Livre I
53
affirme qu’il n’y a aucun passage de l’oreille au cerveau. Histoire des animaux, livre I, chap. 11 « Mais, dit-il, un conduit s’étend jusqu’au palais et dans la bouche, et laisse passer une veine qui descend du cerveau »[217]. Il est vrai que le conduit auditif s’étend à l’intérieur de la cavité crânienne et qu’il reçoit aussi unecc n dans la figure du chapitre 14 du livre III. veine[218], mais il ne l’emmène pas hors du cerveau, il la prend de la jugulaire interne entrant dans le cerveau et la mène vers l’organe de l’audition ; et, comme nous l’avons signalé auparavant, il offre aussi un passage à un petit rameau de la cinquième paire de nerfs crâniens[219]. En outre, si vous introduisez une soie de porc dans le conduit auditif, du côté externe, et que vous la poussiez un peu obliquement vers l’intérieur dans le foramen marqué V, vous constaterez que vous l’y faites entrer avec beaucoup plus de facilité que par son orifice dans la cavité crânienne[220].
b 2Ce foramen [foramen stylo-mastoïdien] commence au milieu de la cavité de l’organe de l’audition et se dirige à partir de là vers l’arrière ; parce qu’il est tortueux et ressemble à un labyrinthe[221], et qu’il n’atteint pas la face interne du crâne, on ne peut pas y introduire une soie de porc pour le traverser. Il est préparé pour unac dans la figure 2 du chapitre 2 du livre IV. rameau[222] de la cinquième paire de nerfs[223]; et comme la Nature a voulu que ce rameau acquière progressivement plus de force, elle l’a très habilement mené à travers le foramen tortueux de l’os le plus dur et le plus sec [partie pétreuse de l’os temporal].Foramen borgne. Tous les professeurs d’anatomie donnent à ce foramen le nom de foramen aveugle ou borgne [en grec tuphlos], non pas parce que ce conduit n’est pas un véritable foramen ouvert aux deux extrémités, mais parce qu’il est difficile d’y introduire une soie de porc ou un fil de plomb jusqu’à la cavité de l’audition. Chez les loups et les chiens, ce foramen qui est situé au-dessus de la racine du processus mastoïde, est beaucoup plus spacieux et plus vaste que chez les hommes. Il se peut que quelques auteurs appellent foramen cæcum celui qui s’étend du conduit auditif vers l’avant, et que nous avons marqué d’un V. Mais en tout cas, ils n’ont reconnu ni le foramen marqué V ni celui marqué d’un b [foramen stylo-mastoïdien]. D’ailleurs, jusqu’à ce jour, je n’ai encore trouvé personne qui ait décrit correctement un seul foramen, alors que leur observation procure beaucoup de plaisir et qu’ils témoignent de l’immense talent de la Nature.
c 2, 3
Ce foramen est commun à l’os occipital et à l’os temporal, il est formé pour la sixième paireca n dans la figure 9 du livre VII. de nerfs crâniens, pour le plus grand rameau de la veine jugulaire interne et pour le plus petitbb C ensuite I dans la figure du chapitre 14 du livre III. de l’artère carotide[224]. Parce que les corps qui le traversent sont particulièrement grands, ce foramen est spacieux et est adapté à leur forme. En effet, il n’est pas parfaitement rond, mais il est plus ou moins tordu pour former en quelque sorte deux cercles jumeaux ; l’un (celui du côté interne) est préparé pour un nerf qui se dégage plus ou moins à l’avant du crâne, l’autre (du côté externe) sert à une veine et à une artère pénétrant le crâne vers l’arrière.

[Illustration]

Nous avons représenté ici séparément le foramen qui vient d’être décrit, en inscrivant un θ sur sa partie interne et un τ sur sa partie externe[225]
d 2, 3Ce foramen [canal hypoglosse autrefois canal condilien antérieur] est creusé dans l’os occipital pour un nerfaa O dans la figure 9 du livre VII et ν dans la figure 2 du chapitre 2 du livre IV. de la septième paire des nerfs crâniens ; il est rond, mais son trajet est allongé et oblique. En effet, ce foramen descend obliquement de la région postérieure de la face interne du crâne, de telle sorte qu’un nerf de la septième paire puisse le traverser et s’unir plus rapidement à la sixième paire et qu’une fois unis, ils puissent continuer leur course sans danger[226].
e 2, 3Foramen impair [foramen magnum], de loin le plus grand de tous, creusé dans l’os occipital pour la moelle spinaleaa H dans la figure 9 du livre VII. originaire du cerveau.
f 2Ce foramen [canal condylaire ou canal condilien postérieur] n’est pas particulièrement grand ; il débute sur la face externe du crâne, sur la partie arrièreaa l dans la figure 5 du chapitre 6. de l’os occipital, là où ce dernier est articulé avec la première vertèbre cervicale, il s’étire longuement à travers l’os jusque dans la face interne du crâne, et se termine dans la partie supérieure du foramen désigné par d, taillé pour la septième paire de nerfs crâniens. Il est ciselé pour la veinebb D et K dans la figure du chapitre 14 du livre III. et pour l’artèreb ascendantes par les processus transverses des vertèbres cervicales. Par ailleurs, vous trouverez parfois certains crânes qui n’ont pas ce foramen sur un côté, parfois même qui n'en ont aucun ; mais alors sa fonction est assurée par le foramen désigné par d [canal hypoglosse] et dans ce cas, ce dernier n’est pas parfaitement rond, mais il est oblong, approprié au passage du nerf avec la veine et l’artère.
g 2, 3Ce foramen [foramen mastoïdien] est creusé dans l’os temporal, en arrière du processus mastoïde, sur le côté de la suture lambdoïdea ;a C dans les figures 3, 4, 5 du chapitre 6. il pénètre le crâne obliquement et fournit un passage à un rameaubb E dans la figure du chapitre 14 du livre III. de la veine jugulaire externe atteignant le crâne à cet endroit. J’ai cependant remarqué que ce foramen fait quelquefois défaut, soit sur un côté, soit sur les deux.Sinus du crâne taillés pour les vaisseaux de la dure-membrane [sinus veineux duraux]. Dans la troisième figurea,a Voyez ici, outre M, N, O, P de la figure du chapitre 14 du livre III : P, Q, R, S dans la figure 7 du livre VII, S, T dans la figure 9, C dans la figure 1 et B dans la figure 2. il convient d’observer très attentivement le sinus dans la cavité crânienne contenant le cerveau ; trois foramina, désignés par c, f et g, préparés pour le passage de veines et d’artères y pénètrent. En effet, à partir du foramen taillé pour la sixième paire de nerfs crâniens, et désigné par c, et sur le côté médial du foramen noté f [canal condylaire] sur les côtés droit et gauche du crâne, commence un sinus que nous avons indiqué sur le côté gauche par trois h, sur le côté droit par trois i[227].
h, i, kCes sinus [sinus veineux de la dure-mère] montent obliquement à la manière de quarts de cercle (h, h, h) vers le haut et l’arrière, jusqu’à ce que le sinus droit rencontre le gauche (i, i, i), là où nous avons placé un k [confluent postérieur, autrefois pressoir d’Hérophile]. On voit l’endroit où ils s’unissent, au milieu de l’os occipital, entre la partie la plus élevée de la suture lambdoïdebb D dans la figure 3 du chapitre 6. et l’arrière du foramen [foramen magnum] donnant passage à la moelle spinale et marqué d’un e ; un k est inscrit là où l’os occipital est le plus épais et le plus dense [protubérance occipitale interne], comme nous l’avons signalé dans la description de cet os. De l’endroit où les deux sinus s’unissent, un autre sinus [sinus sagittal supérieur] s’étend vers le haut, au-dessous de la partie la plus élevée de la suture lambdoïde, suivant la suture sagittale sur toute sa longueur
×Vésale semble décrire ici la structure à laquelle Bartholomée Eustache donnera son nom (trompe d’Eustache ou tube auditif).
×En réalité aucune veine ne traverse le conduit auditif interne.
×Il est impossible d’identifier ce petit rameau du nerf facial : nerf stapédien ou corde du tympan, visibles à condition d’ouvrir le cavum tympanique.
×En faisant cette manœuvre, Vésale fait pénétrer une soie de porc dans le conduit auditif externe, qui passe ensuite dans le cavum tympanique puis dans le tube auditif ; tandis qu'en réalisant la même manœuvre dans le conduit auditif interne, on bute au fond de celui-ci, les nerfs (VII et VIII) traversant ce fond par de minuscules foramina.
×Il est difficile de dire si Vésale décrit ici ce que l’on connait sous le terme de labyrintha, à savoir les structures osseuses de l’oreille interne ou le trajet complexe du nerf facial intra-pétreux avant d’émerger de la base du crâne par le foramen stylo-mastoïdien.
×Structure non identifiée.
×Il faut rappeler ici l’intérêt de Vésale pour la distribution de tels nerfs, qui seront décrits dans le livre VII de la Fabrica, mais qu’il cite également dans l’Epitome, chap. 5, et dans la planche [Ma] (éd. J. Vons et S. Velut, Résumé, Paris, 2008, p. 240-242).
×Foramen jugulaire, autrefois appelé foramen déchiré postérieur.
×Voir schéma. L’auteur des schémas est très probablement Vésale lui-même.
×Cf. J. Vons et S. Velut, Résumé, Paris, 2008, p. 135 n. 205 : la description est imprécise, mais laisse entendre que la sixième paire correspond au nerf vague (X) et au nerf accessoire (XI) qui puise une de ses racines du X, la septième au XII.
×Le dessin est inversé par rapport au texte. Les légendes sont déportées dans la manchette externe, à cause de la longueur des notes marginales internes.