À André Falconet, le 21 décembre 1671, note 5.
Note [5]

L’arrivée d’Élisabeth-Charlotte, Madame Palatine, animait la cour, tout en attisant la nostalgie inquiète de la Grande Mademoiselle (Mlle de Montpensier, Mémoires, seconde partie, chapitre xix, pages 310‑311) :

« Le roi fut à Versailles le lendemain {a} et le jour d’après, il alla à Villers-Cotterêts voir Monsieur et Madame qui y étaient arrivés. Il en revint si charmé, que c’était la femme qui avait le plus d’esprit, d’agrément, qui dansait bien, enfin que feu Madame {b} n’était rien auprès ; tout ce qui était avec lui était de même. Elle vint {c} deux jours après ; elle arriva avec un habit de brocard d’argent, parée plus que lorsqu’elle vit Monsieur, car il dit qu’il ne l’avait pas trouvée telle la première fois. Il faisait froid, elle n’avait pas mis de masque ; elle avait mangé des grenades qui lui avaient fait devenir les lèvres violettes. Quand l’on vient d’Allemagne, on n’a pas l’air français. Elle nous parut fort bien, et Monsieur ne la trouva pas telle et fut un peu étonné ; mais quand elle eut pris l’air de France, ce fut tout autre chose. Elle arriva à Metz habillée de taffetas bleu pâle, quoique ce fût à la Toussaint. Chaque pays a sa mode. Comme l’on a force fourrures en Allemagne, on croyait que du taffetas aurait l’air plus français. On s’en pouvait prendre à ses femmes car, pour elle, elle ne s’ajuste pas ; elle n’en amena pas une. Elle avait seulement une dame, qui avait été sa gouvernante, qui s’en retourna peu de jours après. Il ne lui resta de son pays que deux filles et un page ; l’une de ses filles, qui était fort jolie, s’en alla un an après. On dit que c’était pour se marier en son pays. D’autres disaient que Monsieur en était amoureux et que Madame en était jalouse ; mais peu de gens le croyaient.

Le lendemain {d} on fut voir Madame, qui ne parut pas si bien au jour qu’aux flambeaux. Le soir il y eut un ballet {e} que l’on avait fait de plusieurs entrées, qui était assurément plus beau que quoi qu’elle eût pu jamais voir en Allemagne. »


  1. 26 novembre 1671.

  2. Henriette-Anne d’Angleterre.

  3. À Saint-Germain.

  4. 2 décembre.

  5. Le Ballet des ballets, de Molière et Luly.

Imprimer cette note
Citer cette note
x
Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 21 décembre 1671, note 5.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=1013&cln=5

(Consulté le 28/03/2024)

Licence Creative Commons