À Claude II Belin, le 14 mai 1639, note 3.
Note [3]

Fondé au xie s. pour protéger les pèlerins de Terre sainte contre les Turcs, l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem était encore florissant au xviie s. Ses moines soldats, les chevaliers de Malte, étaient recrutés parmi la noblesse de toute l’Europe, mais surtout celles de France et d’Espagne. Charles Quint les avait installés à Malte (v. note [4], lettre 659) en 1530. Depuis cette base fortifiée, ils protégeaient les navires chrétiens contre la course barbaresque.

En France, les cadets des familles nobles formaient le gros des chevaliers de l’Ordre, pour garnir notamment le corps des officiers de la marine royale et de l’administration coloniale. On était alors moins regardant sur les conditions d’antique noblesse : les prétendants n’hésitaient pas à en falsifier les certificats et les témoignages. Les chevaliers ne respectaient pas non plus toujours strictement leurs trois vœux de chasteté, d’obéissance et de pauvreté (v. lettre à Spon, datée du 27 août 1658).

Un unique grand maître menait leur hiérarchie (commandeurs, baillis, grands-prieurs) ; c’était alors Jean-Paul de Lascaris-Castellar (1560-1657), le 57e depuis le bienheureux Gérard, mort en 1120. Guy Patin évoquait ici l’épisode connu sous le nom de Carnaval de Malte : ayant accusé les jésuites d’avoir convaincu le grand maître Lascaris d’abréger les festivités du carnaval, les chevaliers avaient pillé leur collège et en avaient chassé plusieurs de l’île.

Le carnaval était, dans toute la catholicité, le « temps de réjouissance qui se compte depuis les Rois [épiphanie, le 6 janvier] jusqu’au carême [v. note [10] du Naudæana 3]. Les bals, les festins, les mariages, se font principalement dans le carnaval » (Furetière). Les jours gras sont ceux de la semaine précédant le début du carême (mercredi des Cendres) ; on peut encore y manger de la viande avant d’entamer les quarante jours maigres de pénitence (avec six dimanches de relâche) qui mènent jusqu’à Pâques. Le carnaval s’achevait le Mardi gras (ou carême-prenant) par de grandes festivités populaires (bals masqués, banquets, défilés, etc.), qui se reproduisaient à la mi-carême. Les protestants ignoraient ce cérémonial et le jeûne carné qui le suivait. Dans ses lettres, Guy Patin a régulièrement exprimé son aversion pour le tapage carnavalesque.

De son temps, l’Épiphanie (v. note [10], lettre 513) et le carnaval donnaient lieu à de grands abus charnels. Dans sa Cabale des dévots, Raoul Allier (pages 110 et suivantes) a relaté comment la Compagnie du Saint-Sacrement (v. note [7], lettre 640) s’est évertuée, avec une indéniable efficacité, à en prohiber les scandales.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Claude II Belin, le 14 mai 1639, note 3.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0047&cln=3

(Consulté le 29/03/2024)

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