Livre I
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a été ainsi mis sur le feu et que les ligaments ont été progressivement desséchés, les os du carpe sont solidement maintenus ensemble et, au cours de l’articulation du squelette, la jonction du carpe avec les os de l’avant-bras et ceux du métacarpe est plus facile, sauf si vous êtes déjà assez expérimenté dans les jointures osseuses et si vous osez séparer les os du carpe les uns des autres, les nettoyer de leurs ligaments et les enfiler ensuite sur des fils en cuivre, ou si vous voulez les conserver séparés. Lorsque vous aurez exposé le carpe au feu selon cette méthode, prenez une feuille de papier et placez-y les os du métacarpe et ceux des doigts, sans oublier les sésamoïdes, bien nettoyés, en évitant qu’en roulant sur cette feuille ou en se mélangeant aux os de l’autre main, ils n’augmentent la difficulté de l’assemblage du squelette. Il sera donc utile d’enfermer les os des mains et ceux des pieds séparément, dans quatre feuilles de papier. Mais avant d’envelopper dans du papier les os de chaque main ou de chaque pied, il faut toujours s’assurer qu’il n’en subsiste aucun dans le chaudron qui n’ait pas été nettoyé, de telle sorte qu’en jetant le liquide avec les impuretés, vous ne fassiez pas disparaître en même temps quelques os par négligence ; et si vous voulez conserver un ongle de la main ou du pied, enlevez-le pendant que vous nettoyez les phalanges des doigts et des orteils. En effet, nous avons remarqué que les ongles des hommes, comme ceux des oiseaux et des quadrupèdes, tombent des pieds lorsqu’ils sont placés dans de l’eau chaude et bouillis. En outre, pendant que vous nettoyez l’ulna et le radius, n’oubliez pas le cartilage qui s’étend à partir du radius et qui sépare sur une grande distance l’ulna du carpe. Détachez-le de l’ulna, de telle façon qu’en restant attaché au radius, il puisse se trouver à nouveau entre l’ulna et le carpe au moment d’articuler le squelette. De même, quand vous nettoyez la tête, soyez très prudent en enlevant la membrane qui garnit le foramen de l’organe de l’audition pour ne pas supprimer par inadvertance les osselets qui entrent dans la construction de cet organe ; mais vous pouvez introduire un objet pointu dans le foramen, dégager soigneusement ces osselets et les enlever. Gardez-les quelque part si vous voulez assembler le squelette plus tard. En dernier lieu, retirez les vertèbres et le sacrum, sauf si vous désirez séparer le coccyx du sacrum après une cuisson moins longue, car les petits os [du coccyx] ont tendance à se séparer les uns des autres s’ils cuisent très longtemps, à cause des ligaments cartilagineux qui les attachent. Cependant, si vous avez retiré le sacrum pour le séparer du coccyx, vous pouvez remettre le premier dans le chaudron et placer le coccyx à part sur une feuille de papier, ou dans un panier, où vous placerez les petits os, comme les dents, au cas où certaines seraient tombées, ou comme tout autre morceau d’os brisé par inadvertance. Mais si vous voulez conserver le cartilage des os du pubis, avant de libérer l’os iliaque du sacrum, les os du pubis doivent être rapidement nettoyés sur leur surface antérieure et postérieure et séparés au moyen de vos mains seules, de telle sorte que le cartilage intermédiaire tombe d’un os mais reste attaché à l’autre ; ainsi, plus tard, il pourra facilement être rattaché à l’os pair.
   Enfin, comptez les os ainsi nettoyés, sauf ceux des mains et des pieds, que vous aurez préalablement enveloppés à part dans du papier, mais comptez aussi la partie du crâne qui a été sciée et enlevée du reste de la tête, pour voir si des particules des os temporaux, qui s’appliquent comme des écailles aux os du vertex, et qui sont souvent détachées par la scie du reste de l’os temporal, ne sont pas tombées à cause de la cuisson, et vous assurer qu’elles ne sont pas jetées avec les crasses des os et le liquide. Car elles tombent facilement des os du vertex si la section à la scie à été faite trop au-dessus des oreilles. Enfin, vérifiez qu’aucune dent du maxillaire ou de la mandibule ne soit tombée[607], puis faites le compte des os : vingt-quatre vertèbres, autant de côtes, puis la clavicule (deux), la scapula (deux), l’humérus (deux), l’ulna (deux), le radius (deux), un sacrum dont le coccyx aura déjà été enlevé, deux grands os attachés de chaque côté du sacrum, le fémur (deux), le tibia (deux), la fibula (deux) et la patella (deux). Lorsque vous les aurez tous comptés, il sera très utile de les plonger dans une eau propre et bouillante, et, dès qu’ils en seront retirés, de les essuyer un à un avec un linge rêche et rugueux ; et si quelque morceau de ligament, de membrane, d’insertion ou de sortie de muscle adhère encore, il faut le frotter et l’essuyer, mais en faisant cependant attention à ne pas enlever en même temps le cartilage glissant qui entoure l’os comme une croûte. Pendant que ces os sèchent doucement en cercle auprès du feu, grattez les cartilages des oreilles à l’aide d’un couteau et disposez-les sur le papier, avec les autres cartilages. Préparez de la même façon les cartilages des paupières et des narines, et enfin, avec un petit couteau pointu, nettoyez le plus possible l’os hyoïde en le dégageant des muscles auxquels il est attaché, pendant qu’il est encore frais. Ceci fait, détachez de même les cartilages frais du larynx des chairs et des membranes, puis les deux cartilages du tronc de la trachée qui ressemblent à un C.
   Puis, nettoyez soigneusement l’os de la poitrine et les cartilages qui y sont attachés, ce qui se fait d’autant moins facilement que cet os est recouvert de plusieurs membranes et qu’il est graisseux : on ne peut absolument pas le cuire, et on peut à peine le mouiller d’eau chaude. Lorsque vous débarrassez les cartilages des chairs, prenez garde à ne pas enlever la membrane qui recouvre les cartilages et qui ressemble à celle que les Grecs appellent périoste, parce qu’elle enveloppe les os. Si cette membrane a été ôtée des cartilages, ceux-ci s’unissent plus lâchement à l’os de la poitrine, ils se rétractent et finissent par se tordre. Pour éviter ces rétractions, ne faites pas sécher l’os de la poitrine près du feu, mais placez-le quelque temps ailleurs, dans un local pas trop humide, jusqu’à ce que vous vouliez assembler le squelette ; sinon, les cartilages risquent de s’amollir et de déformer l’agencement du thorax.

×Cf. Fabrica I, chapitre 12, p. 47 (arcade dentaire incomplète).