À Claude II Belin, le 27 septembre 1653, note 4.
Note [4]

Guy Patin avait tort de se gausser : le prince de Conti allait épouser Anne-Marie Martinozzi (Rome 1639-Paris 1677), aînée des deux filles de Girolamo Martinozzi, majordome du cardinal Barberini, neveu du pape Urbain viii, et d’une sœur du cardinal Mazarin, Laura Margarita Mazzarina (1608-1685). Anne-Marie était arrivée à Paris en septembre 1647 en compagnie de ses cousines, Laure et Olympe Mancini. Peu de temps après que Laure eut épousé le duc de Mercœur, Anne-Marie fut demandée en mariage par le prince de Conti qui venait d’abandonner à Bordeaux les restes de la Fronde vaincue, s’était retiré dans son gouvernement de Languedoc et aspirait à la paix. Ce fut son poète familier, Jean-François Sarrazin, qui lui suggéra l’idée de cette union et quoiqu’il répugnât d’abord au frère de Condé et de Mme de Longueville d’épouser la nièce de leur ennemi personnel, il finit par le désirer vivement. De son côté, la nièce du cardinal eût préféré le duc de Candale qui l’avait antérieurement demandée ; mais on fit taire ses préférences, tant il importait au ministre de s’allier à un prince du sang. Le mariage fut célébré en grande pompe à Compiègne le 21 février 1654.

Mme de Motteville (Mémoires, page 442‑443) :

« Le prince de Conti, après la guerre, se voyant exilé et mal à la cour, quitta ses bénéfices {a} et fit demander Mlle de Martinozzi pour lui-même, s’estimant heureux de devenir le neveu de celui qu’il avait haï et méprisé pour ami. Cette alliance ne parut pas d’abord convenir à la grandeur et à la naissance de ce prince ; mais l’éclat de la fortune du cardinal était si grand qu’il pouvait, en effaçant la bassesse de sa race, élever sa famille à la participation des plus suprêmes dignités. Le prince de Conti trouva plusieurs avantages dans le choix qu’il fit de Mlle de Martinozzi car, avec de la beauté, elle avait beaucoup de douceur dans l’humeur, beaucoup d’esprit et de raison. Ces qualités si agréables à un mari ont été perfectionnées par sa piété qui a été si grande qu’elle a eu l’honneur de suivre le sien dans le chemin austère de la plus sévère dévotion ; mais elle a eu cet avantage sur lui qu’elle a donné à Dieu une âme toute pure et dont l’innocence a servi de fondement à sa vertu, à l’amour qu’elle a eu pour lui, à l’estime qu’elle a faite de ses bonnes qualités et à la reconnaissance qu’elle a eue de l’honneur qu’il lui avait fait. »


  1. Ecclésiastiques.

La princesse de Conti, en effet, n’eut pas l’existence tapageuse de ses cousines ; elle était pieuse, austère même et portée au jansénisme, sous l’influence de sa belle-sœur Mme de Longueville. Comblée de richesses et d’honneurs, elle aurait vécu plus volontiers dans un couvent qu’à la cour si on l’eût laissée libre de suivre ses goûts. Ce fut surtout après une maladie dont elle faillit mourir que ses idées mystiques s’exaltèrent. Elle réforma ses toilettes, renonça aux bijoux et décida son mari à vivre dans le mariage comme dans le célibat. Devenue veuve à 29 ans, elle refusa de se remarier afin de se livrer tout entière à ses pratiques de dévotion. Frappée d’apoplexie, elle ne survécut que quatre ans au prince de Conti. Anne-Marie Martinozzi eut deux fils : l’aîné, Louis-Armand (1661-1685), épousa Mlle de Blois, fille de Louis xiv et de Mlle de La Valliére, et mourut à 24 ans ; le second, François-Louis (1664-1709), fut prince de La Roche-sur-Yon (G.D.U. xixe s.).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Claude II Belin, le 27 septembre 1653, note 4.

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(Consulté le 19/04/2024)

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