e-Mémoires de l'Académie Nationale de Chirurgie (ISSN 1634-0647)
Sommaire du numéro 2008, vol. 7 (2)
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Objectifs : évaluer l’effet « laxité ligamentaire » dans le traitement des scolioses idiopathiques. Matériel et Méthode : 36 malades (27 femmes, 9 hommes) pris en charge au CHUD d’Emdadi Meched (Iran) entre 2000 et 2006 ; durée moyenne de suivi :1,54 ans. 19 malades avaient une laxité ligamentaire ( 52,7%) 10 ont été traités par arthrodèse antérieure et postérieure avec fixation et les 9 autres par arthrodèse simple. 17 patients sans laxité ont bénéficié 13 fois d’une fusion postérieure avec fixation et 4 fois d’une double arthrodèse avec fixation. La durée moyenne de l’intervention fut de 3,95 heures pour les malades avec laxité et de 4,26h pour les autres. La correction de la courbure est de 73,3% pour les patients avec laxité et de 57,1% pour les malades sans laxité ( p=0/001). Conclusion : la laxité ligamentaire joue un rôle important dans la qualité de la correction chirurgicale des scolioses idiopathiques.
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L’ostéoporose est caractérisée par une diminution de la masse minérale et une détérioration micro-architecturale de l’os, provoquant un risque fracturaire. Son diagnostic repose sur la mesure de la densité minérale osseuse de surface, non directement corrélée à la résistance de l’os. Son traitement a pour but d’empêcher la déminéralisation de l’os. Nous proposons, en injectant un substitut osseux dans le radius distal, non seulement d’augmenter sa densité minérale, mais aussi d’en améliorer la résistance mécanique. Pour le vérifier, nous avons utilisé un scanner périphérique, qui permet non seulement de mesurer la densité osseuse totale ou trabéculaire mais aussi de calculer un index de résistance mécanique. Des tests mécaniques destructifs ont complété l’étude pour valider les résultats du scanner. Trois corps ont été préparés. Le radius distal d’un des côtés a été rempli en percutané avec du ciment phospho-calcique. Des images fluoroscopiques et de scanner périphérique ont été réalisées avant et 24h après cimentoplastie, lorsque le processus de cristallisation du ciment a conduit à de l’hydroxyapatite. Le scanner a mesuré les densités osseuses totale et trabéculaire, et calculé un index de résistance. Les tests mécaniques destructifs ont permis de montrer que le moment nécessaire à l’obtention d’une fracture a été multiplié par 2 dans les poignets injectés. Cette étude montre que la cimentoplastie percutanée avec un ciment phosphocalcique a augmenté la résistance mécanique du radius distal, et donc d’autant son seuil fracturaire. Une application de cimentoplastie préventive du radius distal pourrait s’en inspirer.
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L’exérèse chirurgicale par une hépatectomie radicale, seul traitement curatif des métastases hépatiques colorectales n’est possible que dans 75 à 85% des cas. L’originalité de notre travail a été de montrer dans les années 1990 que la chimiothérapie pouvait transformer les métastases irrésécables pour les rendre résécables. Notre expérience porte maintenant sur plus de 200 cas d’hépatectomies pour des malades irrésécables avec une survie à 5 ans de 30% et à 10 ans de 18%. Cette chirurgie est généralement lourde avec 55% d’hépatectomies majeures, 36% de réhépatectomies (jusqu’à 4 hépatectomies successives chez le même patient) et 20% de résections pulmonaires associées. En même temps que l’objectif de la diminution des tumeurs pour les rendre résécables, nous avons développé le principe de l’augmentation du parenchyme hépatique saint pour permettre des hépatectomies larges évitant le risque de l’insuffisance hépatique due à un trop petit territoire de parenchyme restant. D‘année en année les nouvelles chimiothérapies, les dernières étant les anticorps monoclonaux (Cetuximab) et les anti-angiogéniques (Bevacizumab) sont plus efficaces, offrant par une plus grande réduction tumorale à plus de malades la chance d’être opéré, but ultime de la stratégie associant chimiothérapie et chirurgie
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Du 1er janvier 1992 au 31 décembre 2006, 83 cures consécutives de hernie inguinale utilisant une myoplastie aux dépens du feuillet antérieur du muscle grand droit homolatéral ont été réalisées dans le même Groupe par le même opérateur. Il s’agissait de 82 hommes et d’une femme. L’âge moyen des patients était de 59 ans. Il s’agissait dans 7,2% des cas d’une récidive herniaire. La hernie était de type oblique externe dans 39 cas, directe chez 21 patients, mixte chez 3 et de nature difficile à préciser dans 20 cas. Dans 15.6 % des cas, un geste associé a été réalisé comprenant une résection transurétrale de prostate dans 12 cas. L’étude des résultats avec un recul moyen de 71 mois (3 à 187) révèle l’existence d’une seule récidive chez un patient âgé de 45 ans ayant repris une activité sportive dans des délais probablement trop précoces. L’analyse de la littérature concernant les techniques chirurgicales de réparation de hernies inguinales montre des taux de récidive variant de 1 à 10% selon la technique avec un pourcentage de perdus de vue variant de 5 à 19% à cinq ans. Le pourcentage de 1,2% de récidive de cette série se compare favorablement aux données de la littérature ce d’autant qu’un seul patient a été perdu de vue (1,2%). Les auteurs reprennent la description de la technique chirurgicale décrite en 1965 et mettent en avant la fiabilité de celle-ci ayant de plus l’avantage de ne nécessiter aucune implantation de matériel prothétique.
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La cholecystectomie par voie laparoscopique chez l’enfant est universellement validée. Notre revue de 135 dossiers a analysé le taux et le type des complications rapportées et les a comparé aux résultats des séries chez l’adulte. De mars 1992 à mars 2007, dans les services de chirurgie pédiatrique de Bicêtre, Lausanne et Créteil, 135 enfants ont été traités pour lithiase vésiculaire. L’âge médian était de 11,3 ans (3,7 à 18,1). Parmi eux, 131 ont subi la cholecystectomie sous coelioscopie dans ces services ; 4 ont été réopérés pour des complications survenues en dehors et ont été exclus de l’analyse. Les signes révélateurs ont été des douleurs abdominales chez 74 enfants, 18 fois associées à un ictère ; 6 cholecystites et 6 pancréatites par migration de calcul ont été relevées. L’étiologie était connue dans 81 cas en raison d’une anémie hémolytique, alors que dans 57 cas la lithiase était asymptomatique. L’indication opératoire a été confirmée par une échographie la veille de l’intervention, et dans 4 cas la voie biliaire principale (VBP) était dilatée. La durée opératoire moyenne, hors conversion, a varié de 30 à 180 minutes. Une cholangiographie per-opératoire a été faite dans 24% des cas. Une conversion en laparotomie a été faite 5 fois (3,7%), 2 fois en raison de lithiase de la VBP, 2 fois pour lésion de celle-ci, 1 fois en raison d’une perforation intestinale. Il n’y a pas eu de mortalité, mais 9 fois (7%) une survenue de complication : les 2 lésions de la VBP, la perforation intestinale, et en post-opératoire 1 hémorragie, 2 pancréatites et 1 hernie incisionnelle. Un enfant a dû subir une hépatico-jejunostomie. La durée médiane du suivi a été de 24 mois. Dans cette étude le taux de complication est plus élevé que ceux rapportés dans les séries d’adultes, en particulier pour les complications biliaires (3% versus 0,5%). Des impératifs techniques doivent être soulignés, tel l’exposition adéquate du triangle de Calot. Les principes de conversion en laparotomie, ainsi une durée opératoire anormalement prolongée ou une imprécision dans le contrôle d’un saignement, sont à respecter scrupuleusement. La plupart des indications de cholecystectomie sous coelioscopie chez l’enfant concernent des pathologies lithiasiques non compliquées ; parfois il s’agit d’une chirurgie préventive. Les complications majeures sont d’autant plus inacceptables. L’observation rigoureuse des principes techniques doit les réduire.
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Evolution réelle ou simple mode ! Malgré 20 ans d'expérience l'angioplastie carotidienne reste controversée et même rejetée des chirurgiens vasculaires - du moins en France. Les purs et durs ont de quoi convaincre, la chirurgie carotidienne, non seulement belle, est sûre et efficace. Est-elle menacée par l'angioplastie carotidienne? Il faut répondre par la négative, la vraie menace de cette chirurgie est le contrôle médicamenteux de la plaque d'athérome. L'angioplastie carotidienne s'inscrit dans une évolution naturelle des soins qui touchent tous les secteurs. C'est un mode de pensée qui doucement s'infiltre auprès des malades, des praticiens et des médias.Ceci est inéluctable. L'erreur des chirurgiens a été d'opposer cette technique au lieu de l'adapter, de la maîtriser et mieux de la contrôler, mais les chirurgiens ne sont pas des politiciens! Il n'y a pas d'ambiguïté pour qui sait la pratiquer - comme tout : cela s'apprend. C'est dans le choix des patients que réside le secret. Il y a incontestablement d'excellentes indications de l'angioplastie carotidienne qui peuvent éviter des catastrophes chirurgicales. Inversement, à notre stade actuel, sa place doit rester limitée. Le chirurgien vasculaire doit disposer de toutes les techniques, il a la meilleure place pour offrir le choix des armes ou traiter une complication. Les travaux scientifiques comparatifs ne sont globalement pas favorables à l'angioplastie à ce jour. L'étude SPACE allemande n'a pu affirmer le critère d'équivalence faute d'inclusions suffisantes. L'étude SAPHIRE américaine et l'étude EVA-3S française, ont conclu de façon opposée, mais sont toutes deux soumises à de sérieuses critiques. D'autres études sont en cours en Europe et aux Etats-Unis qui feront pencher un temps, la balance dans un sens. Mais tout est relatif, les choses évoluent les techniques s'améliorent. "En chirurgie on n'est jamais sûr de rien même pas de l'échec" disait notre maître Robert Courbier. Si l'on refaisait les grands essais randomisés des années 90 avec le traitement médical actuel, associant antiagrégants et statines, il n'est pas certain que la chirurgie l'emporterait. Alors messieurs les chirurgiens et si l'angioplastie était là pour durer et occuper la petite place laissée par les médicaments? Vous auriez tort de l'ignorer !
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Contexte: La révolution de l’imagerie médicale permet désormais, à partir d’une acquisition de Scanner ou d’IRM, de réaliser une modélisation 3D très réaliste du corps humain. Le développement de ces techniques nous fournit de nouveaux outils pour l’étude de l’anatomie humaine, pour son enseignement et pour la recherche. But du travail: Valider et développer des outils de dissection virtuelle en utilisant un nouveau logiciel de reconstruction tridimensionnelle « Volviz » mis au point par la société Lab-Ventures qui fonctionne sur des PC à multiprocesseurs. Applications possibles : c’est un remarquable outil pédagogique, mais c’est aussi un document riche en informations pour l’exploration des patients : - Bilan d’extension des tumeurs en cancérologie. - Bilan vasculaire artériel et dans les malformations complexes. C’est également un outil prometteur pour le chirurgien pour mieux choisir une stratégie en préopératoire. Résultat: Il convient d’apporter l’expertise anatomique indispensable pour la validation de ces nouveaux outils : Segmentation des organes, automatisation des fonctions principales du logiciel pour le rendre simple et utilisable par des non spécialistes.
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En moins de trente ans, la chirurgie de la cataracte a connu de très nombreux progrès, que ce soit au niveau des techniques d’anesthésie, des techniques opératoires, des instruments, des implants ou encore au niveau des machines. Ils ont permis de transformer le déroulement, les suites et le pronostic de cette intervention pour en faire aujourd’hui la plus pratiquée en France (500000 cas par an) A la fin des années 70, le cristallin cataracté était enlevé à la cryode (incision de 14mm, 7 points de suture), les implants n’étaient utilisés que par des chirurgiens avant-gardistes, les interventions se pratiquaient le plus souvent sous anesthésie générale, la récupération ne pouvaient avoir lieu avant l’ablation des fils à 2 mois et le taux de complications était voisin de 30%. Ainsi, les patients étaient priés d’attendre que leur cataracte soit « mûre » avant d’être opérés pour être quasi-certain que la vision post-opératoire soit supérieure à la vision pré-opératoire. Aujourd’hui, les interventions se déroulent en externe (moins de deux heures d’hospitalisation), sous anesthésie topique (simple instillation de gouttes permettant de ne pas interrompre les traitements associés tels les anti-agrégants ou anticoagulants). Le cristallin est broyé par une machine à ultra-sons appelée « phacoémulsificateur » au travers d’une incision de 2mm (non suturée) et remplacé par un implant en plastique mou introduit plié dans l’œil (implant adapté à la vue du patient de telle manière qu’il puisse voir sans lunettes en post-opératoire). La récupération est totale en moins de 4 jours et le taux de complication est tombé à moins de 1%. Ainsi, les opacifications du cristallin peuvent être traitées beaucoup plus tôt. Tous ces progrès ont permis de transformer le pronostic de cette intervention en limitant à quelques heures l’incapacité et en autorisant la complète réhabilitation en une semaine. Tels sont les progrès actuels de cette chirurgie qui seront exposés au cours de cette présentation.
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La pancréatectomie gauche par voie laparoscopique a été introduite au début des années 90. Il s’agit d’une intervention d’exérèse pure sans reconstruction et à ce titre elle a connu une diffusion plus rapide que la duodéno-pancréatectomie céphalique. Trois types d’interventions sont le plus souvent réalisés : la pancréatectomie caudale, la pancréatectomie gauche avec conservation splénique et la spléno-pancréatectomie gauche. Les pancréatectomies laparoscopiques sont principalement rapportées pour des tumeurs endocrines, des cystadénomes, des TIPMP localisées, des métastases pancréatiques et plus rarement pour des adénocarcinomes pancréatiques, des pancréatites chroniques ou des traumatismes. La technique opératoire est bien standardisée et nécessite 5 trocarts. L’ouverture de l’arrière cavité des épiploons à travers le ligament gastro-colique permet l’exposition de la face antérieure du pancréas. Le repérage lésionnel peut parfois nécessiter l’utilisation d’un écho-laparoscope. La dissection prograde consiste en la section première de l’isthme pancréatique par agrafage linéaire puis au retournement du moignon pancréatique. La dissection rétrograde débute au niveau du hile splénique et se poursuite de dehors en dedans. En l’absence d’extension tumorale, la conservation des vaisseaux spléniques est possible au prix d’une dissection délicate. L’utilisation de matériels spécifique ultrasoniques ou de thermofusion facilite l’hémostase pas à pas des banches collatérales issues de l’artère et de la veine splénique. L’hémorragie par plaie vasculaire reste la principale cause de conversion. Dans les centres experts la mortalité opératoire est proche de 0%, la morbidité entre 20 et 30% (fistule pancréatique, hémopéritoine, nécrose splénique). Sur 400 patients opérés entre 1995 et 2007, seulement 35 ont bénéficié d’un abord coelioscopique (8.7%) soit 31 pancréatectomies gauches coelioscopiques sur 92 (34%). Mais sur les 5 dernières années 78% des pancréatectomies gauches avec conservation splénique (22/28) ont été effectuées sous coelioscopie. La mortalité est nulle, le taux de morbidité globale de 22% (n=7), de reprise opératoire de 6% (n=2), le temps d’hospitalisation moyen de 7 jours (5 -22). Les limites de la chirurgie laparoscopique du pancréas gauche sont liées à la tumeur (volume, extension extra-pancréatique), aux patients (antécédents de chirurgie sus mésocolique, hypertension portale), au chirurgien (courbe d’apprentissage). En dehors du bénéfice cosmétique, l’approche coelioscopique réduit la durée d’hospitalisation, la consommation d’antalgique. En l’absence d’essai randomisé, la chirurgie coelioscopique du pancréas gauche a montré sa faisabilité au prix d’une morbi-mortalité au moins comparable à la chirurgie conventionnelle
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Les professionnels de santé semblent être devenus, en l'espace de ces vingt dernières années, en France, des suspects. Ils se savent exposés, à tout moment, au dérapage judiciaire dont la perspective les hante et a sensiblement modifié leur pratique, leur relation au patient, et leur budget assurance. L'Avocat, de préférence spécialisé en droit de la santé et de la responsabilité, fait désormais partie de l'environnement de nombreux médecins français. Son domaine d'activité est aussi vivant qu'enrichissant car il s'inscrit dans une dimension à la fois juridique et scientifique mais également et surtout dans une dimension humaine. C'est sous cet éclairage authentique et concret que doit être envisagé le rôle de l'avocat au côté du médecin lorsque ce dernier est happé dans le dédale du monde judiciaire.
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Le rôle de l'avocat dans une procédure américaine en responsabilité médicale est déterminé par la nature civile de la procédure, tant il est rare que les juridictions pénales soient saisies. Or, la procédure civile américaine présente une course aux obstacles rythmée par le dynamisme des avocats, des procédures d'obtention de preuves et d'expertise qui sont longues et coûteuses, la menace constante que l'affaire finisse devant des jurés habilités à accorder des dommages et intérêts "punitifs" pouvant se chiffrer à des dizaines de millions de dollars. Les règles déontologiques et de responsabilité imposent aux praticiens des obligations de transparence et d'information envers leurs patients qui sont de nature à édulcorer la relation de confiance entre le médecin et son patient. Cet exposé placera l'avocat, et surtout (1) ses modes de rémunération, (2) les procédures d'expertise et (3) les demandes de dommages et intérêts importants au centre de la crise actuelle que traverse la profession médicale américaine, qui a surtout pour effet d'augmenter les primes d'assurances et de rendre parfois inaccessible l'accès des patients aux traitements qui leur sont nécessaires.
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En vertu des principes de primauté et d’applicabilité directe, la Convention européenne des droits de l’Homme fait partie intégrante du droit français. Le respect des droits fondamentaux et libertés qu’elle garantit s’impose à l’Etat du fait se son effet vertical et aux particuliers dans leurs relations interindividuelles, du fait de son effet horizontal. Bien que ni le droit, ni le devoir de soigner ne figurent dans les articles de la Convention européenne des droits de l’Homme, il n’en demeure pas moins que l’interprétation jurisprudentielle de celle-ci par la Cour européenne des droits de l’Homme témoigne incontestablement de ce qu’ils ne peuvent être étrangers au champ couvert par les article 2, 3, 8 et 9 de ce texte. Ceux-ci concernent le droit à la vie, l’interdiction des traitements dégradants et inhumains, le respect de l’intimité et de la vie privée, et le respect de la liberté de conscience et de religion. Le présent propos aura ainsi pour objet de tenter de tirer les leçons de l’œuvre accomplie par la Cour de Strasbourg, s’agissant de la relation droits-devoirs au centre des préoccupations présentes de l’Académie de chirurgie, mais aussi de plus en plus fréquemment mise à l’ordre du jour par la Cour européenne des droits de l’Homme sous l’aspect de la théorie de l’obligation positive de l’Etat et de l’effet horizontal de la Convention. Le thème abordé pose aussi la question de l’évolution des droits fondamentaux expressément visés par le texte de la Convention vers les droits dits de la « troisième génération ».
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Les conséquences d’un avis d’expert sur une décision en droit méritent que l’on se penche sur ce qui en est le substrat : la preuve scientifique. La preuve sert à établir qu’une chose est vraie. La science est la connaissance exacte et approfondie fondée sur des relations objectives vérifiables. L’expert, débiteur du vrai, est sollicité par le juge, débiteur du juste. La valeur de la preuve scientifique dépend du type de raisonnement scientifique qui prétend la soutenir. Du raisonnement analogique au raisonnement inductif probabiliste, le mécanisme mental qui permet à l’Homme d’aboutir à une conclusion a évolué au cours des siècles. La science et l’incertitude sont indissociables. La faillibilité scientifique expertale en est la conséquence. Les moyens d’y pallier doivent être mis en œuvre pour que d’une vérité scientifique découle une vérité judiciaire. De la quasi-infaillibilité, demandée par la loi et la jurisprudence, à l’incertitude scientifique, la marge est parfois étroite. L’honnêteté intellectuelle et l’humilité de l’expert doivent régler sa conduite. « L’ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit » (Aristote).
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De tout temps, chirurgie, droit et philosophie ont entretenu des rapports intimes, comme la vie de Rabelais, entre autres, pourrait nous le rappeler. En ce XXIème siècle débutant, la transmission instantanée de l’image et du son à des milliers de kilomètres, la consultation en un seul clic par le non-spécialiste des traités de médecine sur le net, la rapidité exponentiellement croissante du progrès technique, jointes à la multiplication consumériste des mises en cause judiciaires, obligent le chirurgien à une transparence accrue de ses indications et de sa technique, ainsi qu’à une remise en question permanente de ses connaissances et de ses procédures. Il nous apparaît que l’une des meilleures manières pour lui de ne pas céder sur sa passion, qui sous-entend une appétence inentamée pour le progrès technique, en évitant cependant de prêter le flanc à une critique constatant la possible dangerosité de son activité, est de ne pas sacrifier la proximité clinique et éthique avec son patient à la constante évolution de la technique chirurgicale.
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