À Charles Spon, le 29 juin 1663, note 6.
Note [6]

« le lit nuptial est fatidique pour l’épouse et pour le mari ».

Guy Patin a emprunté sa citation à Juste Lipse, dans son propos morose sur le mariage, à la fin de la lettre xxxi, centurie i (page 37) ; {a} sans la dater, il l’a écrite à Theodorus Leewius, {b} à La Haye :

Et Diogenes quidem ab omni ætate coniugium removebat, satis scite. Nam iuveni, inquiebat, nondum ducenda est uxor : seni nunquam. Græce hoc sonat melius τω νεω μηδε ποτε, τω γεροντι μηδεπω ποτε. At ego certe non vane id restinxerim, ad statum mediumque hoc ævum, quod velut vinum iam deferbuit, et quale, mi Le<e>wi, est unum. Hæc in parte unâ dici possunt, nec pauciora in alterâ quæ quoniam scio subiici et a te tibi, et ab aliis cottidie, laborem non sumam in iis rescendendis. Ei minus quod frustra scio suaderi coniugia aut dissuaderi : quæ a cælesti nutu et a fato haud vane esse dicuntur. Bene Euripides,

*Ευνη γαρ ανδρι και γυναικι μορσιμη.
*Fatalis est viro atque fœminæ thorus. {c}

Idque didicimus nos ipsi. Bina Socratis monita tantum addam. Primum iuvenes cælibes similes esse piscibus qui alludunt circum nassam : et gestiunt inire, contra qui iam inclusi, exire : simile in matrimonio esse, quod ambiunt liberi, damnant capti. Alterum, Sciscitanti cuidam Uxorem an non duceret ? Utrumvis, inquit, feceris, pœnitebit.

[Aussi Diogène écartait-il assez sagement le mariage à tout âge : une femme, disait-il, ne doit pas se marier à un homme encore jeune, et jamais à un vieillard ; ce qui sonne mieux en grec, τω νεω μηδε ποτε, τω γεροντι μηδεπω ποτε. Pour ma part, mon cher Leewius, je ne trouverais assurément pas sot de restreindre cela à cet âge, moyen et mûr, qui est celui où, comme le vin, un homme a cessé de fermenter. Pour une partie tout comme pour l’autre, ce sont là des questions qui se peuvent aborder, car je sais que toi-même et les autres se les posent à ton sujet, et je croirais qu’il ne t’est pas pénible d’y réfléchir ; mais sans bien savoir te persuader ou te dissuader de te marier. Il n’y a pas, dit-on, d’ineptie dans les décisions du ciel et du destin, {d} mais il y a ce bon vers d’Euripide :

*Ευνη γαρ ανδρι και γυναικι μορσιμη.
*Le lit nuptial est fatidique pour l’épouse et pour le mari.

C’est ce que nous avons appris par nous-mêmes, et à quoi je me contenterai d’ajouter deux avis de Socrate. Primo, les jeunes célibataires sont semblables aux poissons qui jouent autour d’une nasse : ils se démènent pour y entrer, mais ceux qui y sont prisonniers font au contraire tout pour en sortir ; il en va de même pour le mariage, que convoitent ceux qui sont libres de ses liens, mais que condament ceux qu’il a capturés. Secundo, à qui lui demandait s’il ne devait pas prendre femme, il répondait : quoi que tu fasses, tu le regretteras].


  1. Epistolarum selectarum Chilias [Millier de lettres choisies] (Avignon, 1609, v. note [12], lettre 271).

  2. V. note [7] des Triades du Borboniana manuscrit.

  3. Traduction fournie dans la marge de la lettre de Lipse.

  4. Allusion probable à Sénèque le Jeune : v. infra note [7].

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 29 juin 1663, note 6.

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(Consulté le 18/04/2024)

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