À Charles Spon, le 2 août 1652, note 24.
Note [24]

Journal de la Fronde (volume ii, fo 116 ro et vo, 19 juillet 1652) :

« Hier au matin, S.A.R. {a} et M. le Prince se rendirent à l’assemblée du Parlement avec M. de Beaufort et quelques autres ; mais M. le Chancelier ne s’y trouva pas. Aussitôt qu’on eut commencé, un courrier y arriva avec une lettre de Messieurs les députés {b} pour S.A.R., une pour M. le Prince et une troisième pour le Parlement, par lesquelles ils mandaient que M. de Saintot venait de leur rendre une lettre de cachet du roi portant que, depuis son départ, il lui était survenu des affaires importantes qui l’obligent à leur mander de se rendre auprès de sa personne pour les leur communiquer ; laquelle lettre était accompagnée d’une autre de M. du Plessis-Guénégaud qui leur mandait que Sa Majesté lui avait commandé de leur faire entendre que, si les conseillers députés voulaient retourner à Paris, elle ne leur en refusait pas la permission pourvu que les présidents suivissent la cour ; ce à quoi les députés n’avaient pas à faire réponse sans prendre avis du Parlement, auquel ils témoignaient souhaiter de revenir, n’ayant donné parole de demeurer à Saint-Denis que jusqu’à trois heures après midi. Sur cela, il fut arrêté tout d’une voix qu’ils reviendraient ; et S.A.R. ayant été priée de leur envoyer une escorte, elle s’offrit de les aller quérir elle-même ; ce que la Compagnie ayant accepté, Sadite Altesse partit pour cet effet à midi accompagnée de M. le Prince et de M. de Beaufort, avec cinq à six cents chevaux, autant de fantassins et deux pièces de canon, et y amenèrent le soir les députés, dont une partie eut peine de se résoudre à revenir. »


  1. Son Altesse Royale, Gaston d’Orléans.

  2. Du Parlement à Saint-Denis, auprès du roi.

Retz (Mémoires, pages 1014‑1015) :

« Je vous expliquerai en peu de paroles tout ce qui s’y passa {a} depuis le 4 de juillet jusqu’au 13. La face en fut très mélancolique : tous les présidents au mortier s’étant retirés, et beaucoup des conseillers même s’étant aussi absentés, par la frayeur des séditions que le feu et le massacre de l’Hôtel de Ville n’avaient pas diminuée, cette solitude obligea ceux qui restaient à donner arrêt qui portait défense de désemparer ; {b} en quoi ils furent mal obéis. Il se trouvait par la même raison fort peu de monde aux assemblées de l’Hôtel de Ville. Le prévôt des marchands, {c} qui ne s’était sauvé de la mort que par un miracle le jour de l’incendie, n’y assistait plus. M. le maréchal de L’Hospital demeurait clos et couvert {d} dans sa maison. Monsieur fit établir en sa place, par une assemblée peu nombreuse, M. de Beaufort pour gouverneur et M. de Broussel pour prévôt des marchands. Le Parlement ordonna à ses députés qui étaient à Saint-Denis de presser leur réponse et en cas qu’ils ne la pussent obtenir, de revenir dans trois jours prendre leurs places. Le 13, les députés écrivirent à la Compagnie et ils lui envoyèrent la réponse du roi par écrit. En voici la substance :

“ Que bien que Sa Majesté eût tout sujet de croire que l’instance que l’on faisait pour obtenir l’éloignement de M. le cardinal Mazarin ne fût qu’un prétexte, elle voulait bien lui permettre de se retirer de la cour après que les choses nécessaires pour établir le calme dans le royaume auraient été réglées, et avec les députés du Parlement, qui étaient déjà présents à la cour, et avec ceux qu’il plairait à Messieurs les princes d’y envoyer. ”

Messieurs les princes, qui avaient connu que M. le cardinal ne proposait jamais de conférence que pour les décrier dans les esprits des peuples, se récrièrent de cette proposition ; et Monsieur dit avec chaleur qu’elle n’était qu’un piège que l’on leur tendait, et que lui ni Monsieur son cousin {e} n’avaient aucun besoin d’envoyer des députés en leur nom puisqu’ils avaient toute confiance à ceux du Parlement. L’arrêt qui suivit fut conforme au discours de Monsieur et ordonna aux députés de continuer leurs instances pour l’éloignement du cardinal. Messieurs les princes écrivirent aussi au président de Nesmond pour l’assurer qu’ils continuaient dans la résolution de poser les armes aussitôt que le cardinal serait effectivement éloigné. Le 17, les députés mandèrent que le roi était parti de Saint-Denis pour aller à Pontoise ; qu’il leur avait commandé de le suivre ; que, sur la difficulté qu’ils en avaient faite, il leur avait ordonné de demeurer à Saint-Denis. Le 18, ils écrivirent qu’ils avaient reçu un nouvel ordre de Sa Majesté de se rendre incessamment à Pontoise. La Compagnie s’émut beaucoup et donna arrêt par lequel il fut dit que les députés retourneraient à Paris incessamment. Monsieur, M. le Prince et M. de Beaufort sortirent eux-mêmes, avec 800 hommes de pied et 1 200 chevaux, pour les ramener et pour faire croire au peuple que l’on les tirait d’un fort grand péril. La cour ne s’endormait pas de son côté : elle lâchait à tous moments des arrêts du Conseil qui cassaient ceux du Parlement ; elle déclara nul tout ce qui s’était fait et tout ce qui se ferait dans les assemblées de l’Hôtel de Ville ; et elle ordonna même que les deniers destinés au paiement de ses rentes ne seraient portés dorénavant qu’au lieu où Sa Majesté ferait sa résidence. »


  1. Au Parlement.

  2. Partir.

  3. Le Fèvre.

  4. Caché.

  5. Condé.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 2 août 1652, note 24.

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(Consulté le 29/03/2024)

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