Livre I
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Quatrième figure du vingt-et-unième chapitre.

[Illustration]

Sur cette figure nous avons dessiné la face externe ou postérieure de la scapula d’un chien, de façon qu’on apprécie plus facilement la différence que nous établirons entre la scapula humaine et celle d’un chien ou d’un mouton au sommet de l’humérus ou processus supérieur de la scapula. Donc, A et B désigneront la partie bombée ou le dos de la scapula : A sa partie inférieure, B la partie supérieure qui est plus près du cou ou de la tête de l’animal. C et D indiqueront l’épine de la scapula, qui n’excède pas le col de la scapula. E indiquera le col de la scapula.

Position et jointures des scapulæ. Reposant de chaque côté [de l’axe du corps]aa R dans les trois figures intégrales. à l’arrière et vers le haut du thorax, chacune des deux scapulæ est attachée à l’os occipital, aux vertèbres cervicales et thoraciques, aux côtes et à l’os hyoïde uniquement par des muscles[370]. La scapula est attachée à l’os occipital par le deuxièmebb γ, δ dans la 9eplanche des muscles. des muscles moteurs [trapèze] de la scapula, qui l’unit également aux épines d’un grand nombre de vertèbres, et par le troisièmecc G dans la 12eplanche des muscles. des muscles moteurs [muscle petit rhomboïde] de la scapula, qui la joint aussi aux vertèbres cervicales. Le quatrièmedd Γ dans la 10eplanche. des muscles moteurs [muscle grand dorsal] de la scapula l’attache fermement aux épines de plusieurs vertèbres thoraciques et cervicales. Le premieree Γ dans la 5eplanche. des muscles moteurs de la scapula [muscle grand dentelé ou serratus antérieur] et le deuxième [muscle dentelé antérieur]ff L dans la 7eplanche. des muscles moteurs du thorax[371] joignent la scapula aux côtes. Le septièmegg R, S dans la 5eplanche. des muscles spécifiques à l’os hyoïde attachent la scapula à cet os. Chez les hommes, les singes, les écureuils, et chez d’autres animaux, pourvu qu’ils aient des clavicules, la scapulahh De Q à λ dans les figures intégrales. est articulée avec la clavicule au moyen de très nombreux ligaments et elle lui est adjacente.Fonctions des scapulæ. Chez tous les animaux, l’os du brasii De S à R dans les figures intégrales. ou humérus s’articule avec la scapula. Si vous imaginiez un homme sans clavicules, vous ne pourriez absolument pas décrire l’articulation de l’épaule. Pour la réalisation de cette articulation, il est nécessaire que la tête humérale entre dans la cavité d’un autre os et qu’elle soit fermement fixée à un autre os comme à une base, pour qu’elle puisse bouger. C’est en vue de former une cavité de ce genre que le cou ou col de la scapulakk C, D dans les figures 1, 2. est saillant et qu’à son extrémité il présente une cavité [cavité glénoïde]ll A, B dans les figures 1, 2. si grande et si large, si utile pour les mouvements de l’épaule qui sont aussi variés que différents. Telle est donc la fonction première et principale des scapulæ. Elles ont encore une autre fonction, et dont il ne faut certes pas se plaindre, qui est d’être un rempart et une protection pour les parties du thorax qui ne sont pas recouvertes par les côtes. En effet, nous protégeons les parties antérieures du thorax, en voyant de loin ce qui risque de le heurter et de le blesser, et en anticipant nos actions : soit faire un saut, pour faire dévier l’attaque, soit placer une protection devant notre poitrine, soit prendre dans nos mains de quoi nous défendre. Et encore, la plupart du temps, nous tentons de nous opposer avec nos seules mains, dans l’idée qu’il vaut mieux qu’elles soient blessées, brisées, mutilées, coupées, avant de laisser l’objet blessant atteindre notre poitrine. Car le thorax est l’organe de la respiration, et de même qu’il entoure le poumon, il abrite le cœur, considéré comme la source de la chaleur et le siège de l’esprit irascible, et qui réclame pour cela des remparts très solides. Puisque le danger menace aussi bien la partie postérieure du thorax que la partie antérieure, mais que n’avons pas une possibilité égale de le prévoir dans la partie postérieure, puisqu’il n’y a pas d’yeux par derrière, la Nature devait nécessairement inventer ici aussi un artifice quelconque pour ne pas laisser la partie postérieure du thorax sans protection. Aussi, en guise de palissade et de fortifications admirables, elle a placé à cet endroit les vertèbres thoraciques, et elle a mis en défense les scapulæ comme deux boucliers ou écus et comme des murailles très solides ; elle n’ignorait pas qu’une autre fonction allait s’ensuivre pour l’homme, qui est de donner une surface d’insertion d’origine et de terminaison très commode pour un grand nombre de muscles moteurs du bras[372]. Et c’est bien l’œuvre de la justice suprême qu’un même os ait des fonctions aussi variées qu’indispensables, et que la forme des scapulæ soit telle que chacune des parties puisse être comptée comme propre à chacune des fonctions.La forme triangulaire des scapulæ. En effet la scapula présente des formes diverses, et aucune partie n’est semblable à une autre ; outre des processus, des sinus, des tubérosités, des appendices et d’autres parties de ce genre de formes variées, desquelles nous avons déduit les différences entre les os, la scapula présente plus ou moins l’image d’un triangle formé de trois côtés inégaux.La base [bord médial] de la scapula Le premier côté [bord médial]m,m De Z à Y via X dans les figures 1, 2, 3. que nous appellerons toujours la base de la scapula, est la partie qui suit la longueur du dos et longe les épines des vertèbres ; cette base consiste en une ligne oblique qui en haut et en bas s’incline vers le côté du corps comme pour former la partie convexe d’un cercle, alors qu’au centre elle apparaît souvent un peu échancrée et concave. Cependant, sur toute sa longueur,

×La description des scapulæ est succincte dans l’Epitome, comme elle l’était encore plus dans la traduction par Balamius du traité sur les os de Galien, De ossibus (éd. Balamius, Paris, 1535, p. 34-35). Elle est ici très développée car elle inclut une série d’indications sur les muscles qui en sont originaires et qui seront décrits dans le livre II de la Fabrica. Les noms, les emplacements et les fonctions des muscles indiqués ici sont regroupés dans le chapitre II de l’Epitome, cf. J. Vons et S. Velut, A. Vésale. Résumé de ses livres sur la Fabrique du corps humain, Paris, Les Belles Lettres, 2008, p. 36-40.
×Comme dans l’Epitome, Vésale numérote les muscles sans leur donner de nom, et renvoie ici aux planches du livre II de la Fabrica. Il compte 4 muscles moteurs de la scapula, qui seront décrits au chapitre 26 du livre II. Les autres muscles ici référencés sont le second muscle moteur du thorax (muscle dentelé antérieur) décrit au chapitre 35 du livre II et le 7emuscle spécifique à l’os hyoïde (muscle omohyoïde) décrit au chapitre 17 du livre II.
×Retour à la description anatomique après un développement fortement inspiré de Galien, Utilité des parties XIII, 10, non référencé dans la manchette.