À Charles Spon, le 11 juin 1649, note 27.
Note [27]

« Adieu et aimez-moi. »

Vallier (Journal, tome i, pages 342‑344) a détaillé les deux attentats sacrilèges que Guy Patin venait de relater (en inversant leur ordre chronologique) :

« Enfin, le dérèglement fut si grand partout qu’il s’étendit même jusqu’aux choses les plus saintes et sacrées. Le lendemain de la fête de la Pentecôte, 24e mai, {a} un grand laquais, étant à la messe dans l’église du village de Sannois, fut tenté d’une curiosité bien horrible et criminelle : lorsque le prêtre eut remis l’hostie sur l’autel après l’avoir élevée et montrée au peuple, ce malheureux, qui était derrière lui, se leva promptement et tout d’un coup, se saisit et prit entre ses mains profanes ce précieux gage de notre salut ; ceux qui en étaient les plus proches lui sautèrent incontinent au collet et le lui ôtèrent sans aucune fraction, {b} puis le remirent sur l’autel avec toute la révérence qu’ils purent, en sorte que le sacrifice n’en fut presque point interrompu. Après lequel, comme l’on pressa ce sacrilège de dire ce qu’il prétendait faire et quelle était son intention, il répondit froidement qu’il ne pensait pas avoir commis un si grand crime et qu’il voulait voir seulement s’il y avait quelque autre chose que du pain en ce qu’il avait pris. Alors il fut mis entre les mains de la justice du lieu et ensuite amené dans les prisons de la Cour ecclésiastique de Paris ; d’où ayant été renvoyé par devant le bailli de Montmorency pour lui être fait et parfait son procès, il y fut condamné à faire amende honorable devant l’église dudit Sannois et y avoir la main droite coupée, à être pendu et étranglé, et son corps jeté au feu ; de quoi s’étant porté pour appelant au Parlement, il en sortit enfin plus favorablement qu’il ne méritait, sur le témoignage que le sieur Gorillon, son maître, rendit {c} au rapporteur de l’affaire de la simplicité naturelle de son domestique, plus digne de compassion, disait-il, que de châtiment. {d}

Cet épouvantable attentat fut suivi d’un autre, presque tout semblable, dans l’église des pères de l’Oratoire de la rue Saint-Honoré de cette ville, {e} où un jeune homme de bonne famille d’Orléans et beau-frère d’un des plus sages conseillers du Parlement, aidant à dire la messe, comme novice de la Maison, fut atteint d’une si ardente frénésie et d’une aliénation d’esprit si subite que, se jetant sur le célébrant au moment qu’il remettait l’hostie sur l’autel, il le renversa par terre et lui donna quelques coups de poing et de pied ; mais s’étant promptement relevé et remis à l’autel, il {f} ne laissa pas d’achever son sacrifice avec la même dévotion, après toutefois que l’on eut fait retirer ce dangereux fol et qu’on lui eut substitué un autre religieux. » {g}


  1. 1649.

  2. Sans le briser du tout.

  3. Témoigna.

  4. « Ce laquais s’appelait Nicolas Jouy » (note de Courteault).

  5. Paris.

  6. Le prêtre.

  7. Cette seconde agression a été le sujet d’un libelle anonyme : Récit véritable d’une action profane et extravagante, arrivée vendredi dernier, 11e juin 1649, à la messe du R.P. Benoist, prêtre de l’Oratoire, dans leur église de Saint-Honoré à Paris, sur les sept à huit heures du matin (Paris, François Preuveray, 1649, in‑4o).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 11 juin 1649, note 27.

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(Consulté le 24/04/2024)

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