À Charles Spon, le 16 septembre 1650, note 47.
Note [47]

L’Harmonie de l’amour et de la justice de Dieu, au roi, à la reine régente et à Messieurs du Parlement (La Haye [Paris], 1650, in‑12), est une mazarinade de 178 pages, très empreinte de feinte dévotion et de philosophie politique partisane, dont l’auteur serait François Davenne. Venant après Au sénat, et avant Au roi, la deuxième partie, À la reine régente (pages 88‑138), est une virulente diatribe, dont cet extrait (pages 128‑131) donne un aperçu :

« La bonne estime qu’on avait de votre personne vous a obligée de ne vous contenter pas d’avoir réduit vos vassaux à l’aumône, mais d’en faire un charitable massacre afin de les sortir de cette misère. Néron souhaitait que toutes les têtes fussent en une afin de les faire toutes à la fois sauter par terre. Et Votre Majesté avait un désir que chacune servît d’un pavé aux rues en s’imaginant qu’elle marcherait ainsi dessus toutes. Si vos souhaits se fussent accomplis, vous auriez eu un marchepied bien riche. Jésus mérita de se promener sur un pavement qu’il arrosait de ses veines. Vous seriez allée du pair avec son humanité sainte car vous vous seriez vautrée dans son sang mêlé parmi celui de ses frères.

[…] Mais ce voile d’une tyrante {a} qui succombe ne fera pas croire aux sages que vous en soyez meilleure, non plus que celui de l’Eucharistie, de laquelle vous vous faites une couverture. Vous la suiviez processionnellement dans un lieu et vous étiez la cause qu’on lui crachait au visage dans un autre. Là vous lui faisiez un Thabor et ici un Calvaire. {b} Dans un endroit vous la couvriez de boue, et dans un autre de fange. […] Un aveugle vous conduit, et vous tombez tous deux dans la fosse. »


  1. Sic pour tyranne, mot que Guez de Balzac avait proposé, mais que l’Académie a refusé, laissant tyran dépourvu de féminin.

  2. « Parce que le Thabor est, à ce que l’on croit, la montagne où Jésus-Christ se transfigura, en termes de spiritualité, Thabor signifie les délices que l’on sent dans l’oraison et dans les communications avec Dieu. Ainsi l’on dit que l’on suit volontiers Jésus-Christ au Thabor, mais qu’on l’abandonne, qu’on n’a pas la force de le suivre au Calvaire, c’est-à-dire qu’on goûte volontiers les plaisirs que l’on sent dans l’oraison et les autres exercices de la vie spirituelle, mais qu’on n’aime pas les croix, les ignominies, les souffrances » (Trévoux).

Comparativement à cela les attaques contre Mazarin sont anodines et obliques.

Dans une lettre à Le Tellier, datée de Libourne, le 21 août 1650, le cardinal s’irritait contre les pamphlets de ce temps (Mazarin, tome iii, page 729) :

« Souvenez-vous de me mander si le lieutenant civil aura découvert quel est le libelle que la veuve Camuzat imprimait. Naudé, qui a grand commerce dans les imprimeries, m’a mandé de Paris que c’est M. de Broussel, le bonhomme, qui a fait lui-même imprimer la plupart de tant de libelles qui courent dans Paris. Je vous prie de le dire à S.A.R. {a} et que l’on voie quel remède on pourrait apporter à cette licence qui est d’un préjudice extrême, car on a abreuvé les peuples de mille faussetés. On décrie le gouvernement et on excite leur compassion envers les prisonniers. »


  1. Son Altesse Royale, le duc Gaston d’Orléans.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 16 septembre 1650, note 47.

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(Consulté le 24/04/2024)

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