À André Falconet, le 21 septembre 1661, note 3.
Note [3]

Mépriser si rudement Jean Pecquet (v. note [15], lettre 280) fait peu honneur à Guy Patin, qui fut un temps son ami : l’immortel descripteur des voies du chyle resta fidèle à Nicolas Fouquet, vivant en prison à ses côtés jusqu’à la fin de son procès (20 décembre 1664) et à son départ pour la prison perpétuelle à Pignerol.

Les Archives de la Bastille (volume 2, page 357) reproduisent une lettre du roi à D’Artagnan (v. note [2], lettre 715), datée de Nantes, le 7 septembre 1661 :

« Monsieur D’Artagnan, Ayant trouvé bon que le sieur Pecquet, médecin qui a accoutumé de traiter le sieur Fouquet, se rende près de lui en mon château d’Angers, je vous fais cette lettre pour vous dire que vous ayez à l’y recevoir pour y être enfermé avec le sieur Fouquet, sans en pouvoir sortir ni avoir communication avec qui que ce soit du dehors. Sur ce, je prie Dieu, etc. »

Dans les mêmes Archives (volume 1, page 405), cette autre lettre du roi à M. de Besmaus, datée de Paris, le 26 février 1665 :

« Je vous fais cette lettre pour vous dire qu’aussitôt que vous l’aurez reçue, vous ayez à remettre au chevalier du guet {a} de cette ville ou à celui de ses lieutenants qui vous rendra la présente, les nommés Pecquet, médecin, et La Vallée, détenus prisonniers en mon château de la Bastille pour les faire conduire chacun en son pays, suivant l’ordre que je lui en donne. » {b}


  1. V. note [53] du Borboniana 4 manuscrit.

  2. « Il est probable qu’on avait attendu l’arrivée du surintendant à Pignerol pour mettre en liberté ses serviteurs dévoués, qui auraient pu chercher par tous moyens à rejoindre un maître qu’ils chérissaient » (note de François Ravaisson).

    V. note [8], lettre 804, pour les déchirants adieux de Pecquet et de La Vallée à Fouquet.


Après un temps d’exil à Dieppe, sa ville natale, Pecquet fut autorisé à revenir pratiquer la médecine à Paris, mais Patin n’en a plus dit mot dans la suite des lettres. Pecquet aurait pris l’habitude de soigner tout le monde (y compris lui-même) avec de généreuses lampées d’eau-de-vie : {a}

« M. le surintendant Fouquet le voulut avoir pour son médecin de plaisir, c’est-à-dire pour l’entretenir, à ses heures perdues, des plus jolies questions de la physique : ce que Pecquet faisait admirablement. Mais, comme si on ne pouvait jamais être entièrement heureux chez les grands, son cehval s’étant abattu sous lui dans les rues de Paris, il eut la jambe cassée. Il venait d’ordinaire aux conférences de M. Rohault, {b} et s’y faisait écouter autant que personne. Ce fut là que, le voyant d’ordinaire, je liai amitié avec lui comme avec un homme de fort bon commerce. Dans la disgrâce de son maître, m’étant retiré en province, je n’entendis plus parler de lui jusqu’en l’année 1670, que je le rencontrai chez un de mes amis à la campagne. Quand je ne l’aurais pas reconnu à l’air de son visage, son haleine me l’aurait fait sentir, à cause de la méchante habitude qu’il avait de boire de l’eau-de-vie. Il en conseillait l’usage à ses amis, comme un remède à tous les maux ; mais l’eau-de-vie fut pour lui une eau de mort. Elle lui brûla les entrailles et avança ses jours, qu’il aurait pu employer au service du public. » {c}


  1. Vigneul-Marville, Mélanges d’histoire et de littérature [Paris, 1700, v. note [19] de la Préface de la première édition des Lettres (1683) et ses auteurs], second volume, pages 2‑3.

  2. Leçons publiques parisiennes ou mercredis de Jacques Rohault, v. notule {e}, note [1], lettre 594.

  3. Pecquet mourut à Dieppe en 1674 ; v. note [6], lettre latine à Jan van Horne, datée du 6 septembre 1665, pour sa dernière mention dans la correspondance de Patin.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 21 septembre 1661, note 3.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0713&cln=3

(Consulté le 29/03/2024)

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