Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-7, note 23.
Note [23]

Cet article sur le consul et triumvir romain Marius Licinius Crassus {a} tire ses propos de trois historiens antiques de langue grecque, dans leurs traductions françaises publiées au xviie s. :

  • début de la Vie de Crassus, écrite par Plutarque, pour son immense richesse (pages 1076‑1077) ; {b}

  • L’histoire romaine de Dion Cassius, abrégée par Jean Xiphilin, {c} tome 1, livre quarantième, pages 19‑22, {d} pour la désastreuse campagne militaire qu’il finança de ses propres deniers et qui mit fin à ses jours (déroute romaine de Carrhes le 9 juin 53 av. J.‑C.) ;

  • Flavius Josèphe, Histoire des Juifs, livre xiv, xii, pour le pillage du Temple de Jérusalem pages 331‑332). {e}


    1. V. note [3], lettre 199.

    2. Dans la traduction de Jacques Amyot, Paris, 1622, v. supra note [18].

    3. V. note [35] du Borboniana 6 manuscrit.

    4. Édition de Paris, 1674 (v. note [48] du Faux Patiniana II‑6).

    5. Traduction de Robert Arnauld d’Andilly, v. note [4], lettre 845, Amsterdam, 1681.

Le roi des Parthes qui défit Crassus à Carrhes se nommait Orodès ii, souverain asarcide (v. notule {a}, note [43] du Faux Patiniana II‑6) qui régna de 54 à 38 av. J.‑C. Moréri l’appelle Orode, je ne sais pas expliquer la corruption de son nom en « Clau » dans L’Esprit de Guy Patin.

La richesse et la cupidité sont ordinairement personnifiées par Crésus, roi de Lydie au vie s. av. J.‑C. (v. note [91] du Faux Patiniana II‑7). On pense encore à lui en disant : « riche comme Crésus ». Crassus, le plus opulent Romain de l’Antiquité, ne l’a pas détrôné dans le vocabulaire proverbial ; néanmoins, dès 44 av. J.‑C. Cicéron écrivait (Des Devoirs, livre ii chapitre xvi) :

Crassus cum cognomine dives tum copiis functus est ædificio maximo munere.

[Crassus est surnommé le riche, tant pour sa fortune que pour son extrême munificence dans l’accomplissement de sa charge].

La deuxième édition du Dictionnaire de l’Académie (1718) a attesté le substantif féminin « crasse » dans le sens d’avarice sordide. Il a été repris dans le Littré DLF, qui cite la Satire x de Nicolas Boileau-Despréaux (1666), faisant bien le lien entre « la famélique et honteuse lésine » et la saleté :

« Mais, pour bien mettre ici leur crasse en tout son lustre,
Il faut voir du logis sortir ce couple illustre :
Il faut voir le mari tout poudreux, tout souillé,
Couvert d’un vieux chapeau, de cordon dépouillé,
Et de sa robe, en vain de pièces rajeunie,
À pied dans les ruisseaux traînant l’ignominie.
Mais qui pourrait compter le nombre de haillons,
De pièces, de lambeaux, de sales guenillons,
De chiffons ramassés dans la plus noire ordure,
Dont la femme, aux bons jours, composait sa parure ?
Décrirai-je ses bas en trente endroits percés,
Ses souliers grimaçants, vingt fois rapetassés,
Ses coiffes d’où pendait au bout d’une ficelle
Un vieux masque pelé presque aussi hideux qu’elle ?
Peindrai-je son jupon bigarré de latin,
Qu’ensemble composaient trois thèses de satin :
Présent qu’en un procès sur certain privilège
Firent à son mari les régents d’un collège,
Et qui, sur cette jupe, à maint rieur encore
Derrière elle faisait lire Argumentabor ? » {a}


  1. « J’argumenterai », début latin classique d’une dissertation ou d’une leçon de collège ; le mari de cette dame était un richissime mais très pingre magistrat.

Le lien étymologique entre Crassus et « crasse » n’est pas dans Moréri : il s’agit d’un pur jeu de mots des rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin, que je n’ai vu attesté par aucun autre ouvrage.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-7, note 23.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=8220&cln=23

(Consulté le 19/04/2024)

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