À Charles Spon, le 11 juin 1649, note 5.
Note [5]

Pierre (Agen 1582-Paris 1651) et Jacques (Tours 1591-Paris 6 novembre 1656) Dupuy (Puteanus) étaient fils de Claude Dupuy (1545-1594), conseiller au Parlement de Paris, humaniste et créateur d’une riche bibliothèque, et de Claude Sanguin, cousine germaine de Jacques-Auguste i de Thou, président au Parlement de Paris (v. note [4], lettre 13).

En 1616, le président de Thou avait confié à Pierre et Jacques l’instruction de ses enfants et la charge de sa bibliothèque, l’une des plus riches de l’époque. Ils avaient tenu un rôle essentiel dans la vie intellectuelle sous Richelieu par le biais de l’académie putéane (qui leur devait son nom). Nommés tous deux gardes de la Bibliothèque du roi ,sur la démission de Nicolas Rigault (v. note [13], lettre 86) en 1645, ils ont publié de nombreux ouvrages historiques. À leur mort, la splendide bibliothèque qu’ils avaient constituée, riche de 20 000 volumes et de 1 200 manuscrits, fut léguée au roi. Le don fut accepté le 7 avril 1657.

Joseph Scaliger a parlé de leur oncle (Secunda Scaligerana, pages 524‑525) :

« Ô le bon enfant que Pierre Dupuy, municeps meus, {a} consul d’Agen ! il m’a écrit tout plein de choses que je suis bien aise de savoir. M. Dupuy a pris des manuscrits dans une abbaye : tandis qu’on entretenait le gardien, il faisait jeter les livres par une fenêtre et il y avait des gens prêts pour les recevoir. M. Dupuy avait tous les livres et s’en faisait porter d’Italie. Il a beaucoup perdu de ses livres pendant la Ligue. M. Dupuy ne m’a jamais montré sa bibliothèque, il disait que tout était confus. »


  1. « mon compatriote ».

L’un des cercles érudits du premier xviie s., l’académie putéane s’est réunie tous les jours en fin d’après-midi jusqu’en 1645, rue de Poitevins dans l’hôtel du président de Thou ; et ensuite, jusqu’en 1656, rue de la Harpe. Le groupe était en relation avec Richelieu par l’intermédiaire de Jérémie Ferrier, ancien pasteur nîmois converti au catholicisme ; avec Mazarin, par celui de Naudé ; avec le coadjuteur, par celui de Gilles Ménage et de Jean-François Sarasin (le futur cardinal de Retz ne dédaignant d’ailleurs pas d’y venir en personne). Cette assemblée, raconta plus tard Fortin de La Hoguette, formait « un certain concert d’amis où toutes choses se passaient avec tant de douceur et de discrétion que je n’ai jamais eu de trouble en l’esprit qui ne se soit dissipé en cette compagnie ».

Ce fut le principal foyer de ce qu’on a depuis appelé le « libertinage érudit », qu’on ne doit pas confondre avec le libertinage (des mœurs) tel qu’on l’entend aujourd’hui (v. note [9], lettre 60) : son intention était de soumettre à la raison les traditions et les dogmes que le commun des hommes adopte sans discuter. Le noyau de l’académie putéane était composé de quatre personnages, la tétrade : Jean Diodati (théologien calviniste d’origine genevoise qui jouait surtout le rôle d’animateur), François i de La Mothe Le Vayer, Pierre Gassendi et Gabriel Naudé. Comme l’avocat général Omer ii Talon, Guy Patin fut parmi les membres informels de l’académie putéane et ses lettres sont empreintes des idées critiques qu’on y brassait, fort inspirées de la philosophie d’Épicure.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 11 juin 1649, note 5.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0181&cln=5

(Consulté le 28/03/2024)

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