À Charles Spon, le 25 octobre 1652, note 27.
Note [27]

L’événement célébrait la réconciliation de la capitale avec le roi (Journal de la Fronde, volume ii, fo 164 ro, octobre 1652) :

« Les députés des colonels ayant été reçus le 18 à Saint-Germain et présentés par le maréchal de L’Hospital, M. de Sève {a} y porta la parole et témoigna le désir que tout Paris avait de revoir son souverain, le supplier de vouloir revenir, d’accorder une amnistie dans laquelle chacun pût trouver sa sûreté, et de réunir le Parlement, et louant fort la conduite de la reine et le soin qu’elle prenait de l’éducation du roi ; à quoi le roi répondit lui-même qu’encore que les révoltes qu’on avait suscitées à Paris le dussent obliger d’aller faire d’autres voyages, que néanmoins, le désir que ses bons bourgeois lui témoignaient de le revoir l’avait fait résoudre de retourner à Paris au premier jour pour y témoigner l’affection qu’il avait pour la capitale de son royaume ; et qu’il donnait ordre au prévôt des marchands touchant ce qu’il faudrait faire pour sa réception ; après quoi, les députés furent traités à dîner dans le vieux château et le soir retournèrent coucher à Rueil, d’où ils revinrent le lendemain avec le maréchal de L’Hospital, le prévôt des marchands et le lieutenant civil ; et ce maréchal dit qu’il apportait l’amnistie telle que S.A.R. {b} l’avait souhaitée, mais on ne l’a pas encore vue paraître, et confirme le retour du roi qui logerait dans le Louvre, qu’on préparait d’abord pour cet effet, et où Sa Majesté manda le Parlement de Pontoise et tous les officiers de celui de Paris pour les réunir, ayant envoyé à cette fin une lettre de cachet en particulier afin de ne reconnaître point de Parlement ici et faire vérifier l’amnistie, avec ordre de s’y trouver en robes rouges, le roi y voulant tenir son lit de justice. »


  1. Alexandre de Sève (v. note [6], lettre 367).

  2. Son Altesse Royale, Gaston d’Orléans.

Le P. Berthod, agent de la cour à Paris, a expliqué l’importance politique de ce retour (Mémoires, page 598) : l’enjeu avait été de soulever contre les princes les bourgeois et le peuple de Paris, avec le dessein précis de leur faire prendre la Bastille. Tout était préparé, mais il ne fut pas nécessaire d’aller si loin.

« La garde de la porte Saint-Martin se montra le 17e d’octobre avec le ruban blanc au chapeau, on y fit boire tous les passants à la santé du roi ; et dans ce temps-là, 25 ou 30 cavaliers, officiers ou gardes de M. le Prince et de M. de Beaufort se présentèrent à la porte avec un passeport de M. d’Orléans que les soldats bourgeois déchirèrent en pièces, et poussèrent ces cavaliers si vigoureusement qu’à peine purent-ils atteindre le logis de M. de Beaufort pour leur servir d’asile.

Tout cela se fit par les soins du sieur de Poix qui fit un festin solennel dans le corps de garde à toute la compagnie, à laquelle il avait donné le ruban blanc. […] Les colonels qui pendant ce temps-là étaient allés à la cour faire leur députation au roi et qui en furent admirablement bien reçus, en revinrent le 19e avec le maréchal de l’Hospital, le prévôt des marchands et les autres magistrats ; et M. d’Orléans, sachant qu’ils arrivaient, fit écrire une lettre à M. de l’Hospital par le maréchal d’Étampes, laquelle lui fut envoyée en grande diligence par un courrier qui le trouva à la tête des colonels dans le bois de Boulogne.

Cette lettre portait avis à M. le maréchal de l’Hospital et aux autres de retourner à Saint-Germain ; qu’ils ne seraient pas reçus à Paris ; que toute la ville sachant leur venue, s’était mise en armes ; que les bourgeois avaient tendu les chaînes ; que chacun faisait des barricades dans son quartier et que le peuple était résolu de les égorger plutôt que de souffrir qu’ils entrassent dans la ville.
Cette lettre et le discours de celui qui la portait, qui exagéra la chose jusqu’au point de la faire passer pour une révolte générale, fit faire halte à toute la compagnie pendant une demi-heure, dans l’incertitude s’ils avanceraient vers Paris ou s’ils reculeraient du côté de Saint-Germain ; et même quelques-uns de la troupe proposèrent de retourner trouver le roi.

Si ce malheur fût arrivé, les affaires du roi étaient perdues et très certainement, Sa Majesté ne fût point venue dans Paris, parce que ceux qui restaient de la faction des princes n’attendaient que cela pour faire publier par la ville, et dans le même temps que le maréchal de l’Hospital et sa troupe s’en retourneraient, que la cour se moquait de Paris et que toutes les paroles qu’on leur avait données n’étaient que des leurres pour les mieux attraper, et pour donner sujet à la reine de satisfaire à la passion qu’elle avait de se venger des habitants de Paris et de faire périr la ville. […] Dieu permit que pendant que le maréchal de l’Hospital et sa troupe faisaient halte, un homme de condition qui allait de Paris à Saint-Germain les voyant arrêtés, en demanda la raison ; et l’ayant apprise, il leur fit connaître qu’on les trompait, que c’était une ruse des princes ; qu’il n’y avait rien de si faux que ce qu’on leur avait dit et écrit ; que toute la ville était dans la plus grande tranquillité du monde et dans la disposition de les recevoir avec joie et comme les précurseurs du roi. Dans cette assurance, ils marchèrent vers Paris où ils furent reçus avec des acclamations publiques. »

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 25 octobre 1652, note 27.

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(Consulté le 19/04/2024)

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