Vous pouvez accéder ici au détail des séances de l'Académie depuis 1996, de 3 façons :
A partir de la date de la séance : cliquez sur l'année dans la partie "Calendrier", puis sur la séance désirée.
A partir du nom de l'auteur d'une communication : cliquez sur l'initiale de l'auteur recherché dans la partie "Auteurs", puis
sur le nom désiré.
Librement, en tapant quelques mots-clés et/ou noms d'auteurs dans le formulaire "Recherche
libre" et validez en cliquant sur "Rechercher".
NOUVEAU ! Les séances récentes sont intégralement disponibles en vidéo :
Cliquez sur le titre de la séance, puis sur l'icône pour lancer la lecture du film.
Les vidéos sont réalisées avec le soutien de
la Fondation de l'Avenir
La station debout (= posture érigée), caractéristique statique, et la bipédie (= marche bipède et course), son corollaire dynamique, ont fait l'objet de nombreux travaux dans la mesure où il a pu être considéré qu'il s'agissait de caractéristiques spécifiques humaines et de marqueurs morphologiques évolutifs déterminants, au même titre que l'encéphalisation ou que plusieurs particularités dentaires. La systématique phylogénétique (= cladistique), utilisée à l'heure actuelle, correspondant à une révolution conceptuelle issue des travaux de l'entomologiste Willy Hennig (1913-1976), repose sur la chronologie d'apparition de caractère dérivés (= nouveaux) dit apomorphes (apomorphies), par opposition aux caractères primitifs (= ancestraux) dit plésiomorphes (plésiomorphies). L'apparition des vertèbres caractérise ainsi le taxon monophylétique (= ayant un seul ancêtre commun) des Vertébrés (environ 50.000 espèces actuelles). Les Vertébrés les plus primitifs correspondent schématiquement à la classe traditionnelle des "Poissons" (environ 25.000). Parmi les Vertébrés, les Tétrapodes (environ 25.000) : Amphibiens, Reptiles, Oiseaux, et Mammifères, constituent un groupe monophylétique caractérisé la présence de quatre membres (= appendices). Le plan de base primitif des membres, et en particulier leur squelette (dit appendiculaire), est identique pour tous les Tétrapodes (notion d'homologie) ; le contrôle génétique commun est sous la dépendance de gènes Hox. Le mode locomoteur primitif des Tétrapodes est la quadrupédie (et cela presque par définition) ; de nombreux modes locomoteurs (hyper-)spécialisés se sont individualisés ensuite : vol, nage, fouissage, suspension, saut. Au sein des Mammifères (environ 4.500), l'Ordre des Primates occupe une place toute particulière puisque l'espèce humaine y est classée ; ce taxon monophylétique comprend environ 250 espèces actuelles (nombre variable suivant les auteurs), regroupées en environ 60 genres et en 11 familles. Les Primates sont caractérisés, dans leur ensemble, par une adaptation à la vie dans les arbres (= arboricolisme) ; quatre modes locomoteurs principaux peuvent être observés : 1°) quadrupédie = marche quadrupède, avec deux sous-types : a) arboricole (sur les branches des arbres), b) terrestre (sur le sol) ; 2°) grimper et saut arboricoles (en anglais : "leaping") : sur les troncs et les branches des arbres ; 3°) brachiation : déplacement dans les arbres en suspension par les membres supérieurs avec mouvements pendulaires ; 4°) bipédie. Les Hominoïdes (= Grands Singes, en anglais : "Apes"), comprenant les Gibbons, Orangs-outans, Gorilles, Chimpanzés et l'espèce humaine, se caractérisent par la perte de la queue (et la présence vestigiale du coccyx), et pour la plupart par des caractéristiques morphologiques de brachiateurs. Parmi les traits morphologiques liés à la bipédie figurent : 1°) situation du foramen magnum sous la base du crâne, dans un plan horizontal c'est-à-dire regardant vers le bas ; 2°) disparition de la crête occipitale (simples lignes nucales) liée à la réduction des muscles de la nuque ; 3°) apparition de la lordose lombaire ; 4°) indice intermembral (= longueur membre antérieur x 100 / longueur membre postérieur), d'environ 70 % ; 5°) pelvis osseux caractéristique ("en compression") ; 6°) pied fortement spécialisé, avec en particulier : perte de la mobilité du premier rayon (= hallux), accolé aux autres orteils et réduction importante des orteils latéraux et en particulier du cinquième orteil. Les Primates non-humains peuvent être ainsi considérés comme ayant quatre mains, d'où l'ancienne dénomination de "Quadrumanes", alors que l'espèce humaine n'en a que deux, d'où "Bimanes" ; le "propre de l'Homme" (bipède) n'est donc pas sa main comme cela est souvent mentionné mais son pied. La découverte d'Hominidés fossiles est bien sûr d'un intérêt majeur ; leur étude occupe une place toute particulière étant donné l'intérêt très ancien des humains pour connaître et comprendre leur origine, le sens de leur existence, leur place dans l'univers, et leur destinée, et il en résulte des débats souvent très médiatisés et passionnés. L'hominisation correspond à l'ensemble des processus biologiques, sociaux, et culturels qui caractérisent l'évolution au cours du temps de l'animal au genre humain Homo et à l'espèce humaine actuelle Homo sapiens (= "origine de l'Homme"). De très nombreux scénarios sur l'origine de la posture érigée et la signification de la bipédie humaine ont pu être proposés. De multiples éléments amènent à penser que, contrairement à ce qui était admis, les ancêtres des Hominidés bipèdes n'étaient pas des brachiateurs (comme le sont les autres Hominoïdes actuels : Grands Singes) mais des quadrupèdes. Autant les hypothèses sont nécessaires et stimulantes, autant il apparaît que, pour l'instant, les diverses composantes temporelles, géographiques, et fonctionnelles proposées restent plutôt du domaine de la fiction, des aventures romanesques et des épopées. L'existence d'un marqueur unique absolu (parfois appelé "trait magique"), qui a pu être recherchée par de nombreux auteurs, semble illusoire tant les définitions de ce qui fait la spécificité humaine et "le propre de l'Homme" sont diverses selon les approches anatomiques, biologiques, culturelles, philosophiques ou métaphysiques. L'"Homme debout" est loin d'avoir livré les mystères de ses origines et reste un thème de recherches majeur.
Intervenant : J DUBOUSSET
Du rachis à la colonne vertébrale : la nécessaire évolution d'une singularité terminologique française
(cliquez à nouveau sur l'icône pour masquer la vidéo)
La vidéo ne s'affiche pas ? Essayez ce lien
Le terme "rachis" n'est pratiquement utilisé (et compris) qu'en France. Alors qu'il a une connotation archaïsante, il paraît même paradoxalement connaître une nouvelle vogue. Il est une nécessité pour toute discipline scientifique d'avoir une terminologie unique, claire, et rigoureuse afin de faciliter échanges et apprentissage. Une terminologie anatomique internationale (latine) a été adoptée dès 1895 et a connu des confirmations et révisions régulières. Le terme retenu, et utilisé dans tous les pays depuis plus d'un siècle, est celui de "colonne vertébrale" (= columna vertebralis) ; il n'a que des avantages puisque les unités élémentaires en sont les vertèbres (le terme grec de spondulos n'est plus utilisé qu'en pathologie par le préfixe "spondylo-"). Les vertèbres sont, de plus, une caractéristique évolutive commune caractérisant un taxon monophylétique du vivant (Embranchement) : les Vertébrés (= Vertebrata). Le terme "vertébral" a par ailleurs l'avantage d'être compris du grand public. Parmi les autres synonymes anciens tels "épine" ou "échine", celui d'épine se trouve conservé dans la nomenclature actuelle sous la forme de l'adjectif "spinal" dérivé de sa forme latine (= spina) ; la moelle spinale (= medulla spinalis) est l'ancienne moelle épinière. L'adjectif dérivé "rachidien" et le préfixe "rachi-" n'ont ainsi également plus de sens ; le nerf spinal (= nervus spinalis) est l'ancien nerf rachidien ; le muscle érecteur spinal (= musculus erector spinae) correspond aux anciens muscles érecteurs du rachis (au singulier et non plus au pluriel), et le liquide cérébro-spinal (LCS = liquor cerebrospinalis) au classique liquide céphalo-rachidien (LCR). Alors que les enseignants d'anatomie français utilisent la nomenclature internationale depuis de nombreuses années, il paraît à présent essentiel qu'elle soit aussi adoptée en pratique clinique. Les allemands utilisent la terminologie anatomique latine non traduite ; l'anglais, est quant à lui, devenu la langue scientifique internationale. Les termes français de "vertébral" et de "spinal" ont l'avantage d'être à la fois similaires à ceux en latins (vertebralis et spinalis) et identiques aux termes anglais (vertebral et spinal) et donc en augmentant la lisibilité et la visibilité (en particulier par des mots-clés utilisés lors de recherches sur internet), de valoriser les travaux français et les échanges internationaux.
Les liens entre anatomie et chirurgie : un double 500e anniversaire à Strasbourg (1517-2017)
(cliquez à nouveau sur l'icône pour masquer la vidéo)
La vidéo ne s'affiche pas ? Essayez ce lien
En 1497, parut à Strasbourg le plus ancien traité de chirurgie imprimé en langue allemande, "Dis ist das buch der Cirurgia", rédigé par le chirurgien strasbourgeois Hieronymus Brunschwig († 1534) et imprimé par Johann Grüninger. En 1517, soit vingt années plus tard, avait lieu la première dissection humaine officielle à Strasbourg. Cet événement, exceptionnel pour l'époque, correspondait à l'une des toutes premières dissections réalisées en pays germanique. Elle fut pratiquée, en présence de nombreux spectateurs, dont des chirurgiens et barbiers de la ville, sous la direction de Wendelin Hock von Brackenaw, docteur en médecine diplômé de Bologne. Le corps était celui d'un condamné à mort par pendaison, accordé pour la circonstance par le Magistrat de la ville. Des dessins furent réalisés par Hans Wechtlin, élève de Hans Holbein le Vieux. Une feuille volante, avec une illustration gravée sur bois reproduisant les observations de cette dissection, fut éditée la même année par le strasbourgeois Johann Schott. Il paraît s'agir de la plus ancienne figure anatomique imprimée ayant été dessinée directement d'après nature. Elle représente le cadavre allongé d’un sujet masculin après une grande ouverture thoraco-abdominale. Au pourtour, sont disposées sept petites figures : six d'entre elles, démontrant des étapes successives de la dissection du cerveau et du cervelet, semblent constituer les premières représentations de l'encéphale imprimées au monde ; la dernière concerne la langue isolée. Cette feuille volante connut un grand succès et son illustration fut maintes fois reproduite. La même année 1517, paraissait à Strasbourg le célèbre ouvrage de chirurgie de Hans von Gersdorff (c.1450-1530), "Feldtbuch der Wundtartzney", édité par Johann Schott. Contenant de nombreuses notions d'anatomie, il offre le plus ancien lexique anatomique publié en allemand. Illustré de 24 figures gravées sur bois, il reprend, en particulier, l'illustration de la feuille volante de la récente dissection strasbourgeoise. Cet ouvrage connut également un important succès et de multiples rééditions. Ce double 500e anniversaire est l'occasion de souligner les liens essentiels, dès l'origine, entre anatomie et chirurgie. À l'heure actuelle, malgré les extraordinaires possibilités offertes par l'évolution des techniques d'imagerie, la dissection du corps humain reste incontournable pour l'étude et le perfectionnement des connaissances anatomiques et, notamment, celles nécessaires à la pratique chirurgicale.
Pierre Dionis (1643-1718), chirurgien et anatomiste parisien, démonstrateur au Jardin du Roi. Hommage à l'occasion du tricentenaire de sa mort.
Pierre Dionis, né à Paris en 1643, était le fils de Pierre Dionis (1612-1687), menuisier ordinaire des bâtiments du Roi, et un cousin germain de François Mauriceau (1637-1709), illustre maître chirurgien parisien et l'un des fondateurs de l'obstétrique moderne. Devenu maître chirurgien juré, Pierre Dionis fut, à partir de 1673, démonstrateur d'anatomie au Jardin du Roi ou « Jardin royal des plantes médicinales » (dit communément Jardin des Plantes, ancêtre du Muséum national d’histoire naturelle) créé à Paris en 1635, où des cours de botanique, d'anatomie, et de chimie étaient dispensés de manière indépendante de la Faculté et relevant directement du Roi. En 1680, Pierre Dionis devint « chirurgien ordinaire » de Marie-Thérèse d’Autriche (1638-1683), épouse de Louis XIV et reine de France. Il fut ensuite « premier chirurgien de Madame la Dauphine », c'est-à-dire de Marie Anne de Bavière (1660-1690), ayant épousé en 1680 le dauphin Louis de France (1661-1711), fils aîné de Louis XIV. Puis en 1707, il fut nommé « premier chirurgien de Madame la duchesse de Bourgogne », c'est-à-dire de Marie Adelaïde de Savoie (1685-1712), devenue dauphine en épousant en 1697 Louis de France (1682-1712). Enfin, en 1713, il devint « accoucheur de la duchesse de Berry », c'est-à-dire de Marie Louise Élisabeth d’Orléans (1695-1719), fille de Philippe d’Orléans, futur Régent, ayant épousé, en 1710, Charles de France, duc de Berry (1686-1714). Le premier des ouvrages de Pierre Dionis qui assurèrent sa notoriété est "L’anatomie de l’homme, suivant la circulation du sang & les dernières découvertes démontrée au Jardin royal", illustré de planches gravées sur cuivre, paru à Paris en 1690 (in-8°, 550 p.), le titre faisant référence à la querelle sur la circulation du sang, qui était alors toujours d'actualité ; le succès de cet ouvrage fut considérable avec de multiples éditions plusieurs traductions. Son deuxième ouvrage fameux est le "Cours d’opérations de chirurgie, démontrées au Jardin royal", également illustré de planches gravées sur cuivre, paru à Paris en 1707 (in-8°, 746 p.), et qui connut un succès encore plus important si l'on en juge au nombre de rééditions posthumes, assurées par Georges de La Faye (1699-1781), professeur et démonstrateur royal en chirurgie, devenu directeur de l’Académie royale de Chirurgie. Pierre Dionis décéda en 1718, trois ans après la mort de Louis XIV et la fin du "Grand Siècle" ; son cursus et son œuvre en font une des figures majeures qui contribuèrent à la reconnaissance progressive de la chirurgie et à la création de l'Académie royale de Chirurgie en 1731.