Livre I
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Itues, ophrues, ambones, cheilè. Sourcils, lèvres. sont formées en vue des articulations, il existe des parties appelées par les Grecs itues, ophrues, ambones, cheilè, que les Latins nomment « sourcils » et « lèvres ». Ce sont des processus en relief, situés sur le pourtour des cavités, comme des lèvres, augmentant ainsi leur profondeur. Bien qu’on puisse les observer sur presque toutes les articulations et les jointures osseuses, leur nature est le plus clairement montrée dans les cavités très profondes. Ainsi, dans la cavité de l’os coxal, avec laquelle s’articule le fémur, les sourcilsaa r, r dans la fig. D sont très proéminents, ceci pour augmenter la profondeur de la cavité et prévenir la luxation du fémur. Empêcher que les os se luxent facilement est la fonction primordiale des sourcils.Bathmides. Le nom bathmis s’emploie pour des cavités, qui à la façon d’un soubassement et d’un étai, empêchent l’os de bouger au-delà de ce qui convient à un être vivant. Par exemple, la face antérieurebb N dans la fig. 1 du chap. 23
c O dans la fig. 2 du chap. 23
et la face postérieurec de l’humérus présentent des cavités ainsi façonnées pour recevoir chacune un des deux processusee C, E, D dans la fig. 1 du chap. 24 de l’ulna : la cavité antérieure reçoit le premier processus[26] de l’ulna quand le coude est fléchi au maximum, mais le processus postérieur de l’ulna entre dans la cavité postérieure de l’humérus dans les mouvements d’extension du coude. Et comme il n’existe pas de passage de la cavité postérieure à l’antérieure, les deux cavités empêchent l’ulna de bouger plus qu’il ne faut. S’il y avait un passage, et si les processus ne rencontraient pas d’obstacles, nous pourrions aussi donner un mouvement d’extension à notre coude en angle aigu, comme nous le fléchissons en angle aigu. Les premiers professeurs d’Anatomie ont donc eu raison d’appeler bathmides ces cavités, bien que pour Hippocrate, ce nom désigne non seulement les cavités de ce genre, mais toutes les autres, dans lesquelles se logent les parties saillantes des os.Livre II des Fractures. Par exemple, Hippocrate a appelé bathmis la cavité façonnée en forme de C majuscule de l’ulna, qui entoure l’extrémité inférieure de l’humérus, comme d’autres ont donné ce nom à l’ensemble de l’articulation de l’avant-bras et du poignet. Les cavités de l’humérus que j’ai décrites ci-dessus ont une caractéristique particulière : à la différence de presque toutes les cavités osseuses recevant les processus d’un autre os au cours des mouvements articulaires, celles-ci ne sont quasiment pas recouvertes de cartilage.Cavités qui n’ont pas été façonnées en vue de l’articulation des os. C’est aussi le cas de la plupart des cavités qui ne sont pas façonnées en vue de l’articulation des os, mais seulement dans le but de fournir une surface d’insertion plus solide et plus résistante aux ligaments et aux muscles, et pour faciliter l’origine de certains d’entre eux. On observe une cavité de ce genreff R dans la fig. 1 du chap. 30 sur le bord interne du grand processus externe du fémur, ainsi que sur le talus et sur le calcaneum, entre les deux articulationsgg T, T dans la fig. 4 du chap. 33 et V, V dans les fig. 7 et 8 par lesquelles ces os sont joints l’un à l’autre. Mais tout cela (comme les sinus qui maintiennent les tendons et les empêchent de dévierh,h γ, δ, ε, ζ dans la fig. 2 du chap. 24 par exemple sur la face externe du radius près du poignet) sera repris dans la description de chaque os en particulier. Et si j’ai omis ici quelque nom dont j’aurai besoin dans la description des os, je le mentionnerai dans les chapitres suivants. Car je crains que cette abondance de noms, tout utile qu’elle soit, avant la description de chaque os en particulier, ne dissuade de l’étude de l’Anatomie quelqu’un désireux d’apprendre rapidement, et ne le pousse à aller chercher à grands frais quelque autre résumé. Toutefois, aussi bien pour comprendre les livres de Galien que pour la description des os qui suit, cela valait la peine de faire cet examen préalable des noms.

Chapitre IV. L’agencement et l’articulation des os entre eux

Le squelette du corps humain ne pourrait être agencé à partir d’un os unique et continu, comme une statue de pierre. S’il en était ainsi, cette « fabrique » de l’homme serait évidemment moins exposée aux lésions, les os auraient une assise plus solide et ne pourraient être ni luxés, ni déplacés, ni déboîtés ; cependant, puisque l’être humain ne peut pas exister sans mouvement (le mouvement étant considéré comme la qualité propre à l’animal), et puisque aucun mouvement ne peut s’accomplir sans les segments osseux et leurs jointures, c’est donc un grand avantage pour l’homme d’être constitué de plusieurs os[27].L’homme est constitué de plusieurs os pour faciliter le mouvement, Les os sont assemblés pour faciliter non seulement le mouvement, mais aussi le passage de certains éléments, pour protéger le corps en augmentant sa résistance aux coups, ou à cause des différences de nature des parties du corps. C’est en vue du mouvement que les phalanges sont articulées entre elles, l’ulna et le radius avec l’humérus, l’humérus avec la scapula, le fémur avec le tibia, sans compter toutes les autres articulations osseuses de ce genre.pour faciliter l'évacuation, Je dirai que les sutures du crâne sont formées pour livrer passage à la « transpiration »[28] ou à l’évacuation, quand j’enseignerai qu’elles peuvent être traversées par les déchets noirs du cerveau et qu’elles offrent un passage aux fibres de la dure membrane[29] du cerveau, fibres avec lesquelles la membrane qui revêt le crâne se mélange[30].pour supporter des maux, De même (pour ne pas multiplier les exemples), mon exposé sur les sutures de la tête vous apprendra que le crâne n’est pas formé d’un seul os, mais de plusieurs, ceci pour éviter qu'une lésion produite sur une partie circonscrite ne s'étende au-delà du périmètre de cette partie, comme une fissure sur un pot de terre, et pour la limiter en-deçà de la suture.[pour unir ] des parties de nature différente. En outre, les jointures permettent de réunir des parties du corps de nature différente, par exemple les os du vertex qui sont mous et ceux des tempes qui sont durs, comme vous le comprendrez dans mon exposé sur les jointures de ces os. Donc, tous les os sont contigus, et il n’y a aucun os qui existe par lui-même complètement séparé des autres (sauf peut-être celui qu’on appelle hyoïde, d’après sa forme en hupsilon, et celui, s’il existe, à la base du cœur), mais tout os est ou bien une partie d’un os continu, ou bien contigu à un autre, ou bien attaché à un autre. Ainsi la Nature,

×Il s’agit du processus antérieur.
×L’idée que la multiplicité des os garantit la multiplicité des mouvements sera reprise plusieurs fois, par exemple chapitre 15 du livre I, à propos du rachis.
×Sur l’emploi du terme transpiratio dans la théorie humorale et sur le rôle des sutures des os de la tête, voir Fabrica I, chap. 10.
×Terme récurrent chez Vésale, qui n’utilise jamais l’expression héritée de l’arabe, dura mater (dure-mère).
×Voir Fabrica livre VII pour une description précise des lepto-méninges et de la pie-mère crânienne (pia mater encephali).