L. latine 212.  >
À Thomas Bartholin,
le 29 septembre 1662

[Ms BIU Santé no 2007, fo 115 ro | LAT | IMG]

Au très distingué Thomas Bartholin, docteur en médecine à Copenhague.

Très distingué Monsieur, [a][1]

Par M. Wormius, [2] j’ai reçu votre fort agréable lettre datée du 29e d’août, qui répondait à ma précédente ; mais depuis un mois que votre paquet m’est parvenu, j’en ai écrit d’autres, tant pour vous en remercier que pour vous avertir de la très rude maladie de M. Flescher, qui est une dysenterie. [1][3] Sa santé s’affermit de jour en jour : la dysenterie a entièrement cessé, [4] mais il subsiste une diarrhée qui vide très louablement un corps si empli d’une grande quantité d’excréments divers. Vous connaissez l’axiome d’Hippocrate : a dysenteria diarrhœa[2][5] Après que le corps aura été purgé d’une telle inondation, j’espère qu’il se rétablira et recouvrera un meilleur état. Il lui sera alors permis de penser à rentrer dans son pays ; mais il est imprudent d’y songer plus tôt car la maladie ne l’a pas encore quitté ; et quand elle sera terminée, il faudra rétablir sa vigueur et s’appliquer à rénover ses forces [3] en utilisant le lait d’ânesse et d’autres analeptiques. [4][6][7] Par ma dernière, je vous demandais, si vous envoyez quelque chose en France, de ne pas oublier votre traité de Paralyticis N.T., l’opuscule de Cornaro, [8] vos Epigramma, vos Disputationes medicæ de pleuritide, de variolis, de secundinis, et le premier Spicilegium, in‑4o ; [5] mais vous, en récompense de tant de bienfaits, indiquez-moi ce que vous voulez que je vous envoie de notre France. Notre querelle avec le pape fleurit encore et elle ne peut, dit-on, être arrangée si facilement ni si promptement. [9] Vive et vale et aimez-moi, très éminent Monsieur, et saluez de ma part tous vos frères, [10] ainsi que M. Scavenius, jurisconsulte que je connais. [6][11]

De Paris, le 29e de septembre 1662.

Votre Guy Patin de tout cœur.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a envoyée à Thomas Bartholin, ms BIU Santé no 2007, fo 115 ro ; lettre imprimée dans Bartholin c, en post-scriptum de l’Epistola xxxiii, Centuria iv (pages 150‑151, 20 septembre 1662), qui correspond à la lettre latine 211 de notre édition.

1.

Lettre de Thomas Bartholin, datée du 29 août 1662, qui répondait à celle de Guy Patin le 25 mai précédent. Depuis lors, la maladie du Danois M. Flescher à Paris (v. note [6], lettre latine 209), déjà relatée par Patin dans celles du 14 septembre et du 20 septembre, augmentait la cadence de leur correspondance, ce qui fait bien percevoir le décalage que la distance et le temps créaient entre leurs propos.

2.

Aphorismes d’Hippocrate (no 76, 7e section), Επι διαρροιη δυσεντεριν, qu’on a interprété de deux façons contraires (selon le sens donné à épi, en tête ou à la suite de) : « La diarrhée succède à la dysenterie » (comme ici), ou « La dysenterie succède à la diarrhée ».

3.

Neoterismus est un hellénisme tiré de νεωτερισμος, penchant pour les nouveautés, innovation, révolution (Bailly).

4.

Analeptique (Trévoux) :

« Restauratif, médicament propre à rétablir le corps consommé et atténué, ou par la longueur de quelque maladie, ou par le défaut de nourriture. {a} Instaurativus. Ce mot vient du grec, dérivé d’analambanein, qui signifie rétablir, restaurer, refaire. » {b}


  1. C’est-à-dire procurer l’analepsie : v. note [15], lettre 449.

  2. Le lait d’ânesse (v. note [3], lettre 153) était alors l’analeptique le plus en vogue chez les convalescents.

5.

V. notes :

6.

Scaven dans le manuscrit, corrigé en Scavenium dans la lettre imprimée (Peder Lauridsen Scavenius, v. note [1], lettre latine 46).

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 115 ro.

Cl. Viro Thomæ Bartholine, Med. Doctori, Hafniam.

Suavissimam tuam accepi, Vir Cl. per D. Wormium, 29. Aug. datam,
priori meæ responsoriam : sed à mense et ab accepto tuo fasciculo alias scripsi,
tum ut Tibi gratias agerem, tum ut monerem Te de morbo acerrimo, nimirum
affectu dysenterico, D. Flechem, cujus melior valetudo in dies firmatur ; dysen-
teria planè cessavit, adhuc tamen remanet diarrhœa, quæ corpus tam multis
ac varijs excrementis refertum felicissimè deplet. Nosti axioma Hipp. à dysenteria
diarrhœa.
Postquam fuerit tanta eluvie corpus repurgatum, spero futu-
rum ut restituatur, ac in meliorem statum reducatur : tunc temporis cogitare
illi licebit de repetenda patria : nec antea tuta est cogitatio, quia nondum
fraxdesijt morbus, quó finito vires erunt reparandæ, et incumbendum neoterismo
per usum lactis asinini et aliorum analepticorum. Postremâ meâ rogabam Te, si
quid mittas in Galliam, ne omittas Tractatum tuum de Paralyticis N.T. ut
et libellum Cornari, Epigrammata tua, cum Disput. Medicis de Pleuritide, Variolis,
Secundinis, et Spicilegio primo : in 4.
Tu v. pro tot beneficijs indica mihi quod velis
ut mittam ex Gallia nostra. Dissidium nostrum cum Papa adhuc viget, nec
dicitur tam facilè aut tam citò componi posse. Vive, vale et me ama, vir præstan-
tissime, meóq. nomine Fratres illos tuos omnes, ut et D. Scaven, IC. mihi notum,
nomine meo saluta. Parisijs, 29. Sept. 1662. Tuus ex animo Guido Patin.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Thomas Bartholin, le 29 septembre 1662

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(Consulté le 28/04/2024)

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