Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Naudæana 2, note 57.
Note [57]

V. note [34], lettre 117, pour la pierre philosophale, procédé auquel, sans le nommer, Érasme a consacré son Colloque xxxiv, intitulé Alcumistica [L’Alchimie] (v. note [3], lettre 653). C’est un dialogue entre Philecoüs et Lalus, à propos d’un vieillard cupide, nommé Balbinus, qui se fait duper par un prêtre, charlatan faiseur d’or, avec ce propos de Lalus :

Urgente Balbino, ut rem aggrederetur : “ An non tenes, inquit, illud : Dimidium facti, qui bene cœpit, habet ? Magnum est bene præparare materiam. ” Tandem cœpit adornari fornax. Heic rursus erat opus novo auro, velut illecebra venturi auri. Siquidem ut piscis non capitur absque esca, ita aurum alcumistis non provenit, nisi pars auri admisceatur. Interea Balbinus totus erat in supputationibus, subducebat enim, si unica pareret quindecim, quantum esset lucri rediturum ex unciis bis mille : tantum enim decreverat insumere. Cum hanc quoque pecuniam decoxisset alcumista, iamque mensem unum atque alterum multum operæ simulasset circa folles et carbones, roganti Balbino, ecquid procederet negotium, primum obmutuit : urgenti tandem respondit, “ Sicut solent res præclaræ, quæ semper difficiles habent aditus ”. Caussabatur, erratum in emendis carbonibus : quernos enim emerat, cum abiegnis esset opus, aut colurnis. Ibi perierant aurei centum : nec eo segnius reditum est ad aleam. Data nova pecunia, mutati carbones. Iamque maiore studio res cœpta est, quam antea ; quemadmodum in bello milites, si quid secus accidit quam vellent, virtute sarciunt. Cum mense iam aliquot ferbuisset officina, et exspectaretur fœtus aureus, ac ne mica quidem auri esset in vasis (iam enim et illud omne decoxerat alcumista) inventa est alia caussatio, nimirum vitra, quibus usus fuerat, non fuisse temperata sicut oportuit. Etenim ut non ex quovis ligno Mercurius fingitur, ita non quibuslibet vitreis conficitur aureum. Quo plus erat impensum, hoc minus libebat desistere.

[Balbin le pressant de se mettre à l’œuvre : « Ne connaissez-vous donc pas, lui dit-il, le proverbe, Dimidium facti, qui bene cœpit, habet ? {a} L’essentiel est de bien préparer la matière. » Il s’occupa enfin à monter le fourneau. Pour cela, il fallait encore un nouvel or qui servît d’appât à l’or à venir, car, de même que le poisson ne se prend pas sans amorce, les alchimistes ne recueillent point d’or sans en débourser un peu. Pendant ce temps, Balbin était plongé dans les comptes : il calculait, si une once lui en rendrait quinze, quel profit il retirerait de deux mille onces, car il avait résolu d’en dépenser autant. L’alchimiste avait dévoré cette somme et, depuis deux mois, faisait semblant de se donner beaucoup de peine avec ses soufflets et ses charbons, quand Balbin lui demanda comment allait l’affaire. Il se tut d’abord, mais l’autre insistant, il lui répondit : « Comme vont les grandes choses, qui ont toujours des commencements difficiles. » Il prétextait qu’il s’était trompé dans l’achat de charbon, qu’il l’avait acheté de chêne lorsqu’il le fallait de sapin ou de coudrier. C’était une perte de cent écus d’or. On n’en recommença pas moins la partie ; une nouvelle somme ayant été remise, le charbon fut changé. On se remit à la besogne avec plus de zèle qu’auparavant : de même que les soldats, sur un champ de bataille, réparent à force de bravoure l’échec qu’ils ont éprouvé. Au bout de quelques mois, lorsque le laboratoire eut été en pleine activité et que l’on espérait un lingot d’or sans qu’une paillette existât dans les vases (car l’alchimiste l’avait tout mangé), celui-ci inventa un autre prétexte, à savoir que les verres dont il s’était servi n’avaient pas été confectionnés comme il fallait ; car, de même que tout bois n’est pas bon pour faire Mercure, toute espèce de verre ne convient pas pour faire de l’or. Plus on avait dépensé, moins on devait discontinuer]. {b}


  1. « Besogne bien commencée est à moitié faite » (Horace, Épîtres, i, épître 2, vers 40).

  2. Traduction de Victor Develay, tome 2, pages 109‑110.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Naudæana 2, note 57.

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(Consulté le 26/04/2024)

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