Séance du mercredi 3 février 2010

15h00-17h00 - Les Cordeliers
Modérateur : Dominique POITOUT

 

 

Communication sur les substituts osseux

MAINARD D (Nancy)

Résumé
Les chirurgiens Maxillo-Faciaux et Orthopédiques sont souvent confrontés aux pertes de substances osseuses. Pour les combler ils ont à leur disposition une large gamme de substituts d’origines humaine, animale, minérale ou synthétique.
Un substitut osseux est un bio-matériau ou produit d’ingénierie tissulaire qui permet de combler et de remplacer une perte osseuse afin d’obtenir la consolidation de l’os et la restauration de la fonction.
Les autogreffes restent le mode de comblement de référence. Elles sont quelquefois insuffisantes et leur prélèvement est source de morbidité. Les allogreffes cryoconservées sont utilisées sous de nombreuses formes et permettent de faire face à pratiquement toutes les situations. Elles ne sont pas limitées par le volume de la perte osseuse. Les prélèvements sérologiques effectués sur le donneur limitent le risque infectieux viral. Elles peuvent faire l’objet d’un traitement de sécurisation microbiologique qui limite virtuellement tout risque de transmission infectieuse. Les allogreffes décalcifiés revendiquent une certaine ostéoinduction. Les xénogreffes qui font l’objet de traitements spécifiques sont peu employées.
Les substituts osseux de synthèse sont essentiellement représentés par les phosphates de calcium. Deux d’entre eux sont principalement utilisés : l’hydroxyapatite et le phosphate tricalcique béta qui peuvent également se présenter sous forme bi-phasée. Ils sont de plus en plus employés et évitent, dans beaucoup de cas, l’utilisation d’une autogreffe. Dans certaines indications ils se posent en alternative aux allogreffes. Ils possèdent une structure macroporeuse qui favorise leur pénétration par l’os néoformé sur le principe de l’ostéoconduction. Ils possèdent une propriété particulière, la bioactivité, qui permet une liaison intime de nature chimique sans interposition fibreuse avec le tissu osseux. Les ciments phosphocalciques d’apparition clinique plus récente sont encore peu employés. Par leur forme injectable ils ouvrent la voie à la chirurgie percutanée. Ils obéissent à des règles d’utilisation précise. Les sulfates de calcium ont par leur association aux antibiotiques l’avantage de pouvoir être utilisés dans un contexte septique. Le carbonate de calcium a eu beaucoup de succès mais il subit la concurrence des phosphates de calcium.
Le choix du substitut osseux ne doit pas être univoque. Il dépend de la localisation du volume de la perte osseuse, du contexte local et général, de l’étiologie et des propriétés particulières du substitut. Si les substituts osseux sont maintenant utilisés de façon courante en orthopédie et traumatologie, il manque de séries cliniques prospectives comparatives permettant une parfaite validation clinique. D’autres produits comme les BMP sont proposés et devraient préciser leur place en association avec les substituts osseux, en particulier synthétiques. Les perspectives à venir sont très prometteuses grâce aux progrès de la recherche en ingénierie

 

Bilan et perspectives des allogreffes massives après 25 ans d’utilisation

DELLOYE C (Bruxelles)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2010, vol. 9 (2), 048-051

Résumé
Depuis 1985, nous implantons une allogreffe osseuse massive en cas de perte de substance osseuse de plus de 3 cm. Le registre des greffes utilisées dans le service entre 1985 et 2007 a été analysé. 180 greffes ont été analysées chez 153 patients avec un recul minimum de 24 mois. Par allogreffe massive, nous entendons une allogreffe osseuse prélevée stérilement chez un donneur d’organes et conservée à -80°C. Elle est appelée massive lorsqu’elle remplace un segment circulaire d’un os long ou une hémi-épiphyse. Les indications les plus fréquentes sont les tumeurs osseuses, les révisions de prothèse compliquée et les séquelles traumatiques pour les articulations. Elles comprennent les insertions capsulaires et tendineuses et sont utilisées comme réplique de la zone déficiente.
Les allogreffes non articulaires ont été implantées en grande partie au membre inférieur tandis que les greffes ostéoarticulaires ont été plus volontiers implantées au membre supérieur.
La chirurgie comportant une reconstruction du squelette avec une allogreffe massive est lourde et reste grevée d’un certain nombre de complications qui ont nécessité une reprise chirurgicale chez 54 % des patients. La pseudarthrose est de loin la complication la plus fréquemment observée avec une prévalence de 29% (52/180). La fracture ou la fissuration d’une allogreffe est la deuxième complication par ordre de fréquence avec une prévalence de 15,5 % (28/180). Ces deux complications ne sont pas nécessairement synonymes de reprise chirurgicale car elles peuvent bien tolérées ou asymptomatiques. L’infection reste une complication potentiellement redoutable mais qui est restée limitée à 6 % (11/180).
Nous pensons qu’en 2010, les allogreffes osseuses restent nécessaires dans l’arsenal thérapeutique du chirurgien. En effet, elles peuvent restaurer l’anatomie du patient dans les cas complexes (pelvis, cheville, coude) avec ou sans prothèse. Elles facilitent le travail du chirurgien par les insertions capsulaires et tendineuses laissées sur la greffe. Elles autorisent la locomotion sans aide de marche dans la grande majorité des cas. Il faut cependant connaître leurs limites pour minimiser les complications potentielles : montage rigide, ajustement millimétrique, addition d’autogreffe spongieuse. Un dernier aléa est leur disponibilité dans les banques qui en France, reste confidentielle.
Les perspectives sont dominées par deux pôles : la navigation computérisée qui permettra une découpe précise de la greffe osseuse et la thérapie cellulaire qui rend possible l’amplification de cellules souches autologues sans ajout de facteurs de croissance.

 

Bilan des prothèses de disque lombaire après 9 ans : place actuelle et perspectives

LE HUEC JC (Bordeaux)

 

Reproduction de l’hyperflexion du genou natif avec les prothèses de genou

MASSIN P (Paris)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2010, vol. 9 (1), 078-082

Résumé
L’hyperflexion du genou commence au dessus de 130°, la ou le secteur de flexion active se termine et ou le secteur de flexion passive commence. C’est un secteur utile dans certaines circonstances et chez certaines personnes, comme par exemple celles qui doivent s’assoir par terre, sur leurs talons. La prothèse totale de genou ne permet de récupérer ces secteurs d’hyperflexion mais elle limite aussi souvent le secteur de flexion active, ce qui peut être gênant dans de nombreuses activités quotidiennes, comme par exemple faire du vélo, monter des escaliers avec des marches hautes ou se lever d’un siège très bas.
Le secteur de la flexion active est limité par le conflit survenant entre le rebord postérieur du plateau tibial médial et la corticale postérieure du fémur, conflit renforcé par l’interposition de la corne postérieur du ménisque médial dans le genou sain et le rebord du polyéthylène tibial dans les prothèses 1. Ce conflit est retardé si l’on respecte le débord condylien postérieur et la pente tibiale lorsqu’on reconstruit le genou, et si l’on est capable de reproduire la cinématique du genou natif, à savoir le recul condylien notamment du condyle latéral en haute flexion 2. Toutes les prothèses ne le permettent pas. En dehors de ces conditions techniques, la récupération d’une haute flexion active suppose que l’appareil extenseur soit souple, ce qui élimine par exemple les raideurs préopératoires chroniques. Mais lorsque les conditions sont respectées, on peut espérer obtenir une haute flexion, notamment avec des prothèses fémorales avec un dessin particulier (Hyperflex), prolongeant la surface articulaire postérieure des condyles au prix d’une recoupe postérieure osseuse des condyles fémoraux (généralement entre 3 et 5 mm selon les marques). Les études comparatives ont montré que le gain de flexion obtenu avec ces prothèses était effectif uniquement chez les patients ayant une flexion préopératoire comprise entre 90 et 120°, et en l’absence de flexum préopératoire 3. Il est important de noter que, dans ces études, les patients avec une excellente flexion préopératoire, c’est-à-dire supérieure à 120°, peuvent tous perdre de la flexion après leur opération et cela quelque soit le modèle de prothèse utilisé (Hyperflex ou conventionnel) 3.
Récupérer l’hyperflexion dans un secteur passif (au delà de 130°) est un autre problème. Le mécanisme de cette hyperflexion a été étudié depuis peu à l’aide de l’IRM dynamique. Il suppose un soulèvement du condyle médial qui perd le contact avec la glène médiale en raison du conflit postérieur, et une subluxation postérieure du condyle latéral en arrière de la glène latérale 4. Ce mouvement suppose une rotation latérale axiale du fémur sur le plateau tibial, résultant d’une avancée du condyle médial et d’un recul du condyle latéral. Ce mécanisme, très subtil, permet au sujet agenouillé de se relever en s’appuyant sur le condyle médial qui reprend contact avec sa glène, ce qui ne serait pas possible si les deux condyles étaient subluxés en arrière de leurs glènes respectives. De plus, il diminue les pressions fémoro-patellaires grâce au recul du condyle latéral sur lequel s’appuie principalement la patella en forte flexion. Ce mécanisme, supporté par le genou natif intact suppose un appareil capsulo-ligamentaire intact, le recul du condyle latéral étant assuré par le muscle poplité qui se tend en flexion, mais limité par la tension du ligament croisé antérieur. Le retour vers l’avant du condyle latéral lors de l’extension est assuré par le ligament croisé antérieur. Quant au maintien vers l’avant du condyle médial, qui joue un rôle de pivot médial, il suppose une mise en tension du ligament croisé postérieur. Or ces deux structures, constituant le pivot central sont détruites ou fortement altérées au cours de la pratique d’une prothèse totale de genou. De plus, il est difficile d’imaginer un conflit entre l’insert en polyéthylène et la corticale postérieure fémorale soulevant le condyle médial, en raison des forces de descellement exercées sur l’interface de fixation et de l’usure de l’insert qui en résulteraient. Enfin les études cinétiques ont bien montré que les prothèses ne pouvaient reproduire toute l’amplitude de ce mouvement asymétrique des deux condyles en forte flexion, c’est-à-dire que la rotation externe axiale est diminuée par rapport au genou sain 5, ce qui peut faire craindre des pressions fémoro-patellaires excessives.
C’est pourquoi l’hyperflexion au-delà de 130° en l’état actuel de nos implants ne peut être espérée qu’avec des implants unicompartimentaux latéraux ou fémoro-patellaires avec un pivot central intact. L’hyperflexion ne peut et ne doit pas être obtenue avec les prothèses semi-contraintes conventionnelles avec ou sans conservation du ligament croisé postérieur, au risque de limiter a durée de vis de l’implant. L’ensemble des études cliniques montrent que les gains de flexion obtenus après arthroplastie totale de genou diminuent avec l’amplitude de flexion préopératoire 6. D’une façon générale ce sont les patients avec la meilleure flexion préopératoire qui ont en moyenne le gain de flexion le moins important, avec parfois une perte de flexion pour les genoux les plus souples, ce dont les patients doivent être prévenus.

 

L’aide auditive implantable. Consensus et controverses.

MAGNAN J, LAVIELLE JP, MELLER R, DEVEZE A (Marseille)

Résumé
L’implantologie moderne au niveau de l’oreille a acquis droit de cité, il y a une trentaine d’années avec l’implant cochléaire pour pallier les déficits auditif et phonatoire des surdités profondes.
Depuis cette biotechnologie implantable s’est étendue de part et d’autre de l’oreille interne vers les noyaux cochléaires avec l’implant auditif du tronc cérébral, vers l’oreille moyenne pour des hypoacousies sévères.
Ainsi l’oreille est devenue le lieu d’un véritable concours Lépine de l’ingéniosité.
A la lumière de notre expérience et de la réunion de consensus que nous avons organisée en juin 2007 « on auditory implants » nous envisagerons la place respective au sein des techniques de réhabilitation de l’audition :
-des implants cochléaires,
-des implants du tronc cérébral,
-des implants d’oreille moyenne,
de leurs limites actuelles et des développements à espérer dans un futur proche.