Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 9 manuscrit, note 51.
Note [51]

Emblème d’André Alciat (v. supra note [38]) intitulé Iusta vindicta [Juste vengeance], pages 185 de l’édition latine (Lyon, 1551) et 206 de l’édition française (Lyon, 1549) :

« En son creux roc, Polyphème assis chante
Entre son parc, cette chanson méchante :
“ Brebis, mangez l’herbe, et je mangerai
Les Grecs. Utis dernier dévorerai. ”
Oyant ceci, Ulysse l’œil lui crève.
En fin, l’auteur du mal a peine grève.

Commentaire :

« Polyphème, géant cyclope ayant un grand œil au front, {a} grand pasteur de l’île de Sicile au long de la mer, prit Ulysse et tous ses compagnons pour les dévorer, promettant manger Ulysse {b} le dernier, pource qu’il lui avait baillé du vin. Ce que voyant, Ulysse (qui s’était surnommé Utis, {c} c’est-à-dire, en grec, Nul) le fit tant boire de vin qu’il s’endormit. Lors Ulysse, d’un tison ardent, lui creva son œil. Par quoi, de la douleur, s’écria un tant horrible cri que tous les autres grands cyclopes du mont ardent Bolcas Gibelin {d} l’ouïrent, et vinrent lui demander qui l’avait ainsi aveuglé. Lors il répondit Utis, qu’est à dire “ nul ”. Par quoi, eux pensant qu’il fût devenu fol, s’en allèrent riant et se moquant, et le laissèrent. Par laquelle fable, Homère donne à entendre que les mauvais mangeurs de peuple, étant privés de la lumière de ce monde, souffriront la peine de leurs malfaits, et de nul ne seront secourus, mais de tous moqués et confus. » {e}


  1. La mésaventure du cyclope (v. note [10], lettre latine 10) surnommé Polyphème, c’est-à-dire « fameux », « dont on parle beaucoup », est un épisode de L’Odyssée d’Homère (chant ix, vers 315‑419).

  2. Odysseus (Ulysse ou Énée, v. note [14], lettre latine d’Adolf Vorst, datée du 4 septembre 1661) est surnommé Itachus, « l’homme d’Itaque », par Virgile dans L’Énéide (chant iii, vers 629), qui raconte la même aventure.

  3. Ουτις : personne.

  4. L’Etna, v. note [1], lettre 958.

  5. Le Borboniana appliquait cette fable aux relations entre les rois Philippe ii d’Espagne (mort en 1598), sous les traits de Polyphème, et Jacques vi d’Écosse (intronisé en 1567), sous ceux d’Ulysse. Philippe ne dévora pas Jacques, qui devint le roi Jacques ier d’Angleterre en 1603.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 9 manuscrit, note 51.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=8210&cln=51

(Consulté le 25/04/2024)

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