L. 821.  >
À André Falconet,
le 1er mai 1665

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 1er mai 1665

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0821

(Consulté le 26/04/2024)

 

Monsieur, [a][1]

Ce 29e d’avril. > Le roi [2] a été aujourd’hui au Parlement [3] où il a porté une déclaration contre les jansénistes. [4] M. Talon [5] y a parlé longtemps et fortement, et même contre les moines et les religieuses, et a demandé au roi là-dessus quelque réformation. Quem das finem, Rex magne, laborum ? [1][6] Pour le Journal des Sçavans[7] on s’en moque ici et ces écrivains mercenaires se voient punis de leurs téméraires jugements par leur propre faute, turdus sibi cacavit malum[2] S’ils eussent continué dans leur folle et inepte façon de critiquer tout le monde, ils allaient attirer de terribles censures. Un savant homme, [8] qui en sait bien plus qu’eux et qui a déjà beaucoup écrit, est fort en colère contre eux. [3] Il dit que leur fait n’est que finesse pour faire valoir leurs amis et nuire à ceux qui ne le seront pas ; c’est une violence qu’on n’avait jamais vue en France. Dès le troisième Journal, M. le premier président [9] me dit seul à seul dans son cabinet, Ces gens-là se mêlent de critiquer, ils se feront bien des ennemis et nous serons bientôt obligés de leur imposer silence. Tout cela est arrivé par leur faute et à leur propre honte. [10] Je m’en vais de ce pas chez M. Parmentier [11] pour votre affaire. Il est honnête homme et mon bon ami ; il n’est guère maladif, mais quand il a quelque indisposition je suis son médecin. M. Sorel, [12] son beau-frère, [4] est aussi mon bon ami.

Dictum factum[5] j’en viens tout de ce pas. Bona verba[6] votre procès est jugé et vous l’avez gagné tout du long. Le charlatan [13] qui est débouté de ses demandes, s’il n’en demeure point là et qu’il veuille passer outre, je le recommanderai aussi à M. le premier président quand vous me le manderez. Vous faites bien de vous défendre contre ces pestes du genre humain. Morisset [14] est toujours embarrassé et Blondel [15] a toujours envie de chicaner et de plaider ; et cependant, rien n’avance. L’un sera toute sa vie badin et plein de vanité et l’autre sera toujours obstiné. M. Ferrand [16] n’est pas mort comme je vous l’avais mandé, c’est sa sœur [17] qui est morte et qui a causé le faux bruit. [7] On tient que les Anglais et les Hollandais sont tous prêts à se battre, et chaque jour on en attend des nouvelles. [8][18] Nous avons ici une saison fort tempérée, mais les blés ont besoin de pluie. Siccitates imbribus salubriores[9][19] aussi n’avons-nous guère de malades. Medici iacent, ægri ambulant[10][20] Je viens d’envoyer une lettre à mon Carolus, [21] qui reconnaît qu’il vous a des obligations particulières. Il étudie trop, et je lui dis souvent que cela le rendra mélancolique [22] et lui abrégera ses jours ; il m’a promis de s’en corriger.

On parle ici de révolte dans les états du Turc, [23] dans Constantinople [24] et au Grand Caire, [25] et autres lieux de l’Empire ottoman. [11][26] Ce serait là une belle occasion à tous les princes chrétiens de s’unir contre cet ennemi commun de notre religion et de nos muses, mais talis sapientia apud nos non habitat : [12][27] l’amour, l’avarice, l’ambition et la vengeance occupent tous les états des princes de l’Europe, et chacun ne songe qu’à son profit et à son plaisir, interea patitur iustus[13] Je vous baise les mains et suis de tout mon cœur votre, etc.

De Paris, ce 1er de mai 1665.


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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