L. latine 295.  >
À Johann Georg Volckamer,
le 16 mai 1664

[Ms BIU Santé no 2007, fo 169 vo | LAT | IMG]

Au très distingué M. Johann Georg Volckamer, à Nuremberg.

Très distingué Monsieur, [a][1]

Je répondrai en peu de lignes à votre dernière. Demain je discuterai avec notre libraire pour obtenir tous les ouvrages de Baillou, [2] qu’ensuite je vous enverrai par voie sûre, c’est-à-dire Lyon, par l’intermédiaire de notre ami Spon, [3] ou par celui de M. Picques [4] s’il en a quelque occasion. Dans le même paquet, je mettrai le Chifflet [5][6] et l’Aristénète[7] si je mets la main dessus. [1] Puisse Dieu tout-puissant nous conserver de nombreuses années le très distingué M. Michael Dilherr, [8] qui est un homme éminemment savant. Dans une telle maladie, à la suite des remèdes généraux, je pense que la phlébotomie, [9] la purgation[10] le bain ou le demi-bain d’eau tiède [11][12] lui seront tout à fait nécessaires. Je me réjouis profondément de sa convalescence ; puisse cet excellent homme vivre encore très longtemps, je lui adresse tous mes compliments. [2] Votre compatriote Philippus Carolus, qui avait été professeur à Altdorf, est donc mort ; [13][14] mais qu’enseignait-il lorsqu’il y professait, étaient-ce les belles-lettres, ou la philosophie ? où est-il mort, en quel an, et à quel âge ? a-t-il été papiste, moine, jésuite ? a-t-il été marié ? Écrivez-moi, je vous prie, sur tout cela et pardonnez ma curiosité ; tous les mouvements et toutes les transformations de l’esprit humain nous font bien voir notre malheur et notre faiblesse. [3][15] Prenez note, s’il vous plaît, de la liste que voici et achetez-moi s’ils se présentent : Phœnix Christianus de Daniel Wülffer, [16] Phil. Carolus in Bibliotheca Romana, Historia plantarum generalis de Johann Theodor Schenck, in‑4o, Iéna, 1656, [17] toutes les thèses et tous les opuscules qu’Eckard Leichner a écrits, en particulier son Anti-Harveiana, son de Calido innato [18] et ses Hypomnemata[19][20] Où ce Leichner vit-il ? [4] Je vous remercie pour les livres que vous m’avez achetés, indiquez-m’en le prix et je vous rembourserai. J’ai ici le Mercurius epistolaris de Christ. Rupertus ; [5][21] mais pour un homme de telle éminence, je préfère l’avoir en double qu’en manquer. Ajoutez-y, je vous prie, si vous les trouvez, les Dissertationes politicæ d’Heidmann. [6][22] Je salue le très distingué M. Rolfinck ; [23] j’attends ses disputations et répondrai à sa lettre. [7][24] Je salue de tout cœur M. Michael Horn de Leipzig, [25] ainsi que tous les autres anciens amis de chez vous. Vale et aimez-moi.

De Paris, le 16e de mai 1664.

Vôtre, etc.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Johann Georg Volckamer, ms BIU Santé no 2007, fo 169 vo.

1.

V. note :

2.

Johann Michael Dilherr, alors âgé de 60 ans, en vécut encore cinq.

La Correspondance n’en apprend pas plus sur la nature de sa maladie, non plus que le traitement employé pour la soigner : afin de rétablir l’intempérie (équilibre perturbé des humeurs), la saignée, la purgation et le demi-bain étaient les prescriptions quasi universelles (passe-partout) des médecins dogmatiques, opposées aux remèdes chimiques des empiriques (même si, en Allemagne, elles avaient pu faire partie des generalia remedia [remèdes généraux] préalablement administrés).

3.

Johann Georg Volckamer avait répondu à une question que Guy Patin lui avait posée dans sa lettre latine des 10 et 28 mars 1664 (mais pourtant rayée dans son brouillon, v.  la note [3] de cette lettre).

La Vita Philippi Caroli [Vie de Philippus Carolus] dans les Vitæ Professorum philosophiæ qui a condita Academiæ Altorfinæ ad hunc usque diem claruerunt qua fieri potuit accuratio ex monumentis fide dignissimis descriptæ à Sigismundo Iacobo Apino Log. et Metaph. Prof. publ. Norimb. et Leopoldino-Carolinæ Acad. Nat. Cur. Sodal. Adiectæ sunt singulorum effigies [Vies des professeurs de philosophie qui ont brillé depuis la fondation de l’Université d’Altdorf jusqu’à ce jour, que Siegmund Jacob Alpin, professeur public de logique et de métaphysique à Nuremberg, et membre de l’Académie (impériale) Leopoldino-Carolina des Curieux de la Nature (v. note [1] de la biographie de Philipp Jakob Sachs von Lewenhaimb), a écrites avec toute la précision possible, à partir de documents parfaitement dignes de foi. Avec tous leurs portraits] (Nuremberg et Altdorf, héritiers de Tauber, 1728, in‑4o, pages 133‑141) dit que natif de Neubourg-sur-le Danube (Bavière) et élevé dans la religion luthérienne, Philippus Carolus (Philipp Caroli) était mort à Vienne en novembre 1639.

Professeur d’histoire et philologie de l’Université d’Altdorf en 1626, il avait abandonné sa chaire, sa femme et ses enfants en 1629 pour se convertir au catholicisme sous l’influence des jésuites :

Quæ quidem hominis a fide nostra defectio et ad Pontificam accessio mira tunc nemini ac inopinata accidit : cum crebræ ipsius ad P.P. Iesuitas excursiones, emansiones diutinæ, virulentæ Doctorum nostrorum, maxime D. M. Lutheri, reprehensiones, et acerrima Romanensium defensio, nihil portendere aliud videretur.

[Sa répudiation de notre foi et sa conversion au papisme n’ont alors étonné ni surpris personne : ses nombreuses démarches auprès des pères jésuites, ses longues escapades, ses virulentes critiques de nos docteurs, surtout de M. Martin Luther, et sa défense énergique des catholiques semblaient ne rien laisser présager d’autre].

Ses deux derniers titres parus (que Guy Patin devait avoir lus et appréciés) étaient alors :

4.

Ces livres que désirait Guy Patin étaient :

5.

V. note [5], lettre latine 127, pour le « Mercure épistolaire » (Nuremberg, 1659 et 1661) de Christoph Adam Rupertus.

6.

Viri Optimi Clq. Christophori Heidmani, Eloquentiæ quondam in Illustri Julia Professoris celeberrimi, Dissertationes politicæ vii. ex octo libris polit. Aristotelis [Sept Dissertations politiques de l’excellent et très distingué Christoph Heidmann, jadis fort célèbre professeur de rhétorique en l’Academia Julia (d’Helmstedt), tirées des huit livres de la Politique d’Aristote] (Helmstedt, Johann Heitmuller, 1658, in‑12).

Christoph Heidmann (1582-1627), philologue et géographe allemand, avait été nommé professeur à Helmstedt en 1612 ; Hermann Conring fut un de ses élèves célèbres.

7.

La lettre suivante de Guy Patin à Werner Rolfinck est datée du 6 septembre 1664. V. notes [10], lettre 683, et [2], lettre latine 33, pour vingt des nombreuses thèses que Rolfinck avait présidées depuis 1629 à Iéna et dont Patin voulait avoir la collection complète. Johann Georg Volckamer lui en avait promis quelques-unes que Rolfinck lui avait remises à son intention.

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 169 vo.

Clarissimo viro Io. Georgio Volcamero. Noribergam.

Ad postremam tuam paucis repondebo, Vir Cl. Cras agam cum Bibliopola
nostro, pro Ballonianis omnibus, quæ postehac ad Te mittam, per viam tutam i. Lugdunum
per Sponium nostrum ; vel per D. Picques, si habeat aliquam occasionem : in eodem
fasciculo includam Chiffletium et Aristænetum, si occurrant. Utinam servet Deus
Opt. Max. Cl. virum D. Mich. Dilherum, virum impensè doctum in multos annos :
cui in tale affectu valde profuturum putarem, post generalia remedia, venæ sectionem et purgationem, balneum aut semicupium ex aqua tepente. De Pro ejus convalescentia ex animo
gaudeo : utinam perennet in multos annos vir eximius, cui multam salutem nuntio.
Igitur obijt vester ille Phil. Caroli, qui fuerat Prof. Altorfij : sed quid docebat dum
Altorfij doceret, an literas humaniores ? an Philosophiam ? Ubinam obijt, et quo anno ?
imò et qua ætate ? an Papista, an Monachus, an Iesuita, an conjugatus : scribe quæso
de singulis illis, et ignosce curiositati meæ : tot humani ingenij motus atque muta-
tiones miseriam et imbecillitatem nostram apprime patefaciunt. Habeto sodes
rationem sequentis Indiculi, ac emito mihi si occurrant. Danielis Wulferi Phœ-
nix Christianus : Phil. Caroli in Bibliotheca Romana : Io. Theod. Schenckij His-
toria plantarum generalis. 4. Ienæ, 1656. Quidquid scripsit Thesium aut libellorum
Eccardus Leichnerus, præsertim Anti-Haru. ut et de Calido innato : et ejusdem
Hypomnemata.
Ubinam vivit iste Leichnerus ? Gratias ago pro libris mihi emptis,
designa pretium, et refundam. Hîc habeo Christ. Ruperti Mercurium Epistolarem : sed
propter tantum virum malo bis habere quàm carere : adjunge quæso Dissertationes politicas si prostent, Heidmanni. Cl. virum D. Rolfinkium saluto ; ejus Disputationes
expecto, et ejus Epistolæ respondebo : D. Mich. Horne Lipsiensem ex animo saluto, ut et omnes
alios veteres amicos vestrates. Vale, et me ama. Parisijs, 16. Maij, 1664. Tuus, etc.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johann Georg Volckamer, le 16 mai 1664

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(Consulté le 03/05/2024)

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