Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-4, note 31.
Note [31]

Cet article est directement emprunté à celui du Grand Dictionnaire historique… de Louis Moréri sur le philosophe Amyclas d’Héraclée (Lyon, 1674, page 110) :

« Pline fait mention d’une ville < de ce nom > qui était bâtie entre Cajete et Ansur, ou Terracina, en Italie, {a} et qui devint déserte par la folie des habitants qui, s’étant trop ridiculement attachés à la doctrine de Pythagore qui défend de faire mourir aucun animal, {b} aimaient mieux se laisser mordre par les serpents qui y naissaient de toutes parts, ou fuir, que de les tuer (liv. 3, ch. 5, et 10, ch. 29). {c} Quelques autres ajoutent qu’ils furent tués par leurs ennemis, car on dit qu’après une fausse alarme qu’on leur avait donnée de leur arrivée, ils défendirent, sur peine de la vie, de ne publier jamais de tels bruits ; de sorte qu’ils les surprirent sans peine (Servius sur le 10e liv. de L’Énéide). C’est de là qu’on a tiré le proverbe ancien : “ Amyclas a perdu le silence ” (Érasme, aux Proverbes, au mot Taciturnitas illaudata). » {d}


  1. Ainsi située sur le littoral du Latium (province de Latina), entre Terracina (v. troisième notule {a}, note [22] du Naudæana 3) et Gaeta (Gaète), Amyclæ (féminin pluriel latin), Amycles ou Amyclées, cité italienne de la Grande Grèce (v. note [67] du Patiniana I‑2), porte aujourd’hui le nom de Sperlonga.

    Dans son adage sur le sujet, {i} Érasme écrit :

    Accipiendæ sunt autem hoc loco Amyclæ non ut sit una e centum illis urbibus Laconiæ, quam Lacedæmonis filius condidit, sed oppidum quoddam situm inter Caietam et Tarracinam, conditum ab iis Laconibus qui comites Castotis et Pollucis fuerunt eique nomen indidere, quo Laconicas illas Amyclas referret.

    [Amyclées ne doit pas être tenue ici pour l’une des cent villes de Laconie que fonda le fils de Lacédémon, {ii} mais comme une place forte bâtie entre Gaète et Terracina par les Lacédémoniens qui accompagnèrent Castor et Pollux, {iii] et qui nommèrent ce lieu par référence aux Amyclées de Laconie].

    1. V. notule {d} infra.

    2. V. note [2], lettre latine 265, pour Sparte (Lacédémone, fondée par Lacédémon), principale cité antique de Laconie (Péloponnèse), avec les Amyclées grecques.

    3. V. note [2] de la Consultation 5 pour les mythiques Dioscures, Castor et Pollux.
  2. En vertu de la métempsycose qui faisait partie de la doctrine pythagoricienne (v. note [27], lettre 405).

  3. Pline, Histoire naturelle (sans mention de Pythagore) : livre iii, chapitre ix, § 6, Littré Pli, volume 1, page 163 ; et livre viii, chapitre xliii, ibid. page 335.

  4. Taciturnitas illaudata [Se taire n’est pas louable] est le titre d’une section du recueil intitulé :

    Adagiorum D. Erasmi Roterodami Epitome. Ex novissima Chiliadum ceu ipsorum fontium recognitione excerpta, et multis in locis jam longe accuratius, quam ante, emendata. Cum indice Rerum ac Verborum locupletissimo, cumque præcipuorum Auctorum,e quibus hoc opusculum concinnatum est, nomenclatura.

    [Abrégé des Adages de D. Érasme de Rotterdam. Tiré d’une toute nouvelle revue des Chiliades, {i} qui sont leur source première, et corrigée en maints endroits, bien plus soigneusement qu’il ne l’a jamais été. Avec un très riche index des matières et des mots et une liste des principaux auteurs qui ont servi à composer ce petit livre]. {ii}

    L’adage no 801, Amyclas perdidit silentium [Le silence a perdu Amyclas], y est résumé pages 506‑507 : {iii}

    Τας Αμυκλας απω λεσεν η σιγη. {iv}

    Servius interpretes enarrat hunc in modum, Æneidos 10. Cum apud Amycleos subinde nunciaretur hostium adventus, idque falso, lata lege cautum est, ne quis unquam hostis nunciaret adventum. Atqui post evenit, ut vere jam advenirent hostes. Quod cum nemo nunciaret, propter legis interdictum, civitas de improviso capta est. Qui casus populari joco dedit occasionem, ut dicerent, Amyclas silentio periisse, si cui sua taciturnitas fuisset incommodo.

    [Servius l’explique ainsi dans son commentaire sur le chant x de L’Énéide : {v} comme une fausse rumeur avait annoncé aux Amycléens l’arrivée des ennemis et que cela s’était trouvé faux, une loi décréta que nul ne devrait plus jamais annoncer une telle nouvelle ; {vi} mais il advint qu’un jour les ennemis attaquèrent véritablement la ville ; et elle fut prise à l’improviste, puisque nul ne l’avait annoncé, à cause de la loi qui interdisait de le faire. Cet accident a donné occasion au peuple de plaisanter en disant « Le silence a perdu Amyclas », quand quelqu’un pâtit d’être resté silencieux : « Le silence a perdu Amyclas. »]

    1. « Milliers », sous-titre des Adages, v. notule {b}, note [13], lettre 6.

    2. Amsterdam, Joan. Janssonius, 1649,, 1663, in‑12 de 547 pages, pour la première de nombreuses éditions ; les adages y sont extrêmement abrégés et rangés par thèmes, classés dans l’ordre alphabétique.

    3. La traduction de Moréri, « Amyclas a perdu le silence » est un contresens car elle a pris Amyclas pour un nominatif singulier, sujet du verbe perdidit, alors que c’est le cas accusatif pluriel féminin d’Amyclæ, employé comme complément d’objet direct de ce verbe, dont le sujet est silentium.

      Dans son édition de 1707 (tome 1, page 218), sur Amycles, le Grand Dictionnaire a corrigé son erreur : v. note [49] du Faux Patiniana II‑7.

    4. Version originale grecque de l’adage

    5. Le commentaire de Servius, rédigé au ive s. (repris dans le Virgile publié à Leeuwarden, 1717, v. note [49] du Borboniana 6 manuscrit), tome ii, page 1055, première colonne, porte sur les vers 562‑564 du chant x :

                         […] Fulvumque Camertem,
      Magnanimo Volscente satum, ditissimus agri
      Qui fuit Ausonidum, et tacitis regnavit Amyclis
      .

      [(…) et le blond Camers, le fils du magnanime Volcens, qui fut le plus riche propriétaire d’Ausonie et qui régna sur la silencieuse Amyclas].

    6. Servius évoque aussi les interprétations moins plausibles qui lient le silence des habitants à leur respect de la règle pythagoricienne selon laquelle les disciples devaient l’observer strictement durant les cinq années suivant leur initiation.

Ni Diogène Laërce {a} ni La Vie de Pythagore, ses symboles, ses vers dorés, et la Vie d’Hieroclès. Par M. Dacier, garde des livres du Cabinet du roi. Tome premier {b} ne font état d’un séjour du philosophe à Amyclæ : il serait mort à Métaponte (Basilicate) vers 495 av. J.‑C. En brodant sur Moréri, les rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin paraissent avoir confondu Pythagore et le pythagorisme des Amycléens. Cet article leur plaisait fort car ils l’ont repris plus loin. {c}


  1. Dans les Vies des philosophes illustres, v. note [3], lettre 147.

  2. Paris, Rigaud, 1706, in‑12 de 273 pages, premier de deux tomes.

  3. V. sa note [49] du Faux Patiniana II‑7.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-4, note 31.

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(Consulté le 29/03/2024)

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