Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 10 manuscrit, note 59.
Note [59]

« Au sujet des bourreaux, voyez les Loci communes de Petrus Martyr, page 923 » :

Loci communes D. Petri Martyris Vermilii Florentini, Sacrarum Literarum in Schola Tigurina Professoris : Ex variis ipsius authoris scriptis, in unum librum collecti, et in quatuor Classes distributi. Quam multa ad priorem editionem accesserint, ex admonitione quam prima pagina exhibebit, facile Lector deprehendet.

[Lieux communs {a} de M. Pierre Martyr Vermigli, natif de Florence, {b} professeur de Littérature sacrée à la Faculté de Zurich : tirés des divers écrits de l’auteur, réunis en un livre unique et répartis en quatre classes. L’Avertissement {c} qui figure à la première page montrera facilement au lecteur la quantité de choses qui ont été ajoutées à la première édition]. {d}


  1. Citations.

  2. Mort en 1562, v. note [3], lettre 659.

  3. Intitulé Pio Lectori [Au pieux lecteur] et signé Robertus Massonius (éditeur de l’ouvrage).

  4. Heidelberg, Johannes Lancellottus, 1603, in‑fo de 1 147 pages, première édition en 1576.

Les pages 923‑924 des correspondent au lieu intitulé De Carnificibus et quare vulgo mala audiant [Les Bourreaux, et pourquoi ils sont généralement mal considérés] (dans le chapitre xiv de la 4e classe). Trois extraits donnent une idée de cette dissertation rédigée par un chanoine régulier de Saint-Augustin converti à la Réforme :

At inquies, cur lictores atque carnifices, vulgo tam male audiunt ? Primum, quia vulgus male sibi ab eis metuit, nec quisquam vellet suorum scelerum pœnas dare : hinc sit ut aspectus carnificis horrorem incuriat. Sic vero populum esse affectum ex Romanæ Reipublicæ more ostenditur, ubi cum populo blandirentur ambitiosi plus æquo, ex foro, cœlo ac domicilio Romano carnificem ablegarunt, ut vel ipsa oratio Ciceronis pro Rabirio testatur. […]

Acessit Papistica opinio de irregularitate, quæ ut Canonistæ volunt, ex quovis homicidio contrahitur. Arbitrantur ii homines, non posse quenquam tam iniuste aliquem occidere, ut ad Sacrum ministrium queat promoveri : cum tamen inquisitores, ut dicunt, hæreticæ pravitatis, quotidie innumeros, et quidem innocentes, interfici curent. Papæ quoque Legati, administrando civitates et provincias, et bella gerendo, licet sint cardinales et Episcopi, subinde curant effundi sanguinem. Sed interea magna Hypocrisi cavent, ut per laicum (sicut loquuntur) Iudicem, sententia feratur, atque ita se a sua eximunt irregularitate. […]

Tertia demum causa cur lictores atque carnifices male audiant, ea est quod permulti eorum impune ac turpiter vivunt et olim facinorosi fuerint. Munus attamen illos non contaminat, sed illi potius vitio suo præclarum munus poliunt.

[Mais, me demanderas-tu, pourquoi les exécuteurs et les bourreaux sont-il généralement si mal considérés ? Premièrement, parce que les gens craignent qu’ils ne leur fassent du mal, et nul ne voudrait qu’ils les punissent de ses fautes : de là vient que la vue du bourreau inspire de l’horreur. La coutume de la République romaine illustre bien ce préjugé populaire : ceux qui avaient les plus grandes ambitions y flattaient la plèbe en reléguant le bourreau loin du forum, du ciel et de l’enceinte de Rome, comme en atteste le plaidoyer de Cicéron pour Rabirius. {a} (…)

S’est ajoutée l’opinion papiste sur l’irrégularité {b} qui, comme veulent les canonistes, résulte de quelque forme d’homicide que ce soit. Ces hommes jugent que nul ne peut accéder aux ordres sacrés s’il a commis l’énormité de tuer quelqu’un. Cependant, les inquisiteurs de la dépravation hérétique, comme ils l’appellent, prennent soin de massacrer tous les jours d’innombrables gens, qui sont néanmoins innocents. Les légats du pape, pour administrer les cités et les provinces, et pour faire la guerre, quoiqu’il soient cardinaux et évêques, s’évertuent donc à faire couler le sang. Ce faisant, néanmoins, par grande hypocrisie, ils prennent bien garde de faire prononcer leurs sentences par (ce qu’ils appellent) un juge laïc, et se mettent ainsi à l’abri de toute irrégularité. (…)

La troisième raison pour laquelle les exécuteurs et les bourreaux ont mauvaise réputation, c’est que nombre d’entre eux vivent impunément dans la turpitude, et auraient jadis eux-mêmes été des criminels. Même si, en soi, leur charge ne les souille pas, je dirais plutôt qu’ils enjolivent de leur propre vice cet éminent office].


  1. Au chapitre iii de ce discours, Cicéron (le plus fameux orateur de la République romaine au ier s. av. J.‑C.) dit :

    Quid enim optari potest quod ego mallem quam me in consulatu meo carnificem de foro, crucem de campo sustulisse ?

    [Comment se peut-il en effet désirer que, pendant mon consulat, j’aie préféré maintenir le bourreau dans le forum, et la croix dans le Champ de Mars ?]

  2. Irrégularité (Furetière) : « en termes de casuistes, est un défaut personnel qui rend un ecclésiastique incapable de posséder des grâces, des biens d’Église, et de faire des fonctions sacrées, pour avoir encouru quelque censure ou excommunication : un clerc qui contracte mariage tombe dans l’irrégularité ; un bénéficier qui donne sa voix lorsqu’il s’agit d’un jugement de mort, tombe dans l’irrégularité, et son bénéfice vaque. »

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 10 manuscrit, note 59.

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(Consulté le 28/03/2024)

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