Séance du mercredi 29 avril 2015

COMMUNICATIONS LIBRES
14h30-17h00, Les Cordeliers
Présidence : Georges MANTION

 

 

Introduction de la séance

 

1er prix parcours de cancérologie 2014 : Prix des Mastères de chirurgie / Fondation de l’Avenir Aude MERDRIGNAC (Rennes) : Identification et caractérisation de T-LINC 1, un ARN non codant de longue taille régulé par le TGFβ dans le cholangiocarcinome intrahépatique. (tuteurs : Cédric COULOUARN-Inserm Rennes, Laurent SULPICE-CHU Rennes)

MERDRIGNAC A, COULOUARN C, SULPICE L (Rennes)

Résumé
Le cholangiocarcinome intrahépatique (CCI) est caractérisé par un mauvais pronostic, des options thérapeutiques limitées et une mauvaise connaissance des mécanismes impliqués dans sa cancérogenèse. Il a été démontré récemment qu’une surexpression de TGFβ dans le stroma du CCI est corrélée à un mauvais pronostic, suggérant une implication de la voie TGFβ dans la progression du CCI.
L’objectif de notre travail était d’étudier le rôle de la voie TGFβ et de ses gènes cibles, dont les longs ARN non codants, dans la cancérogenèse du CCI.
Les signatures d’expression génique associées au TGFβ ont été établies dans des lignées cellulaires de CCI (HuCCT1 et Huh28). La dérégulation de plusieurs gènes cibles de la voie TGFβ a été validée par RT-PCR, dont T-LINC1, un long ARN non codant dont la fonction était complètement inconnue. In vitro, T-LINC1 est induit par le TGFβ dans les lignées de CCI. Il a été localisé dans le cytoplasme, mais également dans des corps nucléaires particuliers évocateurs de paraspeckles. L’analyse transcriptomique après modulation de T-LINC1 a montré que T-LINC1 pourrait être un régulateur de NEAT1 dans la réponse immunitaire médiée par l’IL8 en agissant au niveau des paraspeckles. In vivo, l’étude du profil d’expression de CCI humains a montré que T- LINC1 est surexprimé dans les cholangiocytes tumoraux.

Commentateur : Laurent SULPICE (Rennes)

 

Gastrectomie à 95 % totalement laparoscopique : description technique
95% (Near Total) Oncolologic Laparoscopic Gastrectomy for Gastric Cancer: Technique, Advantages and Indications

AZAGRA JS, ARRU L, GOERGEN M, ORLANDO GG, SANCHEZ RAMOS A Service de chirurgie générale et mini-invasive - Centre Hospitalier de Luxembourg – Luxembourg
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2015, vol. 14 (4), 014-020

Résumé
La gastrectomie totale est le traitement de référence pour les tumeurs de la région medio-gastrique et cancers à cellules indépendantes. L’abord laparoscopique est progressivement employé pour la résection des tumeurs invasives, chez des patients sélectionnés et offre des résultats encourageants, quand il est réalisé par des mains expertes.
Dans l’optique de réduire la morbidité liée à l’anastomose oeso-jéjunale, des auteurs japonais ont développé le concept de gastrectomie à 95 %, qui prévoit la conservation d’un petit moignon gastrique d’environ 2 cm, avec résection complète du fundus gastrique et un curage complet des relais ganglionnaires péri-cardiaux.
Le concept de la gastrectomie à 95 % repose sur une diminution du risque de fistule anastomotique et de ses conséquences parfois létales, tout en respectant les critères oncologiques, notamment des marges de résection proximales suffisantes.
Nous décrivons notre technique de gastrectomie à 95 % entièrement laparoscopique avec curage ganglionnaire D2 qui, à notre connaissance, n’a jamais été documentée auparavant.

Commentateur : Philippe LASSER

Abstract
Total gastrectomy is the standard treatment for tumors arising in the proximal stomach and of diffuse type cancer with "signet-ring cell". The laparoscopic approach is progressively used for the resection of invasive tumors, providing encouraging results when employed in selected patients, by experienced surgeons.
In order to reduce the morbidity associated with the esojejunal anastomosis, some Japanese authors have developed the concept of 95 % gastrectomy in the early eighties, which keeps a small gastric stump of 2 cm with the improvement of the early surgical outcomes. Unlike the 7/8 gastrectomy, the 95 % gastrectomy allows the complete resection of the gastric fundus and a complete dissection of lymph node stations 1 and 2. In selected patients, the 95 % gastrectomy could offer the best short-term results and a better quality of life while respecting the actual oncologic criteria regarding proximal resection margins.
We describe below our technique of full laparoscopic 95 % gastrectomy, with D2 lymphadenectomy, to our knowledge never documented before.

 

La pathologie rachidienne complexe du sujet âgé : scoliose lombaire dégénérative et déséquilibre sagittal. Mise au point

ABI LAHOUD G (Paris)

Résumé
La déformation rachidienne est une pathologie fréquente (60% après 60 ans). C’est un processus complexe et dynamique dont la prise en charge est de plus en plus spécialisée et évolutive.
La perte de la lordose lombaire associée à l’augmentation de la cyphose dorsale est un phénomène qui accompagne le processus de vieillissement. Il impose des processus d’adaptation et de compensation (augmentation de la version pelvienne, flessum des genoux, hyperextension des hanches, hyperlordose cervicale), dont le but est de maintenir la tête au-dessus du bassin et le regard horizontal. Ces mécanismes de compensation sont consommateurs d’énergie et donc douloureux.
Cette pathologie a profité des avancées technologiques dans différents domaines de la médecine (stéréoradiographie EOS, matériel d’instrumentation, biologie moléculaire…).
La compréhension de l’histoire naturelle de la dégénérescence rachidienne et la connaissance de la biomécanique rachidienne ainsi que des paramètres pelviens et rachidiens est primordiale afin d’éviter un traitement chirurgical sous-optimal qui aboutirait à un déséquilibre rachidien dans le plan coronal et surtout sagittal. Le maintien ou le rétablissement d’un équilibre sagittal influe de manière déterminante et positive sur la réussite de la chirurgie et par conséquent sur la qualité de vie.

Commentateur : Philippe BANCEL

 

Abords vidéo-assistés dans les malformations génitales des enfants

DRAGHICI I (Bucarest)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2016, vol. 15 (2), 001-006

Résumé
Reconnaître l’approche laparoscopique comme une solution privilégiée dans le traitement chirurgical des patients pédiatriques ayant des malformations génitales. Puisqu’il ne s’agit pas d’interventions standardisées, il est important pour le chirurgien d’évaluer les risques et les bénéfices de la technique vidéo-assistée dans chacun des cas cliniques. En Roumanie, les chirurgiens gynécologues hésitent à intervenir, déclinant leurs compétences en matière de patients pédiatriques et préfèrent opérer des patients adolescents et adultes.
Nous présentons deux cas de malformations génitales rares chez des patients pédiatriques, les premiers de ce type résolus dans notre pays par la chirurgie vidéo-assistée. Le premier est une hystérectomie laparoscopique, complétée par une orchidopexie bilatérale sur un garçon de six ans, dont le diagnostic était celui de cryptorchidie bilatérale associée à un reliquat de col utérin. Le deuxième cas a concerné une fille de onze ans, souffrant d’agénésie du col de l’utérus et d’utérus bicorne; on a pratiqué une plastie néo-cervicale utérine vidéo-assistée sous laparoscopie, avec un abord bipolaire abdomino-vaginal.
La difficulté des interventions vidéo-assistées consiste dans l’accomplissement de façon mini-invasive des techniques de chirurgie gynécologique, en conservant entièrement l’intégrité et la fonctionnalité des différentes sections de l’appareil génital chez l’enfant.

Commentateur : Philippe MONTUPET

 

Cholécystectomie laparoscopique au Mali. État de la pratique à Bamako en 2012 : 340 cas

SANGARE D, CAMARA M, SANOGO ZZ, KOUMARE S, SACKO O, KEITA S, CAMARA A, TRAORE D, GOITA D, TOGO S (Bamako)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2015, vol. 14 (3), 072-076

Résumé
But : faire le bilan de la pratique de la cholécystectomie laparoscopique depuis l’introduction de la cœliochirurgie au Mali.
Patients et méthodes : il s’agissait d’une étude rétrospective descriptive sur une période de 11 ans dans le service de chirurgie générale et laparoscopique du CHU du POINT G à Bamako au Mali. Ont été inclus dans l’étude tous les malades diagnostiqués et opérés par laparoscopie pour cholécystite lithiasique dans le service. Les cholécystectomies par voie de laparotomie (à l’exception des conversions) n’ont pas été incluses dans l’étude. Les patients ont été opérés par 4 chirurgiens séniors et 6 juniors formés par compagnonnage par le chef de service.
Résultats : trois cent quarante (340) malades ayant bénéficié d’une cholécystectomie par voie laparoscopique ont été recensés sur 1345 interventions de cœliochirurgie, soit une fréquence de 25,28 % de l’ensemble des activités de cœliochirurgie. L’âge moyen des patients était 45 ans. L’indice de masse corporelle (IMC) était supérieur à 25 Kg/m2 pour 47,4 % des patients. Le mode de révélation de la cholécystite lithiasique a été brutal dans 61 % des cas. Le siège le plus fréquent de la douleur était l’hypochondre droit (79,1 % des cas). Une tare drépanocytaire était retrouvée chez 78 patients (22,9 % des cas). La répartition selon la classe ASA montre 253 malades de classe ASA I (74,4 %).
La vésicule biliaire était adhérente aux structures de voisinage dans 45,3 % des cas (154 malades. Les adhérences ont été source de difficultés opératoires dans 179 cas (52,6 %).
Une conversion en laparotomie a été faite chez 18 patients (5,3 % des cas). Les causes de conversion se résumaient en lithiases de la voie biliaire principale (12 cas), adhérences fortes (5 cas), hémorragie importante du lit vésiculaire (1 cas). 3 cas (0,9 %) de blessure accidentelle d’une artère pariétale par pointe de trocart dans l’hypochondre droit ont été enregistrés.
La durée moyenne de l’intervention a été de 66 min.
La durée moyenne d’hospitalisation post opératoire a été de 2 jours.
Les suites opératoires ont été simples pour 320 malades (94.11 %). Aucune infection du site opératoire n’a été observée.
Les complications post opératoires ont été observées chez 20 patients (5.88 % des cas) : chirurgicales dans 2 cas (0.60 %) de plaies de la voie biliaire traitées par suture et médicales 18 cas (5.29%) : 15 cas (4.4 %) en rapport avec la drépanocytose ,3 cas divers (0.88%)
Quatre de ces patients sont décédés (1,2 %) : embolie pulmonaire, hémorragie digestive, insuffisance rénale aigue. Aucun décès n’était imputable à la technique.
A un mois aucun malade ne se plaignait d’un symptôme. Sur 157 patients opérés depuis plus de 5 ans seuls 83 ont été retrouvés. Il n’y a pas eu d’éventration sur l’orifice de trocart chez aucun de ces malades.

Commentateur : Jean-Gabriel BALIQUE

 

Les chirurgiens et la politique

FABRE A

Résumé
De tout temps, les chirurgiens, malgré le poids de leurs responsabilités ont été fascinés par la politique : comment ne pas s'intéresser aux institutions qui régissent leurs activités et en conditionnent l'avenir ? Cette participation à la vie politique a revêtu les aspects les plus divers : engagement dans un parti politique, une organisations professionnelles ou, simplement, convictions électorales.
Un rappel des grands chirurgiens politiciens du passé permettra de mieux comprendre l'évolution actuelle .
Galerie des chirurgiens politiciens
Temps anciens
Il faut citer ici Démocédès, grand ancêtre du VIème siècle AJC : le roi Darius en reconnaissance de ses talents de chirurgien en fit son conseiller politique.
Bien des siècles plus tard, Jean Héroard (1551-1628) médecin des rois et en particulier de Louis XIII enfant, sut montrer une grande habileté politique dans ses négociations entre catholiques et protestants.
Georges Mareschal (1658-1738) chirurgien et conseiller politique du roi Louis XIV fut le fondateur de l'Académie de chirurgie
Epoque moderne
Hippolyte Larrey (1808-1895) fils du chirurgien de Napoléon, fut, comme son père chirurgien militaire mais en menant de pair une carrière politique de député.
Eugène Doyen (1859-1916) le plus brillant des chirurgiens de son temps, voulut tenter, comme son père, chirurgien maire de Reims, l'aventure politique en se présentant sous l'étiquette du "Parti Républicain social" mais manqua de quelques voix son élection.
Samuel Pozzi (1846-1918) chirurgien "surdoué" et précurseur dans bien des domaines, présida l'Académie de chirurgie en 1899
Monde contemporain
Jean François Mattei, professeur de pédiatrie et de génétique, a fait une carrière politique brillante à l' l'U M P en tant que député et ministre de la Santé
Alain Calmat, ancien patineur artistique et militant socialiste devenu chirurgien des hôpitaux, député et ministre.
Ben Carson, le plus célèbre neurochirurgien des Etats Unis entré depuis sa retraite dans l'arène politique pour y défendre comme militant Républicain, les valeurs morales traditionnelles.
Christian Cabrol, chirurgien cardiaque de renommée mondiale, membre honoraire de l'Académie de chirurgie depuis 1994, fut conseiller municipal de Paris pour l'U MP et député européen de 1994 à 1999
Les chirurgiens politiciens en France et dans le monde
En France : Au plan national, le nombre des chirurgiens exerçant une responsabilité politique est, à présent, limité à 10 : Bernard Accoyer, Alain Calmat, Jérôme Cahuzac, Jean-Louis Bernard, Jacques Domergue ,Jean Grenet, Dominique Riquet, Claude Leteurtre, Jean Michel Dubernard et Bernard Debre. Leur domaine d'activité est : chirurgie générale (3), urologie (2), chirurgie cervico-faciale, digestive, esthétique, orthopédique et transplantations d'organes (1). Les partis politiques concernés sont : parti radical (2), socialiste (2), U MP- U DF (6). Trois d'entre eux ont une fonction Universitaires.
Sur le plan des responsabilités municipales : en 2014, sur les 36 667 maires de France, 387 étaient docteurs en médecine et parmi eux, 11 chirurgiens.
A l'Assemblée nationale, parmi les 27 représentants des professions médicales, ne siégeaient en 2012 que deux chirurgiens : Bernard Debré et Philippe Vitel
Au Sénat aucun chirurgien n'était listé en 2013, parmi les 12 sénateurs médecins
Dans le monde occidental : Aux Etats Unis, 5 chirurgiens siègent parmi les 20 représentants de la profession médicale au Congrès : 2 chirurgiens orthopédistes, 2 chirurgiens thoraciques et un chirurgien généraliste. Au Senat des Etats Unis, un seul chirurgien : John Barrasso, chirurgien orthopédique. En ce qui concerne l'Europe et le Parlement européen aucune donnée n'est à présent disponible sur la représentation électorale des chirurgiens.
En Extrême Orient : Plusieurs noms de chirurgiens politiciens sont à citer : en Chine : Qiu Fazu, pionnier de la transplantation hépatique, au Japon : Tsutomu Tomioka, représentant du Parti Libéral et aux Indes, Rajasekhara Reddy, chirurgien orthopédique et premier ministre d'Andra Pradesh, disparu dans un mystérieux accident d'hélicoptère.
On peut évaluer à une centaine le nombre des chirurgiens politiciens en exercice à travers le monde. On notera l'absence de représentants politiques de haut niveau parmi les très nombreuses femmes chirurgiens en activité.
Les chirurgiens face à la politique
Le vote des chirurgiens : Peu d'études sont disponibles en France sur les tendances électorales des chirurgiens mais aux Etats Unis un sondage récent fait apparaitre, parmi les chirurgiens, 70.2% de supporters du parti Républicain, classé "parti conservateur "
Les chirurgiens politiciens : Il s'agit en règle du "parcours" local d'un chirurgien devenu maire de sa ville. Le parcours national de chirurgiens tels Carrel, Pozzi, Augagneur appartient sans doute au passé. A l'heure actuelle, deux chirurgiens seulement siègent à l'Assemblée nationale.
La politique face à la chirurgie : Le profil des chirurgiens et, dans le même temps, des politiciens a considérablement changé en un demi-siècle : le nombre des vocations chirurgicales est en baisse, la nouvelle génération des politiciens est fortement marquée par leur passage à l'ENA. Le poids du régime d'assurance maladie est de plus en plus lourd dans la gestion des actes chirurgicaux. Les chirurgiens pourront ils longtemps garder leur indépendance ?
Commentaires personnels : Les électeurs votent ils pour un homme ou un parti ? Le chirurgien a-t-il une influence politique en dehors de sa circonscription ? En fin de compte, les chirurgiens peuvent-ils devenir de vrais politiciens ?
Conclusions : La politique n'est plus un luxe, mais question de survie pour les chirurgiens . Inéluctablement, l'exercice de la chirurgie va de plus en plus s'associer à celui de la politique. Chirurgiens et politiciens sont condamnés à vivre et travailler ensemble.

Commentateur : Michel GERMAIN