Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 6 manuscrit, note 25.
Note [25]

« il s’agit d’une insomnie, c’est-à-dire de veilles permanentes […]. La maladie mélancolique diffère peu de cette affection. » Dans cette phrase, tout de suite a son acception primitive : « sans discontinuer » (et non pas « immédiatement »).

V. notes :

  • [1] de la Consultation 12 pour la description de la maladie mélancolique (folie) par Jean Fernel, en 1554, et [5], lettre 53, pour le tempérament mélancolique (misanthropie) ;

  • [10], lettre 19, pour Léonor d’Étampes Valençay, évêque de Chartres de 1620 à 1641 ;

  • [6], lettre 83, pour Augustin Potier de Gesvres, évêque de Beauvais de 1617 à 1650.

Le Dictionnaire de Trévoux a longuement décrit l’insomnie, en expliquant ses liens avec la mélancolie :

« Indisposition qui consiste à ne pouvoir dormir, l’insomnie est causée par le mouvement continuel et excessif des esprits animaux dans les organes internes et externes du corps, qui fait que les esprits reçoivent promptement les impressions des objets sensibles et que, suivant l’espèce du mouvement reçu dans l’organe, ils le continuent dans le cerveau, et fournissent à l’âme différentes occasions de penser. Ce flux excessif et continuel des esprits a deux causes.

  • L’une est l’objet sensible qui frappe l’organe avec trop de force. Alors les esprits animaux sont nécessairement agités et émus puissamment ; et comme ces émotions, qui se continuent jusqu’au cerveau par les nerfs, donnent le même mouvement au cerveau, il faut de nécessité que l’animal veille. Ainsi un grand cri, les douleurs, les maux de tête, les tranchées du ventre, {a} et la toux causent l’insomnie. L’âme, quand elle est occupée de soins {b} et de méditations, y a aussi quelque part, puisqu’agissant par le ministère des esprits animaux, les soins et les méditations qui agitent ces esprits ne peuvent manquer de produire l’insomnie. Les veilles opiniâtres des mélancoliques sont de ce nombre. On en a vu qui ont passé jusques à quatorze jours, et même trois ou quatre semaines sans pouvoir dormir.

  • L’autre cause est le vice même de ces esprits animaux, qui les dispose à des mouvements précipités, ou opiniâtres, comme leur trop grande chaleur, et celle du cerveau dans les fièvres ardentes. Les esprits étant alors agités rapidement dans le cerveau, causent l’insomnie. De là vient que l’on s’y trouve beaucoup plus sujet en été et dans la jeunesse. Outre les passions de l’âme, telles que l’amour, la crainte, la terreur et la colère, pendant lesquelles les esprits agités par un mouvement continuel entretiennent les veilles, les longs jeûnes font la même chose, à cause que le défaut d’aliments subtilise les esprits animaux et dessèche le cerveau.

Enfin, l’insomnie est un symptôme fort ordinaire aux vieillards, les pores du cerveau {c} ayant été ouverts ou trop élargis par le passage continuel des esprits depuis un fort grand nombre d’années qu’ils y passent et repassent trop facilement. Cela est cause que, quoique ces esprits soient d’ailleurs tranquilles, ils ne laissent pas de tenir les vieillards éveillés par leur mouvement perpétuel.

Les insomnies sont plus dangereuses dans l’âge de consistance {d} et aux femmes qu’elles ne le sont dans la jeunesse et aux hommes. On en a vu de quarante-cinq nuits de suite, et on parle de l’insomnie d’un mélancolique qui fut quatorze mois sans dormir. Ces sortes de veilles dégénèrent souvent en démence.

Dans les enfants les insomnies sont d’ordinaire la suite de quelque autre maladie. Elles surviennent à l’éruption difficile des dents, aux vers, ou aux tranchées, {a} ou succèdent aux crudités de l’estomac qui rendent la nuit inquiète, et qui interrompent le sommeil. »


  1. V. note [2], lettre 267.

  2. Soucis.

  3. Orifices ou petits canaux imaginaires qui étaient censés mettre le cerveau en communication avec le reste du corps, et permettre l’entrée et la sortie des « esprits » (influx nerveux).

  4. La maturité : de la puberté au début de la vieillesse (vers cinquante ans au xviie s.).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 6 manuscrit, note 25.

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(Consulté le 29/03/2024)

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