À Charles Spon, le 8 mars 1644, note 24.
Note [24]

Sans le nommer, Guy Patin évoquait ici le médecin persan Rhazès, Mohammed Ebn-Secharjah Aboubekr Arrasi ou Razi (Ray, Iran 865-ibid. 925 ou 932), et son Traité de la variole et de la rougeole (traduction française de Leclerc et Lenoir, Paris, J.‑B. Baillière, 1866, pages 13‑14) :

« Je dis donc que l’homme, depuis sa naissance jusqu’à son extrême vieillesse, ne cesse pas d’augmenter en sécheresse et qu’à cause de cela, le sang des adolescents et des enfants est riche en humidité, tout en étant chez les premiers doué d’une grande chaleur. […]

C’est ce qui ressort manifestement aussi de l’excellence des actions naturelles, telles que la digestion, la croissance et le développement chez les enfants. Aussi a-t-on comparé le sang des enfants et des adolescents aux sucs exprimés, chez lesquels n’a pas commencé la coction qui les fait parvenir à une maturité complète, où ne s’est pas encore déclaré le mouvement qui détermine leur fermentation.

Le sang des adultes peut se comparer aux sucs qui ont déjà fermenté, d’où se sont échappées beaucoup de vapeurs et de parties superflues, à l’instar de ce vin qui s’est reposé et calmé, dont la force s’est assise et bien établie.

Quant au sang des vieillards, on peut le comparer au vin qui a perdu sa force, qui est près de se refroidir et de tourner au vinaigre.

La variole survient quand le sang entre en putréfaction et en fermentation pour se débarrasser de ses vapeurs superflues et se changer, de sang de l’enfance et analogue aux sucs exprimés, en sang des adultes, pareil au vin fait. La variole même est comparable à la fermentation et à l’exhalation qui surviennent dans les sucs. Voilà pourquoi les enfants ne peuvent échapper à cette maladie, surtout ceux du sexe masculin, parce que le passage du sang du premier au second état est inévitable, tout comme est inévitable le passage des sucs qui doivent fermenter et s’évaporer à l’état auquel ils arrivent après la fermentation et l’ébullition.

Il est rare que la constitution d’un enfant ou d’un adolescent soit telle que le passage du sang du premier au second état puisse se faire petit à petit, insensiblement et dans un laps de temps considérable, sans être le siège de cette fermentation et de cette ébullition. Il faudrait en effet que cette constitution fût froide et sèche ; or, le tempérament des adolescents est tout le contraire, aussi bien que leur régime, l’alimentation des enfants consistant en laitage.
Quant aux adolescents, bien que leur alimentation ne consiste pas en laitage, elle s’en rapproche cependant plus que celle des autres hommes ; il se produit chez eux plus d’humeurs et leurs mouvements, après les repas, sont plus considérables.
Voilà pourquoi il est rare qu’un adolescent échappe à cette maladie. Ensuite, quand ils en sont atteints, leur position varie en raison de leur tempérament, de leur régime, de leur chaleur propre, de l’air ambiant, de l’état du sang qui coule dans leurs vaisseaux, lequel peut différer tant au point de vue de la qualité que de la quantité. »

Les œuvres de Rhazès avaient été plusieurs fois éditées en latin au xvie s.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 8 mars 1644, note 24.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0101&cln=24

(Consulté le 28/03/2024)

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