Livre VII
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qu'elles en ont trompé beaucoup, comme si elles avaient été des parties distinctes et séparées. Combien d'anatomistes trouverait-on pour affirmer qu'il y a continuité de substance entre le cerveau et le cervelet ? Très peu vraiment ! Sans compter ceux qui enseignent que le cerveau est partagé en deux comme les poumons et qui nous brouillent tout, dans leur inlassable démangeaison d’écrire et leur confiance aveugle dans leurs propres rêveries. En réalité, bien que le cerveau soit profondément divisé en deux parties, sur toute la surfacemm du L supérieur vers K, plus haut, dans la fig. 3.
n du L inférieur vers N, plus bas, dans la fig. 3.
où il repose sur le cervelet et sur sa partien frontale[301], et bien que la même scissure se poursuive sur toute sa longueur dans sa partie la plus élevée, ce n'est pas pour autant qu'il est complètement séparé au milieu, près de sa baseo,o Voyez ceci fig. 1, chap. 2, livre IV et fig. 7,8,13 de ce livre-ci.
p L,L, fig. 3 ; I,I,I, fig. 4.
entre l’occiput et le front.Par quelles surfaces la moitié droite du cerveau est continue avec la gauche. Sur toute la longueur du cerveau qui correspond à celle du corps calleuxp, la moitié droite du cerveau est continue avec la moitié gauche ; ces deux moitiés [hémisphères] sont continues par l'intermédiaire du corps calleux et de celui qui est construit comme une arche [fornix]q,q S,T,V, fig. 5.
r X,X,Y,Y, fig. 5.
ainsi que par le septumrentre le ventricule [latéral] droit et le ventricule [latéral] gauche, au-dessus de leur cavité communess H dans les fig. 7 et 8. ou troisième ventricule[302]. Ensuite, elles sont aussi continues à la base : cela est montré par la vaste région où elles sont continues en longueur et en profondeur, par les fesses et les testicules du cerveau [colliculi supérieurs et inférieurs] et surtout par le début de la moelle spinale [tronc cérébral]t,t D, fig. 1, chap. 2, livre IV. qui sort du milieu de la base du cerveau ; ce début, qui est large et épais, est simple et continu en cet endroit comme les deux parties du cerveau[303].Comment le cervelet est continu avec le cerveau. Ensuite, même si les moitiés droite et gauche du cerveau ne sont pas continues avec le cervelet à l'endroit où elles le recouvrent, la face inférieure du cervelet est également continue en deux endroitsuu les u,u de la fig. 11 sont attachés à I,K sur la fig. 10. avec le début de la moelle spinale, déjà mentionné [tronc cérébral], et forme avec ce début un seul corps, du point de vue de la continuité. Par ailleurs, je vais exposer séparément et en détail le principal lieu de cette continuité, puis les parties que j'ai simplement énumérées mais qui doivent être prises en compte aussi. En effet, je me suis contenté jusqu'à présent d'embrasser toutes les parties du cerveau [encéphale] dans mon exposé, de telle sorte qu'il n'y ait personne qui, au moment de commencer une dissection selon mes recommandations, puisse penser que j'aie divagué comme les autres anatomistes sur le nombre des parties du cerveau [encéphale]. Et maintenant je vais entreprendre de manière adéquate [l'étude] de la position du cerveau, ce qui est montré par les membranes cérébrales et surtout par la cavité internexx elle est présentée sur les fig. 6 et 7, chap. 6, livre I. du crâne. Tout l’espace de cette cavité qui n’est pas occupé par les deux membranes cérébrales [dure-mère et leptoméninges], par la glande recevant la pituite du cerveau [hypophyse]yy toute la fig. 16. et par certaines branches des très grandes artères qui entrent dans le cerveau [artères carotides internes], est entièrement rempli par le cerveau et par le cervelet[304].Position et dimensions du cervelet. Le cerveletzz il est visible dans les fig. 8,9,11. est dix ou onze fois plus petit que le cerveau, et avec le début de la moelle spinale [tronc cérébral] il occupe la région de la cavité crânienne bornée à l'avant par la partie postérieureaa Z,Z, fig. 7 et 8. des protubérances[305] saillant dans la cavité pour les organes de l’audition et par les deux sinusbb h,h, et i,i, fig. 3, chap. 12, livre I. de l’os occipital [fosses cérébrales postérieures] laissant de la place dans l'os pour les deux premiers sinuscc S,S et T,T, fig. 9. de la dure-membrane[306], que nous appelons respectivement sinus [latéral] droit et sinus [latéral] gauche[307]. En effet, tout comme dans un cercle, aucune partie du cervelet n'excède ce périmètre, qui circonscrit très précisément sa position. Chez les hommes, comme peut-être pour les bœufs (apparemment les seuls animaux que Galien semble avoir examinés pour apprendre à connaître le cerveau [encéphale]), le cervelet ne s'étend pas à l'arrière aussi loin que la partie postérieure du cerveau et il remplit ce que nous appelons l'occiput. En fait, la partie postérieure et la plus élevée du cervelet humain monte à peine jusqu’à l'endroit où nous pourrions toucher avec les doigts la partie la plus basse de l’occiput[308]. Car chez nous [humains], il n'y a aucune partie de l’os occipital libre d’insertions musculaires qui ne soit remplie par le cervelet, même si parfois des Anatomistes décrivent sa position comme s’il remplissait toute la région proéminente de l’occiput qui sert au commun pour évaluer le pouvoir de la mémoire et de l’intelligence[309] ; en fait, la partie la plus élevée du cervelet atteint seulement le milieudd k, fig. 3, chap. 12, livre I.
e e dans la même fig.
de l'aire qui s'étend de l'arrière du foramenf fournissant un chemin à la moelle spinale [foramen magnum] à la jonction entre une portiongg D dans les fig. 3 et 4, chap. 6, livre I. de la suture lambdoïde et la suture sagittale, mais d'autres anatomistes, trompés par leurs bœufs, leurs ânes ou leur imagination, ont écrit que le cervelet monte jusqu'à cette jonction. En fait, chez les hommes, comme chez les chiens, les bœufs et les moutons, la partie supérieure du cervelet n’a aucune protubérance, ni sphérique, ni même pointue, mais elle apparaît plane, concave et pas bombée au milieu. La partie du crâne occupée par le cervelet nous renseigne sur sa position, son périmètre, sa forme et ses dimensions.Forme du cervelet. En effet, comme l’espace qu’il occupe, le cervelet est plus large que long ou profond, et sur toute sa partie inférieure, surtout à l’arrière, il a tout à fait l’aspect d’une sphère plus large que haute[310] : au milieu de cette surface convexe, il y a une dépression en angle aiguh,h au-dessus du R placé entre les 2 autres R, fig. 8 ou près de c, fig. 11.
i Q, fig. 9.
assez étroite, due à une protubéranceide l’os occipital, faite comme une ligne très épaisse [crête occipitale interne], qui augmente considérablement la force de cet os, et à laquelle la dure-membrane du cerveau[311] est très fermement rattachée. Ensuite, à l'avant, làkk X,X, près de M,N, fig. 7. où il s’étend en direction des fesses du cerveau [colliculi inférieurs], le cervelet se termine en une sorte de pointe [culmen du vermis], se conformant exactement à la forme de l’espace occupé.Dimensions et forme du cerveau Toutes les caractéristiques du cerveau[312], que vous pourrez aussi appeler « cerveau antérieur » si vous le souhaitez, sont visibles dans le reste de la cavité crânienne qui n’est pas rempli par le cervelet. Donc le cerveau est également aplati à sa base[l]l la meilleure vue est celle de la fig. 1, chap. 2, livre IV.
m A juxta I, fig. 1, chap. 2, livre IV, et la partie du cerveau dans la fig 13.
et n'a pas la forme d'une sphère parfaite, mais il présente un aspect irrégulier et sa forme varie. En effet, làm où il repose sur les orbites oculaires et sur les sinus des organes olfactifs[313], sa morphologie est variée : près de ceux-ci, il est saillant vers l'avantn,n C,C, fig. 13. et de chaque côté [côté latéral] de ces sinus il présente une dépression due à une protubérance de l'os saillant dans la cavité crânienne[314]. Dans cette même aire, l'os est saillant de manière irrégulière[315]

×Vésale distingue ici une partie « frontale » des hémisphères posée sur la base (osseuse) du crâne et une autre « occipitale » posée sur la tente du cervelet, tout en les décrivant continues dans le paragraphe suivant.
×Vésale ne distingue pas ici les structures (qu'il appelle « continues ») réunissant les deux hémisphères de celles qui sont communes à ces hémisphères. C'est à dessein qu'il décrit ainsi le corps calleux, véritable commissure unissant hémisphères droit et gauche, tout comme le fornix (cf. chapitre VII), et à juste titre. Les autres structures (septum, colliculi, tronc cérébral) sont certes communes mais non commissurales.
×Ce concept de continuité entre les parties du corps, appliqué ici à l'encéphale, a des conséquences sur la manière dont Vésale aborde la dissection de cet organe, cf. S. Velut, ''Vesalius' anatomical observations'', Vesalius continuum commemorating the 500th anniversary of Andreas Vesalius, International Conference, Zakynthos, 4-8 sept. 2014 et « L'encéphale et ses enveloppes chez Vésale », in La Fabrique de Vésale. La mémoire d'un livre (J. Vons éd.), Paris, Bibliothèque interuniversitaire de Santé, 2016, p. 83-103.
×Cette description, reléguant presque l'encéphale au second plan (venant après les veines, les membranes etc.), est assez étonnante.
×Il s'agit des rochers.
×Il s'agit des sinus latéraux, pairs et symétriques, comprenant un segment transversal auquel fait suite un segment sigmoïde (en forme de S horizontal).
×Voir à ce sujet la note portée dans la transcription en latin.
×Vésale veut dire par là que la projection du cervelet sur la surface du crâne ne dépasse pas en haut la ligne d'insertion des muscles de la nuque, ligne au dessus de laquelle l'os est palpable.
×Vésale cite une opinion du vulgus qui localise la mémoire dans la protubérance occipitale, ou plus exactement dans le ventricule du cervelet. Ambroise Paré écrira encore que le siège de la mémoire « est au ventricule postérieur, situé au cerebelle moins humide et plus solide que nulle autre partie du cerveau », Anatomie universelle du corps humain, Paris, Jehan Le Royer, 1561, livre III, p. 144.
×L'image d'une sphère aplatie rend mal compte de sa morphologie (en forme de toit pour sa face supérieure, sous la tente du cervelet).
×La dure-mère ostéopériostée du confluent postérieur des sinus (ancien torcular) situé en regard de ce processus occipital interne y est fermement adhérente.
×Vésale revient maintenant à la description du cerveau proprement dit.
×Lobes frontaux.
×Il s'agit des bosses orbitaires saillant sous les lobes frontaux.
×Vésale décrit la lame criblée de l'ethmoïde percée de nombreux foramina. Le passage présente une abondance de variations lexicales désignant tout phénomène de relief ou de saillie (protuberans, extuberans, tuber, proeminentia). La traduction respecte le plus possible cette variété caractéristique de l'écriture de Vésale.