À Charles Spon, le 22 novembre 1656, note 18.
Note [18]

« un nommé » remplace ici un passage que Guy Patin a rayé :

« deux hommes, dont l’un s’appelle L’Esprit (fils d’un médecin de Béziers) qui demeurait chez M. le Chancelier, {a} et est frère de M. Esprit, médecin de M. le duc d’Anjou ; {b} l’autre s’appelle… »


  1. Il s’agissait de Jacques Esprit, dit l’abbé (1611-1678), écrivain et membre de l’Académie française.

  2. V. notes [1], lettre 582, pour André Esprit, médecin de Béziers, et [15], lettre 292, pour son fils Jean-André, médecin de Philippe d’Anjou, futur duc d’Orléans.

Jean-Hérault de Gourville (La Rochefoucauld, Limousin 1625-Paris 1703), après une enfance misérable, a connu une étonnante carrière politique. À 17 ans, il avait été placé comme petit clerc chez un procureur d’Angoulême. Six mois plus tard, son frère, maître d’hôtel de l’abbé de La Rochefoucauld, le faisait admettre dans cette maison en qualité de valet de chambre. Au bout de trois ans, le prince de Marcillac, futur duc de La Rochefoucauld (v. note [7], lettre 0219) et frère de l’abbé, le prit pour son maître d’hôtel et l’emmena avec lui à l’armée. C’était au moment de l’ouverture de la campagne de 1646. Gourville fit si bien que le prince l’éleva aux fonctions de secrétaire. Gourville devint alors l’un des principaux agents politiques du parti condéen pendant la Fronde. La guerre civile terminée, Gourville s’était entremis dans l’accommodement du duc de La Rochefoucauld avec la cour puis s’était mis au service du prince de Conti, en Catalogne et en Languedoc. Devenu homme d’importance et déjà riche, Gourville était revenu à Paris pour se replonger dans les intrigues secrètes au service de Mazarin et de Nicolas Fouquet, procureur général et surintendant des finances alors en pleine ascension. Il en a parlé lui-même dans ses Mémoires (pages 93‑94)  :

« Quelque temps après, je fus connu de M. Fouquet, qui me goûta assez en me parlant un jour de la peine qu’il y avait à faire vérifier des édits au Parlement. Je lui dis que, dans toutes les chambres, il y avait un nombre de conseillers qui entraînaient la plupart des autres et que je croyais qu’on pourrait leur faire parler par des gens de leur connaissance, leur bailler à chacun cinq cents écus de gratification et leur en faire espérer autant, dans la suite, aux étrennes. J’en fis une liste particulière et je fus chargé d’en voir une partie que je connaissais ; on en fit de même pour d’autres.

[…] Il se présenta une occasion au Parlement où M. Fouquet jugea que ce qu’il avait fait avait utilement réussi. Il me chargea encore de quelques autres affaires, et étant fort content de moi, cela me fit espérer que je pourrais faire quelque chose par ce chemin-là. Mais en ce temps, M. le cardinal se trouvant fatigué des demandes que lui faisait M. le prince de Conti, un de ces Messieurs de la cabale contre moi qui était auprès de Son Altesse et qui ne m’aimait pas, étant venu à Paris et M. le cardinal s’étant plaint de ses fréquentes demandes, il lui dit que c’était par mes conseils et que j’avais beaucoup empiété sur l’esprit de Mme la princesse de Conti ; que si Son Éminence me faisait mettre à la Bastille et faisait venir M. le prince de Conti, elle verrait qu’il ne lui ferait pas la moindre peine. M. le cardinal, au commencement de novembre 1656, donna l’ordre à M. de La Bachelerie, gouverneur de la Bastille, de m’y mener. Il vint pour cela le lendemain à mon appartement, accompagné de quelques gens et ayant trouvé mon laquais à la porte de ma chambre, il lui demanda si j’étais là et ce que je faisais. Ce laquais lui répondit que j’étais avec mon maître à danser. M’ayant trouvé < alors > que je répétais une courante, il me dit en riant qu’il fallait remettre la danse à un autre jour, qu’il avait ordre de M. le cardinal de me mener à la Bastille. »

Gourville sortit de la Bastille en avril ou mai 1657 pour reprendre ses affaires jusqu’à la chute de Fouquet ; condamné alors à mort par contumace, comme un des principaux agents du surintendant déchu, il s’enfuit à Bruxelles pour y intriguer de nouveau, mais en faveur du prince de Condé, auprès de la cour d’Espagne. Amnistié sans difficulté, Gourville eut l’honneur d’être favorablement présenté à Louis xiv par le prince de Condé, à Chantilly, en avril 1671.

Vers le milieu du mois de juin 1702, au crépuscule d’une des vies les plus aventureuses du xviie s., Gourville dicta ses mémoires en quatre mois et demi, sans avoir recours à personne et sans autre aide que ses souvenirs. Ils parurent pour la première fois sous le titre de Mémoires contenant les affaires auxquelles il a été employé par la cour depuis 1642 jusques en 1698 (Paris, Ganeau, 1724, 2 volumes in‑12).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 22 novembre 1656, note 18.

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(Consulté le 29/04/2024)

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