Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 9 manuscrit, note 36.
Note [36]

La date de cet article (1638) a été ajoutée dans la marge du manuscrit.

  • V. note [10], lettre 353, pour Charles-Jacques de Gélas de Léberon, évêque de Valence de 1624 à 1654, arrière-petit-neveu de Jean i de Montluc, et petit-neveu de Charles de Gélas (v. supra note [32]). En ajoutant Pierre-André, oncle de Charles-Jacques (qui en fut titulaire de 1598 à 1622), cet évêché s’est transmis entre les membres de la même famille pendant un siècle (1553-1654).

  • Les accusations de calvinisme portées contre Jean de Montluc ont donné lieu à de multiples exégèses, dont deux me semblent convenablement résumer cette grande affaire dont la famille de Gélas de Léberon s’est longtemps évertuée effacer les éclaboussures qui ont pu ternir la mitre de Valence.

    1. Antoine Degert a détaillé le cas de Montluc dans son article intitulé Procès de huit évêques français suspects de calvinisme (La Revue des questions historiques, 38e année, 151e livraison, Paris, 1904, pages 91‑108) :

      « Le 13 avril 1563, le tribunal de l’Inquisition faisait afficher dans divers endroits de Rome une citation dirigée contre huit évêques français. Ils y étaient sommés, sous peine d’excommunication latæ sententiæ, de suspense et de privation de tout bénéfice, de comparaître dans les six mois devant le Saint-Office pour se disculper du soupçon d’hérésie qui pesait sur eux. {a} […]

      Supérieur à Caracciolo {b} par la tenue, le talent et la considération qu’il s’était justement acquise dans plusieurs missions diplomatiques, l’évêque de Valence, Jean de Montluc, frère du célèbre maréchal, ne le dépassait guère par la pureté des mœurs ni par la rectitude de la foi. Au dire de Théodore de Bèze, cet évêque “ faisait comme un mélange des deux doctrines ”, mais dans ce mélange, c’est le protestantisme qui entrait à la plus haute dose. De 1557 à 1561, il publia plusieurs recueils de sermons ou d’instructions chrétiennes ; dans tous, on trouve sur le libre arbitre, l’utilité des œuvres, {c} l’Eucharistie, le purgatoire, le culte des saints et autres questions controversées entre les deux religions, des omissions significatives ou des propositions franchement calvinistes. Trois de ces publications encoururent les censures de la Sorbonne […].

      Avec ce parti pris de conciliation à tout prix, Monluc était tout désigné pour travailler à rapprocher catholiques et protestants au milieu de leurs hostilités sanglantes. Aussi le voyons-nous employé un moment (1562) dans les négociations qui devaient amener Condé à quitter le royaume, à condition que les triumvirs s’éloigneraient de la cour. {d} Rome, eût-elle été disposée à fermer les yeux sur ces assiduités suspectes auprès du chef militaire des calvinistes français, n’avait que trop d’autres griefs contre l’évêque de Valence. Ainsi qu’en faisaient foi pour elles les dépositions de vingt et un témoins, Jean de Montluc avait attaqué le culte des images, enseigné que l’Eucharistie n’était pas un sacrifice de propitiation, {e} mais seulement de louange, soutenu que le sacrement consistait dans l’usage et que la communion n’était valide que sous les deux espèces. {f} Un témoin avait même affirmé qu’il avait envoyé le résultat d’une enquête faite par le cardinal de Tournon, mais le courrier qui le portait avait été dépouillé de tous ses papiers dans les environs de Turin par les ministres du roi ; cette enquête, poursuivie en 1558 dans son diocèse, établit qu’il y avait frauduleusement introduit, pour le baptême et la prière, les rites observés par Calvin et les Genevois, et y avait combattu les prédicateurs catholiques. »

    2. L’Essai d’histoire littéraire d’Hector Reynaud intitulé Jean de Montluc, évêque de Valence et de Die (Paris, 1893, Slatkine Reprints, Genève, 1971) contient un appendice i, dont le début précise la querelle qui eut lieu à Valence entre Montluc et Félix Vermond, doyen du chapitre de Valence (pages 244‑245) :

      « Malgré ses libéralités et son talent d’administrateur, Montluc ne put justifier, aux yeux des bons catholiques de son diocèse, les regrettables concessions qu’il faisait au protestantisme. Le chapitre de la cathédrale de Valence s’alarma des dispositions de son évêque, en matière de foi, et le doyen, Félix Vermond, accusa publiquement Montluc du crime d’hérésie (1560). Cette accusation n’était pas sans fondement, nous le savons trop ; mais la raison du plus fort étant toujours la meilleure, le doyen des chanoines expia sa témérité. {g} […]

      Le P. Columbi, jésuite, […] dans un opuscule intitulé Quod Joannes Monlucius non fuerit hæreticus (Lyon, Rigaud, 1640), {h} s’est attaché à disculper Montluc du soupçon d’hérésie et a nié la condamnation que le pape Pie iv infligea de ce chef à l’évêque de Valence. Est-ce la raison de la mort pieuse de Montluc chez les jésuites de Toulouse ? Est-ce plutôt à l’instigation du neveu et successeur de Montluc, Jean de Léberon, dont Columbi fut le secrétaire ? Nous ne saurions le déterminer.


      1. Montluc était l’un de ces huit prélats nommément cités par l’Inquisition romaine.

        Les excommunications portées par la loi, et non par un juge, c’est-à-dire encourues de plein droit, dès que l’action est commise, sont appelées « excommunications du canon, ou latae sententiae. Elles sont en si grand nombre qu’il serait difficile, même aux plus savants canonistes, d’en faire un dénombrement exact » (Trévoux).

      2. Antoine Caracciolo, évêque de Troyes, figurait aussi sur la liste des huit prélats français cités par l’Inquisition.

      3. Les indulgences pontificales.

      4. Au début des années 1560, le prince Louis ier de Bourbon-Condé était, avec l’amiral de Coligny, à la tête du parti réformé, opposé au « triumvirat » qui dirigeait le parti catholique, composé du connétable de Montmorency, du duc de Guise et de Jacques d’Albon de Saint-André.

      5. Sacrifice destiné à rendre Dieu favorable (propice) aux hommes (v. première notule {a}, note [31] des triades du Borboniana manuscrit).

      6. V. note [5] du Borboniana 6 manuscrit.

      7. L’Arrêt du Grand Conseil en faveur de Jean de Montluc, évêque de Valence et de Die, contre Vermond, doyen en la grande église de Valence a été imprimé 70 ans plus tard (Tournon, Cl. Michel, 1630, in‑8o), avec cette sentence :

        « Obligation au sieur Vermond de se rétracter, dans la salle du Conseil, à Grenoble, et à Valence, dans la salle de la maison de ville, les corps assemblés, en pleine église, devant tout le peuple, et dans la salle capitulaire, en présence des chanoines et autres suppôts du chapitre ; à une amende de cinq cents écus – cinq cents livres envers le roi, cinq cents livres envers l’évêque, cinq cents livres envers les pauvres – ; la lettre ou libelle en question, lacéré par la main du bourreau ; et comme le syndic du chapitre était intervenu mal à propos pour ledit doyen, il fut condamné en son propre et privé nom à deux cents livres d’amende – cent livres envers le roi et cent livres envers les pauvres – et à tenir prison jusqu’au paiement. »

      8. Jean Columbi (1592-1679) : Liber singularis, quod Joannes Monlucius, Valentinus et Diensis episcopus, non fuerit hæreticus [Livre singulier sur le fait que Jean de Montluc, évêque de Valence et de Die, n’a pas été hérétique] (Lyon, V.‑C. Rigaud et P. Borde, 1640, in‑4o).

  • Upie (aujourd’hui commune du département de la Drôme, à 12 kilomètres au nord de Crest) était une seigneurie du Valentinois (région dont la capitale était Valence, v. note [14], lettre 70) que les Gélas avaient acquise dans la seconde moitié du xvie s. Sans grande surprise, les nobles généalogies que j’ai consultées ne font pas état d’un membre de cette famille qui se serait suicidé après avoir assassiné son valet.
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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 9 manuscrit, note 36.

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(Consulté le 20/04/2024)

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