À André Falconet, le 30 août 1655, note 6.
Note [6]

« dans les Doutes évangéliques ».

Dans la deuxième partie (page 366) de ses « Doutes évangéliques » (Genève, 1639, v. note [6], lettre 179), le théologien protestant genevois Friedrich i Spanheim (v. note [11], lettre 16) a cité le distique contre Nostradamus, à la fin (§ xxvii) du Dubium xxxiii, intitulé An probanda sit Astrologia judiciairia, eo quod nativiras Servatoris et ortu stella designata, fuerit divinitus, et cognita hoc indicio a Magis ? [Faut-il approuver l’astrologie judiciaire, sous prétexte que la nativité du Sauveur a été miraculeusement marquée par l’apparition d’une étoile, et que les Mages ont eu connaissance de ce signe ?] :

Viros multos eximios, qui in hoc studium quandoque, sed sobrie admodum, incubuere, et inter testamenta artis imbecillitatem ingenue fassi sunt, nec eam ad omnia enventuum promiscue extenderunt. Reliquos quod attinet, quod Nostradami Aretalogi insignis gryphis et ænigmatibus, quibus Lectorum vel acumini, vel patientiæ, vel etiam stupori illusit, a Venerando Beza nostro jam olim præscriptum fuit Epigramma, communi omnium Genethliacorum tripodi præscribendum censeo,

Nostra damus, damus verba damus, nam fallere nostrum est :
Et cum verba damus, nil nisi
Nostra damus.

Ut hac ratione ii, qui quanvis de fraude moniti, vates hos mendaces consulere sustinuerint, quod olim ab Astrologis Alexandriæ exigebatur tributum βλακεννομιον, et ipsi stoliditatis suæ vectigal justissima vindicta Astrologis pendant et exsolvant.

[Maints éminents personnages se sont de temps en temps penchés sur ce sujet, mais avec extrême prudence ; et leurs témoignages ont ingénument conclu à l’impuissance de l’astrologie, sans en étendre indistinctement les prédiction à l’ensemble des événements. Quant au reste, je pense qu’il faut appliquer au trépied {a} commun à tous les astrologues ce que notre vénérable de Bèze a, voilà longtemps déjà, prescrit sur les griphes {a} et énigmes de Nostradamus, insigne bouffon qui s’est autant joué de la subtilité que de la patience, et aussi de la stupidité, des lecteurs :

Nostra damus, damus verba damus, nam fallere nostrum est :
Et cum verba damus, nil nisi
Nostra damus. {c}

Parce qu’on exigeait jadis des astrologues d’Alexandrie l’impôt des blasphémateurs, {d} que ceux qui, bien que prévenus de cette duperie, ont continué de consulter ces devins menteurs, subissent et acquittent donc la taxe infligée aux astrologue, pour très légitime punition de leur stupidité]. {e}


  1. Dérivé du grec γριφος (griphos), et non γρυφος (gryphos), comme l’écrivait Spanheim, griphe est un « terme d’Antiquité : énigme, questions compliquées que l’on se proposait » (Littré DLF).

  2. Allusion au mythique trépied d’où la pythie de Delphes prononçait ses oracles (V. note [8], lettre de Christiaen Utenbogard, datée du 21 août 1656).

  3. V. supra note [5].

  4. Le mot βλακεννομιον ne correspondant à aucune forme grecque identifiable, je l’ai tenu pour une faute d’impression, et remplacé par βλασφημον.

  5. Traduit avec indulgence pour le médiocre latin de Spanheim, ou de son imprimeur.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 30 août 1655, note 6.

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(Consulté le 28/03/2024)

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