Livre I
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Il faut utiliser le nom de métacarpe. La partie de la mainaa I, II, III, IIII dans les figures 1, 2 du chapitre 25 et Γ dans les figures intégrales. s'étendant du carpe à la base des doigts a été appelée par les Grecs metakarpion ; Celse et un grand nombre de traducteurs des Grecs lui ont donné le nom de palma, d’autres de pecten et parfois de pectus[443]. Mais puisque le mot «  paume » est le plus répandu, que beaucoup incluent également le carpe dans la paume, alors que pour d’autres, la paume n’est que le creux de la main, et puisque les noms pecten et pectus ou stêthos sont également utilisés pour la plante du pied, j’ai jusqu’à ce jour utilisé l’expression «  ce qui suit le brasselet »[444] pour désigner le métacarpe.Certains comptent quatre os dans le carpe, d’autres cinq. Le métacarpe est formé de quatre os pour Galien, de cinq pour Eudème[445] et Celse, et aussi pour Aristote (comme il faut le déduire du livre I des Histoires des animaux), dans la mesure où ces derniers auteurs mettent au nombre des métacarpiens la première phalange du pouceb,b A près du chiffre 5 dans les figures 1, 2 du chapitre 25. parce qu’elle s’articule avec le cinquième os du carpe, alors que Galien la compte parmi les phalanges des doigts. Plusieurs la comptent aussi comme un os métacarpien, parce qu’elle est située quasiment sur la même rangée que les os du métacarpe, qu’elle n’est pas visiblement distincte de la paume comme les premières phalanges des autres doigtsc,c D dans les figures 1, 2 du chapitre 25. mais qu'elle est plus ou moins cachée comme les os du métacarpe, de sorte qu’on attribue d’ordinaire deux phalanges seulement au pouce, même si cette phalange du pouce est plus courte que les os du métacarpe et si elle n’est pas jointe à eux de la même manière qu’ils le sont entre eux. Une autre raison pour laquelle ils ajoutent la première phalange du pouce au métacarpe est peut-être le fait que la deuxième phalange du pouce est articulée avec la première à peu près de la même manièredd C, D dans la figure 1 du chapitre 27. que les premières phalanges des doigts le sont avec les métacarpiens, c’est-à-dire en recevant une tête unique dans une cavité unique. Enfin, ils ont peut-être été amenés à cette idée, parce qu’ils ont pensé qu’aucun tendon ne s’insère à cet endroit pour donner un mouvement à la première phalange du pouce, de même qu’aucun os métacarpien ne fournit d’insertion à un tendon qui lui donnerait un mouvement individuel. Mais en fait, les autres professeurs d’anatomie ont ignoré bon nombre de muscles qui s’implantent seulement sur la première phalange du pouce (et vous apprendrez dans le livre II que Galien a oublié au moins trois ou quatre musclesee Chiffres 1, 2, 3 dans la 7eplanche des muscles ; et aussi λ dans la 6eplanche. de cette phalange). Galien compte donc la première phalange du pouce comme la première phalange des doigt, auxquels il attribue trois phalanges, parce qu’elle s’articulerait en haut et en bas par une diarthrose, c’est à dire par une forme de jointure lâche qui donne un mouvement manifeste : en haut avec le carpe, en bas avec la deuxième phalange du pouce ; et en effet les quatre os du métacarpe présentent cette forme de jointure, mais seulement sur leur extrémité inférieure [distale], là où ils s’articulent avec les doigts. Selon le jugement de Galien, les os du métacarpe sur leur extrémité supérieure [proximale] s’articulent par synarthrose, c’est-à-dire par une articulation d’une autre espèce qui donne un mouvement obscur et à peine perceptible. C’est ce que Galien veut dire, à mon avis, par le terme de synarthrose dans le dix-neuvième chapitre du livre Des os. Cependant il n’y a pas de raison de penser que Galien ait examiné les os métacarpiens dans les singes ou dans les chiens avec une précision telle qu’il puisse affirmer qu’ils sont unis au carpe par suture, par gomphose ou par harmonie[446] ; ce serait cependant bien son opinion, si nous pouvions dire qu’il n’a pas oublié ici son enseignement du début du livre Des os, où il énumère longuement les différentes formes de synarthroses.De quelle espèce sont les quatre os métacarpiens. Leur longueur et leurs appendices. Mais quoi qu’il en soit, pour suivre le plus précisément possible l’opinion de Galien, nous allons toujours compter quatre os du métacarpe et quinze phalanges de doigts. Les os du métacarpe sont plus longs que ceux des doigts et ils sont en grande partie cylindriques. L’os le plus long est situé face à l’index, puis ils diminuent progressivement de taille, de sorte que le plus petit et le plus fin de tous se trouve face au petit doigt. Tous sont dotés d’un appendice à leur extrémité supérieureff Q dans la figure 2 du chapitre 25.
g R dans les mêmes figures. Recherchez les autres à partir de là, en comparant la première figure avec la deuxième.
et inférieureg. L’extrémité supérieure [proximale] s’articule avec les os du carpe, comme nous l’avons dit auparavant (cette union est quelquefois invisible, même chez de petits enfants) ; et à cet endroit les os eux-mêmes sont un peu plus larges au-dessus [face dorsale] qu’en-dessous [face palmaire], de sorte que le métacarpe comme le carpe forment à la perfection à cet endroit une surface en forme de voûte vers le dehors, mais concave vers le dedans.Connexion entre les métacarpiens. Ces appendices sont joints entre eux latéralement et sont reliés entre eux par l’intermédiaire d’un ligament cartilagineux[447]. Les appendices inférieurs sont grands aussi, ils se terminent chacun par une tête sphérique devenant oblongue de l’arrière à l’avant : elle est recouverte d'un cartilage et entre dans la cavité de la base de la première phalange des doigts. Ces appendices se touchent également latéralement, mais pas aussi étroitement que les appendices supérieurs qui sont joints au carpe. Cependant, là où ils se font face, ils sont concaves et produisent des ligaments cartilagineux qui les maintiennent solidement.Espaces intermétacarpiens. Puisque ces os sont beaucoup plus fins que leurs appendices, ils sont séparés l’un de l’autre à la moitié de la longueur du métacarpe, par un espace considérableh,,h S dans les figures 1, 2 du chapitre 25. et ceci pour une raison très importante : en effet dans chacun des trois espaces formés par les quatre os métacarpiens se trouvent deuxii Δ dans la 8eplanche des muscles et m dans la 12e. des huit muscles fléchisseurs[448] de la première phalange des quatre doigts. Deux de ces muscles atteignent chaque doigt individuellement, et deux muscles s’étendent le long de chaque os du métacarpe, soit six muscles dans les trois espaces ; le septième muscle longe la face interne du métacarpien soutenant l’index, le huitième s’étire sur le côté externe de l’os qui fait face au petit doigt.Comment les os métacarpiens font de la place pour les muscles. Mais puisque ces muscles ne sont guère plus longs que ces os, et que les espaces ne sont pas suffisamment larges pour que la masse des muscles puisse y loger, les os métacarpiens sont avec raison concaves du côté où ils forment la paume,

×En forme de palme (palma) ou de peigne (pecten), l’image commune étant une forme trapézoïdale aux dents ou aux doigts écartés en éventail. Nous n’avons pas trouvé d’attestation du terme pectus (poitrine) avec ce sens, mais il est ici l’équivalent du grec στῆθος (poitrine, sein) utilisé métaphoriquement pour nommer la partie charnue de la paume sous les doigts de la main ou du pied (Bailly).
×Il est impossible de garder cette traduction littérale, le seul terme français étant aujourd’hui métacarpe.
×Le philosophe Eudème de Rhodes était un élève d’Aristote ; il publia les ouvrages de son maître et s’intéressa à l’astronomie et aux mathématiques. Il ne subsiste que des fragments et des citations de son œuvre. Cf. Aristote, Éthique à Eudème (éd. bilingue), par C. Dalimier, Paris, GF Flammarion, 2013.
×Cf. Fabrica I, chapitre 4.
×On distingue en fait plusieurs ligaments dans les articulations intermétacarpiennes : des ligaments métacarpiens dorsaux, s’étendant entre les faces dorsales des bases des deux métacarpiens, des ligaments métacarpiens palmaires unissant les faces antérieures des quatre derniers métacarpiens, des ligaments métacarpiens interosseux unissant les faces latérales des bases des quatre derniers métacarpiens.
×Muscles interosseux dorsaux et palmaires de la première phalange des doigts. Cf. J. Vons et S. Velut, A. Vésale. Résumé de ses livres sur la Fabrique du corps humain, Paris, Les Belles Lettres, 2008, p. 42-44.