À Hugues II de Salins, le 15 avril 1661, note 4.
Note [4]

V. note [14], lettre 557, pour les Opuscula medica duo… [Deux opuscules médicaux…] de Jean Merlet (Paris, 1659). Le Paradoxum de tussi [Paradoxe de la toux] en occupe les pages 61 à 76.

  • Le paradoxe est défini page 61 :

    Paradoxum siquidem id vocatur, quot præter hominum opinionem, atque doctrinam ab omnibus probatam profertur, quodque novum, insolens, atque inauditum est. […]

    Ecce meum Paradoxum : Non omne quod Tussi vehementi copiosum, crassum, per breve tempus expectoratur, e pulmonibus promanare, sed maiori ex parte ex ipsa alvo ad pulmones corrivari.

    [On parle de paradoxe quand ce qu’on présente va contre l’opinion des hommes et contre la doctrine approuvée par tous, et se trouve être nouveau, insolite et inédit. (…)

    Voici mon paradoxe : Tout ce qu’en peu de temps une toux expectore de copieux et d’épais ne provient pas des poumons, mais s’y est, en plus grande partie, accumulé en provenant des intestins eux-mêmes].

  • La conclusion, page 75, éclaire le curieux propos :

    Quæri posset, num diaphragmatis motus per Tussim vehementem conferat as ascensum istorum humorum infra diaphragma congestorum ut sursum transmittantur ? responderem hoc probabilius videri quam quod dicunt ad ascensum chyli (vere siscitium) in venam Cavam ascendentem non parum conducere diaphragmatis motum. De viis autem per quas sputa mea ex imo ventre in pectus ascendebant, idem esto iudicium quod superiori historia pronuntiatum fuit.

    [On pourrait douter que, par une toux violente, le mouvement du diaphragme fasse remonter ces humeurs accumulées au-dessous de lui, pour les évacuer par en haut. Je répondrais que cela semble plus plausible que de croire (ce qui est pure fiction) que le mouvement du diaphragme est insuffisant pour assurer l’ascension du chyle dans la veine cave inférieure. {a} Quant aux voies par lesquelles mes crachats monteraient dans la poitrine depuis le plus profond du ventre, je consens à en juger de la même façon que pour l’observation ci-dessus]. {b}


    1. Pathétique coup de griffe aux partisans des nouvelles voies du chyle (v. note [26], lettre 152) qui le faisaient sortir de la citerne de Pecquet pour remonter le long du rachis, dans les vaisseaux lymphatiques (canal thoracique), et aller se jeter dans la veine cave supérieure (via la veine subclavière gauche) ; mais Merlet se fourvoyait entièrement en imaginant que le chyle gagne la veine cave inférieure (qu’il appelait « ascendante »), car elle n’a aucune connexion anatomique directe avec les collecteurs intestinaux (mésentériques) du chyle.

    2. Paragraphe précédent de la même page :

      Certo certius assevero sputa tam copiosa ext ista plaga inferiori dimota sursumm irrepisse, atque ubi in pectus ascenderunt excepta fuisse in ampla bronchia asperæ arteriæ vicina, ac si amplum ibi formaen existeret.

      [J’assure avec pleine assurance que des crachats si abondants, délogés de cette région inférieure, {i} sont sortis par le haut : ils sont montés dans le thorax où ils se sont collectés dans une grosse bronche proche de la trachée-artère, à condition qu’il y existe un large orifice de communication]. {ii}

      1. La région sous-diaphragmatique, c’est-à-dire l’abdomen.

      2. Inexistant en dehors d’exceptionnelles béances du diaphragme : Merlet reconnaissait ainsi l’improbabilité de son paradoxe.

Guy Patin approuvait le paradoxe de Merlet, mais il n’a pas convaincu Thomas Bartholin : v. notes [9] et [10] de sa lettre datée du 30 septembre 1663. Il n’a de réalité aujourd’hui que dans les collections purulentes formées sous le diaphragme (abcès sous-phréniques) qui peuvent exceptionnellement s’ouvrir dans le thorax par une fistule et se drainer dans une bronche.

Le phénomène pourrait aussi correspondre à une interprétation erronée ce qu’on appelle une vomique : expulsion en jet par la bouche, à la manière d’un vomissement, d’une grande quantité de pus liquide et grumeleux qui caractérise l’évacuation (devenue très rare de nos jours) d’un vaste abcès collecté dans le thorax.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Hugues II de Salins, le 15 avril 1661, note 4.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0690&cln=4

(Consulté le 29/03/2024)

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