À Charles Spon, le 18 juin 1658, note 5.
Note [5]

La suite des événements, avec la terrible dysenterie de Louis xiv à Mardyck (v. note [6], lettre 538), allait donner raison au pressentiment d’Anne d’Autriche ; sans doute était-elle alarmée par les nouvelles qu’elle recevait du siège de Dunkerque.

Mme de Motteville (Mémoires, page 465) :

« Le roi voulut aller visiter l’armée. Il fut à Mardyck où il demeura quelque temps. Ce lieu était infecté par les corps morts qui étaient restés des années précédentes, à demi enterrés dans le sable sans pourrir ; la sécheresse du terroir les en empêchait. Il n’y avait à Mardyck nulle commodité, on manquait d’eau et de toutes choses, et la chaleur était excessive. Le cardinal, qui en toutes occasions avait toujours pour principale occupation de gagner de l’argent, s’avisa de devenir le vivandier et le munitionnaire de l’armée. Il faisait vendre, à ce qu’on dit, le vin, la viande, le pain et l’eau, et regagnait sur tout ce qui se vendait. Il faisait la charge de grand maître de l’Artillerie, et depuis les premières jusqu’aux dernières, il profitait sur toutes. Les souffrances par cette raison furent grandes en ce siège, et même à Calais où toutes les denrées nécessaires à la vie étaient fort chères. Le roi, quand il allait à Mardyck visiter son armée, vivait comme un particulier. Il dînait chez le cardinal Mazarin ou chez le vicomte de Turenne, il n’avait point d’officiers, et manquait de service et d’argent. Quand il allait à l’armée, il rencontrait de pauvres soldats, il ne leur donnait rien parce qu’il n’avait point de quoi le faire ; et le pis était que le ministre, corrompant les sentiments du roi, travaillait à lui en ôter l’inclination afin de lui en pouvoir ôter le moyen : ce qui faisait, à ce que me dirent ceux qui étaient à ce siège, le plus méchant effet du monde car les soldats deviennent plus avares de leur vie quand on leur est avare de quelques pistoles. »

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 18 juin 1658, note 5.

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(Consulté le 26/04/2024)

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