avertissait d’être prêt de bonne heure. Je lui mandai que pour rien au monde je ne voulais passer une seconde nuit au Coq, craignant d’être assassiné par les mariniers. Il me fit donc venir chez son ami le maître monnayeur ; et après y avoir soupé, je me trouvai en meilleure disposition d’esprit. […]

Nous entrâmes donc à Montpellier au milieu du jour. C’était un dimanche. Tout en chevauchant, je priai Dieu de m’accorder sa grâce et de me permettre, mes études finies, de regagner en bonne santé mon pays et la maison paternelle. […] Après m’avoir indiqué la maison de M. Laurent Catalan, apothicaire, qui était située au coin de la place, maître Michel me quitta pour gagner son domicile. »


  1. Genève, Jules-Guillaume Fick, 1866, in‑4o de 145 pages, traduits de l’allemand par Edouard Fick.

  2. Médecin bâlois né en octobre 1536 (v. note [12], lettre 363).

  3. V. note [15], lettre 97, pour Jean Calvin.

    Felix était le fils de l’humaniste bâlois Thomas Platter (1499-1582). Thomas Schoepfius, son compagnon de voyage, était maître d’école à Bâle et voulait se rendre à Lyon.

  4. « Mon cher Felix ».

  5. V. note [36], lettre 309.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Annexe : Les deux Vies latines de Jean Héroard,
premier médecin de Louis xiii, note 21.

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(Consulté le 28/03/2024)

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