À Charles Spon, le 18 juin 1652, note 23.
Note [23]

Dans ses Mémoires (pages 277‑279), La Rochefoucauld a résumé la pitoyable intervention du duc de Lorraine dans la guerre civile, qui consternait Guy Patin et tous les antimazarins de la capitale :

« Paris attendait M. de Lorraine comme le salut du parti [condéen]. Il arriva enfin, ensuite de plusieurs remises {a} et après avoir donné beaucoup de soupçon de son accommodement avec le roi ; sa présence dissipa pour un temps cette opinion et on le reçut avec une extrême joie. Ses troupes campèrent près de Paris et on en souffrit les désordres sans s’en plaindre. Il y eut d’abord quelque froideur entre M. le Prince et lui pour le rang ; mais voyant que M. le Prince tenait ferme, il relâcha de ses prétentions d’autant plus facilement qu’il n’avait fait ces difficultés que pour gagner le temps de faire un traité secret avec la cour pour la levée du siège d’Étampes sans hasarder un combat. Néanmoins, comme on n’est jamais si facile à être surpris que quand on songe trop à tromper les autres, M. de Lorraine, qui croyait trouver ses avantages et toutes ses sûretés dans les négociations continuelles qu’il ménageait avec la cour, avec beaucoup de mauvaise foi pour elle et pour le parti des princes, vit tout d’un coup l’armée du roi marcher à lui, et il fut surpris lorsque M. de Turenne lui manda qu’il le chargerait s’il ne décampait et ne se retirait en Flandre. Les troupes de M. de Lorraine n’étaient pas inférieures à celles du roi et un homme qui n’eût eu soin que de sa réputation eût pu raisonnablement hasarder un combat ; mais quelles que fussent les raisons de M. de Lorraine, elles lui firent préférer le parti de se retirer avec honte et de subir ainsi le joug que M. de Turenne lui voulut imposer. Il ne donna aucun avis de ce qui se passait à M. le duc d’Orléans ni à M. le Prince, et les premières nouvelles qu’ils en eurent leur apprirent confusément que leurs troupes étaient sorties d’Étampes, que l’armée du roi s’en était éloignée et que M. de Lorraine s’en retournait en Flandre, prétendant avoir pleinement satisfait aux ordres des Espagnols et à la parole qu’il avait donnée à M. le duc d’Orléans de faire lever le siège d’Étampes. Cette nouvelle surprit tout le monde et fit résoudre M. le Prince d’aller joindre ses troupes, craignant que celles du roi ne les chargeassent en chemin. Il sortit de Paris avec 12 ou 15 chevaux, s’exposant ainsi à être rencontré par les partis des ennemis. Il joignit son armée à Linas et l’amena loger vers Villejuif ; elle passa ensuite à Saint-Cloud où elle fit un long séjour pendant lequel, non seulement la moisson fut toute perdue, mais presque toutes les maisons de la campagne furent brûlées ou pillées, ce qui commença d’aigrir les Parisiens, et M. le Prince fut près d’en recevoir les funestes marques en la journée de Saint-Antoine. »


  1. Atermoiements.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 18 juin 1652, note 23.

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(Consulté le 29/03/2024)

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