Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-2, note 47.
Note [47]

La citation latine vient du Psaume 19 (verset 14) :

Et ab alienis parce servo tuo : si mei non fuerint dominati, tunc inmaculatus ero et emundabor a delicto maximo.

[Préserve aussi ton serviteur des dieux étrangers : s’ils n’ont sur moi nul empire, alors je serai irréprochable et pur du grand péché]

L’Esprit de Guy Patin a de nouveau emprunté sa matière au Grand Dictionnaire de Louis Moréri (Lyon, 1674, pages 205‑206, sur Benoit xii), mais en insérant deux erreurs.

  1. Pour le pape, il ne s’agissait pas de Boniface xii (qui n’a encore jamais existé), mais de Benoît xii, comme fait voir le commentaire du R.P. Théophile Raynaud sur ce psaume dans le chapitre ii, Amorem cognatorum, nisi a servo Dei temperetur ; gravium malorum eidem causam esse ; et a perfectione, cui se addixit, avertere [L’Amour pour ses apparentés, s’il n’est modéré par le serviteur de Dieu, est pour ledit serviteur une source de très grands maux ; qui s’y adonne se détourne de la perfection], section ii, De Amore Cognationis, in servis Dei temperando [Les Serviteurs de Dieu doivent modérer leur amour pour leur parenté], du traité De Amore nationis et cognationis temperandi [Sur la Modération de l’amour pour la nation et de la parenté], {a} page 546. Il applique le propos du verset au népotisme pontifical :

    Et videtur etiam eum insinuasse Benedictus xii. Pontifex sanctissimus, nec non Pius iv., adhibentes sibi hanc symbolicam tesseram ; Si mei non fuerint dominati, tunc immaculatus ero. […] Sed ad rem hunc Psaltis sensum fateor non esse genuinum. Hebræa enim, et Græca, aperte ferunt, illud mei sumendum esse in casu gignendi ; ita ut sensus sit, ero immaculatus, si alieni a te, non fuerint mihi dominati, nec turpissima, (quisque voluntaria,) servitute eis addicar.

    [C’est ce sens que semblent aussi avoir sous-entendu le très saint pontife Benoït xii et Pie iv, {b} quand ils ont employé cette devise symbolique, « s’ils n’ont sur moi nul empire ». (…) Mais j’avoue que cette interprétation du psaume n’est pas authentique quand on l’applique à cette question. Les textes hébreux et grecs rapportent ouvertement que ce mei ne doit pas être pris dans le sens de progéniture ; ce qui mène donc à « je serai irréprochable si ceux qui te sont étrangers {c} n’ont sur moi nul empire », et si une servitude très honteuse (et toute volontaire) ne me soumet pas à eux]. {d}


    1. Opera omnia [Œuvres complètes], Lyon, 1665, v. note [6], lettre 736, tome xvii, Ascetica [Ouvrages ascétiques].

    2. V. note [6], lettre 965, pour Pie iv (1559-1565).

      Jacques Fournier (Canté, diocèse de Pamiers en Languedoc, vers 1285-Avignon 1342), moine cistercien (v. note [23], lettre 992) élu pape sous le nom de Benoît xii en 1334, fut un grand réformateur de la curie pontificale et des ordres religieux, et fustigea le népotisme.

    3. Les dieux païens.

    4. Si mei non fuerint dominati se traduit littéralement par « Si les miens n’ont pas prédominé », où mei (adjectif possessif), « les miens », désigne « ma famille » ; mais la version canonique du psaume en a fait mihi (pronom), « pour moi », en aboutissant à « S’ils (les alieni, les dieux païens) n’ont sur moi nul empire ».

  2. L’abbé dominicain Jean de Cardonne (dont ne parle pas Moréri), neveu de Benoit xii, a été archevêque d’Arles, et non de Bourges, de 1341 à 1348.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-2, note 47.

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(Consulté le 29/03/2024)

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