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Consultations et mémorandums (ms BIU Santé  2007) : 5  >

[Ms BIU Santé no 2007, fo 239 ro | LAT | IMG]

Tiré de M. Moreau. [1][1]

Parotides et Dioscures (Castor et Pollux)
[mémorandum non daté] [a][2][3]

Les parotides jouent un grand rôle dans l’évolution des maladies. Certains les appellent les Dioscures, et sans doute est-ce parce qu’elles présagent l’issue favorable des maladies. [2][4] Voyez Cassius l’Iatrosophiste au problème xxx, et le commentaire qu’en a donné Gesner. [3][5][6][7] On donne aux parotides le nom de Dioscures parce qu’elles annoncent la résolution imminente de la maladie, tout comme on appelle Castor et Pollux, ou Dioscures, les étoiles jumelles dont l’apparition en n’importe quelle partie d’un navire est tenue pour annoncer une heureuse navigation ; ce qui fait dire à Pline, livre ii, chapitre xxxvii, au sujet des étoiles Dioscures, qu’on les tient pour salutaires quand elles apparaissent ensemble car elles annoncent alors une heureuse navigation ; quarum adventu fugari diram illam ac minacem Helenam ferunt, etc[4][8][9] Daléchamps parle ainsi de ce passage : Græci hoc meteoron vocant πολυδευχεα, Latini Castorem et Pollucem[5][10]

Quand les parotides commençaient à paraître, voire même in declinatione morbi[6][11] M. Marescot [12] disait qu’il fallait recommencer à saigner plus que jamais, et saigner en diable et demi. [13] M. Haultin en disait autant. [14] Je l’ai ouï dire à MM. Seguin, [15] de La Vigne, [16] et à M. Guillemeau[17] Voyez Botal au chapitre v de curandi ratione per sanguinis missionem[7][18][19]

Si Castor et Pollux apparaissent ensemble, elles annoncent et garantissent une heureuse navigation ; mais seules, c’est le contraire. Voyez les Aquæ nuptiales de Novarini, page 369. [8][20] Voyez Muret en ses variæ Lectiones, livre vi, chapitre ii[9][21][22][23]

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a.

Manuscrit autographe de Guy Patin ; Pimpaud, Document 5, pages 26‑28.

1.

Guy Patin a très probablement tiré ce texte non daté d’une leçon de son bien-aimé maître, René Moreau, professeur royal de médecine et chirurgie, mort en 1656 (v. note [28], lettre 6). Le style et le contenu ne sont pas ceux d’une consultation, mais ceux de notes prises en vue d’une utilisation ultérieure, comme une leçon académique ou une dispute d’acte universitaire.

Il est concevable et même probable, à mon avis, que les deux derniers paragraphes soient des additions de Patin.

2.

V. note [5], lettre 195, pour les deux grosses glandes salivaires qui portent aujourd’hui le nom de parotides, mot qui servait alors à désigner leur inflammation (qu’on appelle désormais parotidite).

Dans la mythologie, Castor et Pollux, les Dioscures (les deux jeunes garçons, kouroï en grec), sont les frères jumeaux nés des amours de Léda avec son mari, Tyndare, et avec Zeus ; mais rien n’étant jamais simple ni tout à fait avéré dans les mythes antiques, le Dictionnaire de Trévoux dit de Dioscures que :

« ce nom signifie enfants de Jupiter, dans le dialecte ionien. Cicéron, au 3e livre De natura Deorum, dit qu’il y avait trois différents Dioscures : les premiers étaient fils du roi Jupiter, le plus ancien des Jupiter, ils se nommaient Tritopatrée, Eubulée et Dionysius ; les seconds Dioscures étaient fils du troisième Jupiter et de Léda, c’étaient Castor et Pollux ; les troisièmes, selon quelques-uns, sont Aléon, Melampus et Emolus fils d’Arée, qui l’était de Pelops. »

Les Dioscures, Castor et Pollux, ont aussi servi à nommer :

3.

Cassii Iatrosophistæ Naturales et medicinales quæstiones lxxxiiii, circa hominis naturam et morbos aliquot, Conrado Gesnero medico Tigurino interprete, nunc primum editæ. Eædem Græce, longe quam antehac castigatiores, cum Scholiis quibusdam… [Soixante-quatorze questions naturelles et médicales de Cassius l’Iatrosophiste sur la nature de l’homme et quelques maladies. Publiées pour la première fois dans la traduction de Conrad Gesner, médecin de Zurich (v. note [7], lettre 9). Les mêmes en grec, plus correctes qu’auparavant, avec quelques notes…] (sans lieu [Zurich], ni nom [Jacobus Gesnerus], ni date [1562], in‑8o, latin et grec, e-rara, Zentralbibliothek Zürich ; première édition à Paris, 1541). Cassius l’Iatrosophiste est un « philosophe médecin » gréco-romain d’identité incertaine, décrit comme contemporain de Celse (ier s. de notre ère). Il est parfois confondu à tort avec Cassius Felix, écrivain du ve s., originaire de Numidie, probablement médecin, et l’auteur d’un abrégé en latin des savoirs médicaux grecs antiques concernant les maladies et leurs traitements, intitulé De Medicina, dont Anne Fraisse a procuré une édition (Les Belles Lettres, Paris, 2002), avec mes remerciements à Jacqueline Vons (v. note [4], lettre latine 474) qui m’a procuré ce renseignement.

Le problème xxx de Cassius l’Iatrosophiste (dont le livre pourrait être apocryphe) se trouve pages 13 vo‑14 ro :

Cur in declinationibus gravium morborum magna ex parte fiunt parotides, quas et Dioscoros vocant aliqui, [a fausto nimirum indicio] quod solutio ægritudinum instet ? Notum est in gravibus morbis appetitionem intercipi. Roborati vero iam ægri magis appetere incipiunt, et cum alimento copiosius utantur, maxillæ moventur, ex quarum motu dum cibum dividunt et mandunt, inflammatio nascitur, et eius impetuoso retro aures illapsu parotides efficiuntur.

[Pourquoi certains appellent-ils Dioscures les parotides qui apparaissent principalement au cours des maladies graves, disant (par heureux présage) qu’elles annonceraient la résolution du mal ? Il est notoire que les affections graves ôtent l’appétit ; mais quand les patients reprennent des forces, ils retrouvent l’envie de manger ; et comme ils s’alimentent plus copieusement, ils remuent les mâchoires pour couper et mastiquer la nourriture ; il en découle une vive inflammation dont la localisation, derrière les oreilles, provoque les parotides].

La scholia [note] de Gesner (pages 61 vo‑62 ro) porte sur Dioscuros vocant [appellent-ils Dioscures], disant des parotides :

Ab eo scilicet, quod morbi solutionem instare significent, sicut et Castores seu Dioscuri dictæ stellæ cum geminæ apparent, in aliqua navis parte, prosperi cursus prænunciæ habentur, etc. Vide Plinium lib. 2. cap. 37 vel nostrum de rebus noctu lucentibus libellum.

[La raison de leur survenue est qu’elles indiquent le début de la résolution de la maladie ; comme, quand apparaissent, en quelque endroit d’un navire, Castor et Pollux, {a} ou les étoiles jumelles qu’on appelle les Dioscures, on les tient pour les présages d’une heureuse traversée, etc. Voyez Pline, livre ii, chapitre xxxvii, {b} ou notre petit livre de rebus noctu lucentibus]. {c}


  1. Un feu Saint-Elme (v. supra note [2]).

  2. V. infra note [4].

  3. Chapitre intitulé De Stellis Castoribus [Les étoiles de Castor], pages 6‑10 de l’opuscule de Gesner « sur les choses qui brillent la nuit » (Zurich, 1555, v. note [11], lettre 322) ; attestant de la perplexité alors suscitée par les phénomènes électromagnétiques, on y lit, à propos du feu Saint-Elme (page 7) :

    Fit autem hic ignis in infima aeris regione, ex fumo pinguiore ac inflammabili, qui frigiditate aeris nocturni cogitur atque densatur. Incenditur autem ex concursu duarum contrarium qualitatum, quæ inter se pugnant. Vapor enim calidus est, et aer nocturnus frigidus. Concurrunt autem tantisper, donec hac agitatione vapor incendatur. Figitur autem pilis antennis ve navium propter ejus gravitatem, ubi tantisper hæret, donec incendii materia fuerit absumpta, Hæc Milichius. Quod si (ut ipse opino, et eruditorum plerique) per antiperistatin hæ flammæ ardent, non ex concursu duarum qualitatum, eas oriri proprie dicemus : neque enim inter sese utrinque obviæ tanquam aperto Marte concurrunt : sed fugit ceditque intra se altera, minus minusque loci subinde occupans, urgente undiquaque et obsidente eam foris altera tanquam hoste. Sic erinaceus non concurrit cum vulpe, quo se infirmiorem sentiat, sed in globum contractus suis munitur aculeis. Et exhalatio inclusa, sua iam densitudine tutior est. Inflammatur vero motu externo, ut ferrum impulsum ad silicem licet quiescentem, scintillas elicit.

    [Ce feu provient d’une vapeur fort épaisse et inflammable, que la froidure de l’air nocturne accumule et condense dans la couche inférieure de l’air. L’éclair est provoqué par la rencontre de deux qualités contraires qui s’affrontent : la brume qui est chaude, et l’air de la nuit qui est froid. L’une et l’autre s’entrechoquent jusqu’à ce que cette agitation enflamme la vapeur. Sa pesanteur l’attire sur les pointes des javelots ou sur les vergues des navires, où elle stagne jusqu’à s’y embraser, comme a dit Milichius (Jacob Milich, 1501-1559, naturaliste allemand). Si, comme il le pense, ainsi que de nombreux savants, ces flammes s’allumaient par antipéristase (antagonisme de deux actions), et non par la rencontre de deux qualités, nous dirions qu’elles naissent d’elles-mêmes, à proprement parler : elles ne seraient pas le fruit d’une lutte ouverte où elles s’affrontent l’une l’autre ; mais il s’agirait d’une poursuite, où l’une fuit l’autre, en occupant de moins en moins d’espace, l’une pressant et acculant l’autre de toutes parts comme un ennemi ; tout comme le hérisson n’affronte pas le renard, parce qu’il se sait moins fort que lui, mais se met en boule pour se protéger de ses piquants, échappant à la mort en se ramassant sur lui-même. En vérité, c’est un mouvement externe qui donne naissance au feu, comme le fer qui, bien qu’inerte, engendre une étincelle quand il est frappé par le silex].

4.

« on prétend même qu’elles font fuir Hélène, qui est une étoile funeste et menaçante, etc. » ; chapitre xxxvii, livre ii, Histoire naturelle de Pline l’Ancien (Littré Pli, volume 1, page 117) :

Existunt stellæ et in mari terrisque. Vidi nocturnis militum vigiliis inhærere pilis pro vallo fulgorem effigie ea ; et antennis navigantium aliisque navium partibus ceu vocali quodam sono insistunt, ut volucres sedem ex sede mutantes, graves, cum solitariæ venere, mergentesque navigia et, si in carinæ ima deciderint, exurentes, geminæ autem salutares et prosperi cursus nuntiæ, quarum adventu fugari diram illam ac minacem appellatamque Helenam ferunt et ob id Polluci ac Castori id numen adsignant eosque in mari invocant.

« Il se montre des étoiles dans la mer et sur la terre. J’ai vu, la nuit, pendant les factions des sentinelles devant les retranchements, briller à la pointe des javelots des lueurs à la forme étoilée. Les étoiles se posent sur les antennes et sur d’autres parties des vaisseaux avec une espèce de son vocal, comme des oiseaux allant de place en place. Cette espèce d’étoile est dangereuse : quand il n’en vient qu’une seule, elle cause la submersion du bâtiment ; et si elle tombe dans la partie inférieure de la carène, elle y met le feu. Mais s’il en vient deux, l’augure en est favorable : elles annoncent une heureuse navigation ; l’on prétend même que, survenant, elles mettent en fuite Hélène, c’est le nom de cette étoile funeste et menaçante. {a} Aussi attribue-t-on cette apparition divine à Castor et à Pollux, et on les invoque comme les dieux de la mer. »


  1. Ce passage correspond à la citation de Guy Patin.

    En astronomie moderne, aucune étoile ne porte le nom d’Hélène. C’est celui d’un satellite de la planète Saturne, découvert en 1980. Pour Littré DLF (qui parlait en maître quand il s’agissait de Pline), Hélène est le « nom donné anciennement à une variété de feu Saint-Elme. Castor et Pollux, en météorologie, est un météore igné [v. note [20] de la Leçon sur la Manne], qui paraît quelquefois en mer s’attacher à un des côtés du vaisseau, sous la forme d’une, de deux, ou même de trois ou quatre boules de feu ; lorsqu’on n’en voit qu’une, on l’appelle plus proprement Hélène. »

    Dans les mythes antiques, Hélène, fille de Zeus ou de Tyndare, roi de Sparte, et de Léda, et sœur ou demi-sœur de Castor, Pollux et Clytemnestre, était une funeste déesse : la plus belle des femmes, épouse de Ménélas, roi de Sparte, elle s’enticha du prince troyen Pâris (v. note [19], notule {d}, du Grotiana 1) ; la jalousie de Ménélas engendra la guerre de Troie.


5.

« Les Grecs appellent ces étoiles les Pollux, et les Latins Castor et Pollux » : note a (page 17, chaque livre ayant sa pagination propre) de Jacques Daléchamps dans son édition de l’Histoire naturelle de Pline (Lyon, 1587, v. note [2], lettre 75).

6.

« quand la maladie décline ».

René Moreau (ou, peut-être, plutôt Guy Patin) en venait aux oreillons : maladie virale, généralement bénigne, dont la principale manifestation est une parotidite bilatérale (parfois assortie d’une orchite [inflammation des testicules], d’une pancréatite ou d’une méningite, dites ourliennes).

Quand, au cours d’une fièvre, apparaissait une enflure des deux glandes parotides, c’était le signe d’une affection de bon pronostic qui allait bientôt guérir. L’atteinte d’une seule parotide était (et demeure) généralement plus fâcheuse : tumeur cancéreuse, ou obstruction lithiasique du canal salivaire excréteur (dit de Sténon, v. note [4], lettre latine 293) qui pouvait aboutir à une dangereuse abcédation.

Tout ce passage, mis en italique, est en français dans le manuscrit. J’y ai employé le romain pour les passages en latin.

7.

« sur la raison de soigner par la saignée », chapitre v, Posse sanguinem mitti, exanthematis, parotidibus, aut aliis criticis evacuationibus apparentibus [On peut saigner dans les exanthèmes, dans les parotides, ou dans les autres évacuations critiques visibles], du livre de Curatione per sanguinis missionem [sur le Traitement par la saignée] (Lyon, 1655, v. note [47], lettre 104) de Botal (pages 36‑37 et 41) :

Sunt igitur exanthemata exiguæ prominentiæ in cute, aut maculæ rubræ, vel pallidæ, vel purpureæ, vel subnigræ, interdum universam cutem obtegentes, interdum per eam modo densius, modo rarius disseminatæ, modo latiores, modo minutiores, et modo cutis planitiem nullo modo excedentes. Abscessus dicitur, quicquid ex defluxu materiæ transmissæ in aliquam corporis partem, aut ei inhæret, aut tumorem excitat, ut parotides qui sunt tumores iuxta aures, et bubones sub alis, et in inguinibus, aut carbunculi, et id genus alia […].

Quæ de exanthematis in defecta crisi emergentibus dicta sunt, eadem puta esse dicenda de parotidibus, bubonis, et aliis huiusmodi abscessibus praemature erumpentibus : nempe in iis expeditissimum esse sanguinem e vena mitti, dum scilicet illis prorumpentibus febris non inclinatur aut ingravescit, quod utilissimum in multis fuimus experti […].

[Les exanthèmes {a} sont donc des petites saillies de la peau, sous forme de macules rouges, pâles, pourpres ou noirâtres, qui parfois couvrent la peau tout entière, parfois la parsèment de manière dense ou éparse, soit fort larges, soit très petites, sans parfois s’élever du tout au-dessus du plan cutané. On appelle abcès tout afflux de matière qui se collecte dans une partie du corps, soit pour s’y fixer, soit pour provoquer la formation d’une tumeur, comme les parotides qui siègent à côté des oreilles, ou les charbons et bubons, sous les aisselles et dans les aines, et les autres tuméfactions de ce genre (…).

Ce qu’on dit des exanthèmes qui apparaissent avant l’éclosion de la crise {b} peut aussi être dit des parotides, des bubons et des autres abcès de cette sorte qui enflent trop tôt : il faut très rapidement saigner, car la fièvre ne déclinera pas, ou s’accentuera, tant qu’ils ne se seront pas ouverts pour se vider (…)].


  1. V. note [6] de la Consultation 19.

  2. V. note [3], lettre 228.

8.

R.P. Alosyi Novarini Veronensis, clerici regularis, Electa sacra, in quibus qua ex linguarum fontibus, qua ex variarum gentium ritibus aliqua sacrarum Litterarum loca aut novo explicatu donantur, aut nova luce vestiuntur : subque Nuptialibus Aquis ita de nuptiarum et aquarum nexu agitur, ut de nuptijs varia, varia de aquis varijs dentur…

[Morceaux choisis sacrés du R.P. Luigi Novarini, prêtre régulier natif de Vérone, {a} où soit on apporte une nouvelle explication à quelques passages des Saintes Écritures, soit on les revêt d’une nouvelle lumière, en puisant aux sources des langues ou aux rites de diverses nations ; et sous le titre des Eaux nuptiales, il est ainsi question du lien des noces et des eaux, avec diverses considérations sur les noces, et sur les eaux…] {b}


  1. V. note [46], lettre 166.

  2. Lyon, Laurentius Durant, 1640, in‑fo.

Le chapitre cxxxi, Quædam de navium tutelis, sacris illustrandis etiam ex non sacris afferuntur [Certains faits que rapportent les auteurs sacrés et même profanes sur les protections des navires] (pages 368‑370), commence par un long développement sur Castor et Pollux, où les propos de Pline (v. supra note [4]) sont rapportés et brièvement commentés (haut de la première colonne de la page 369, § 1319‑1320), avec ces remarques sur la manière ambiguë dont on s’est référé aux divins jumeaux, et sur la navigation maritime de l’Antiquité :

Suetonius in Caio Iulio Cæsare cap. 10. Ut enim geminis fratribus ædes in foro constituta tantum Castoris vocaretur, ita suam et Cæsaris magnificentiam unius Cæsaris dici : Hæc igitur navis Alexandrina qua Paulus vehebatur Castorum insigne præferebat, quia horum numinum imaginem referrebat, ut sub illorum tutela esse significaretur ; Addit Oecumenius hic hunc morem maxime observatum in navibus ; ait enim : Perpetuo moris est, navibus, præcipue Alexandrinis ad proram dextra, ac sinistra huiusmodi esse picturas : Intelligit παρασημον, nam loquitur de his de quibus Lucas. Procopius quoque in cap. ii. Isaiæ, post productum Lucæ locum, addit ; adpingebant semper in proris Deorum imagines.

[Suétone, chapitre 10 de la Vie de Jules César : « De même que, dans le forum, on appelait du seul nom de Castor le temple consacré aux deux frères, de même on devait attribuer à César seul la magnificence de César ». {a} Le navire alexandrin sur lequel voyageait saint Paul portait donc le nom de Castor, {b} parce qu’il était décoré d’une image de ces divinités, montrant ainsi qu’il était placé sous leur protection. L’Œcumenius ajoute ici que cette coutume était strictement observée dans la navigation, disant que : « L’habitude constante est de mettre ce genre d’images à bâbord et tribord de la proue des bateaux. » {c} Castor est un contresens car saint Luc en parle au pluriel. {d} Procope, au chapitre ii d’Isaïe, cite le passage de Luc et ajoute : « Ils peignaient toujours des images des dieux sur les proues »]. {e}


  1. Pour dire que César, étant consul, n’entendait pas partager sa célébrité avec son collègue Marcus Bibulus, qui devait se contenter de l’anonymat que Rome réservait à Pollux.

  2. Voyage de Malte à Rome relaté dans les Actes des Apôtres (28:11) : « Au bout de trois mois, nous prîmes la mer sur un navire qui avait hiverné dans l’île, c’était un bateau alexandrin, à l’enseigne des Dioscures. »

  3. L’Œcumenius est un recueil de commentaires grecs sur le Nouveau Testament.

  4. On a beaucoup discuté pour savoir s’il convenait de traduire le nom que saint Luc, auteur des Actes des Apôtres, avait donné au bateau de saint Paul, par le Castor, au singulier, ou par les Dioscures, au pluriel (v. supra note [5]).

  5. V. note [29], lettre 401, pour Procope, historien grec du vie s., qui a donné un commentaire du Livre d’Isaïe.

9.

V. notule {b}, note [43], lettre latine 154, pour les 15 livres de « Leçons diverses » de Marc Antoine Muret (Anvers, 1586) ; le chapitre xi (et non ii) du livre vi, intitulé Euripidem aliter, quam ceteros omnes, de Helenæ sidere locutum [Euripide a parlé de l’étoile d’Hélène autrement que tous les autres] (pages 147‑148) commence par ces phrases :

De sidere Helenæ non idem ab omnibus traditum est. Plinius quidem libro secundo naturalis historiæ, de eo, ut navigantibus exitioso, locutus est nam cum geminas illas flammas, quæ Castoris ac Pollucis esse putabuntur, salutares ac prosperi, cursu prænuncias esse dixisset : Harum, inquit, adventu fugari diram illam ac minacem, appellatam Helenam ferunt. Solinus quoque cum exposuisset multa mala, quæ menstruus mulierum efficeret cruor : Habet, inquit, plane id solum salutare, quod avertit sidus Helenæ perniciosissimum navigantibus. Papinius quoque idem de illis fulgoribus sentire se ostendit hoc versu :

………… cum iam damnata sororis
Igne Therapnæi fugerunt carbasa fratres.

Quinetiam Franciscus Vicomercatus Aristotelis Meteorologica exponens, et cur Castor ac Pollux salutares essent, et cur diri ominis Helena, caussas, ut in eiusmodi re, satis probabiles reddidit. At Euripides tamen in Oreste salutarem eam nautis esse pronunciat.

[Tous ne racontent pas la même chose au sujet de l’étoile d’Hélène. Au livre ii de son Histoire naturelle, Pline la dit être funeste aux marins, tandis que ces éclats jumeaux, qu’on pense être ceux de Castor et Polllux, sont de salutaires et heureux présages pour la traversée  : « Ils rapportent, dit-il, que leur apparition met en fuite cette étoile funeste et menaçante qui porte le nom d’Hélène. » {a} Solin {b} a dit la même chose en parlant des multiples malheurs qu’engendre le sang menstruel des femmes : « Il a seulement ceci de salutaire, qu’il protège les marins de la très malfaisante étoile d’Hélène. » Stace a exprimé le même avis sur ces éclairs en ces vers :

………… cum iam damnata sororis
Igne Therapnæi fugerunt carbasa fratres
. {c}

En outre, Francesco Vimercato, en son explication des Météorologiques d’Aristote, a expliqué, avec assez de vraisemblance, pourquoi Castor et Pollux étaient favorables, et pourquoi Hélène était de mauvais augure. {d} Euripide, dans Oreste, déclare cependant qu’Hélène est favorable aux marins]. {e}


  1. V. supra notule {a}, note [4].

  2. V. note [6], lettre 52.

  3. « quand l’étoile de leur sœur eut déjà condamné leurs voiles, les frères de Thérapné se sont enfuis » (Stace [v. note [3], lettre 1012], Thébaïde, livre vii, vers 792‑793). Hélène et ses deux frères, Castor et Pollux, étaient tous natifs de la ville de Thérapné, en Laconie.

  4. Francesco Vimercato (1512-1571), philosophe italien, professeur royal de philosophie grecque et latine : In quatuor libris Aristotelis Meteorologicorum Commentarii. Et eorundem librorum e Græco in Latinum per eundem conversio [Commentaires sur les quatre livres des Météorologiques d’Aristote. Avec la traduction du grec au latin qu’il en a donnée] (Venise, Domenicus et Io. Baptista Guerreus, 1565, in‑fo). Son avis sur Hélène, Castor et Pollux se trouve à la page 27 ro du livre i :

    Helenæ sydus submersionis fortasse nuncius est, quia nisi in gravibus accenditur tempestatibus, nec nisi crassissimo spiritu, et magna ventorum vi, halitus ille cogi potest, et accendi. Castoris vero et Pollucis lumina salutem portendunt, quod iam apparet frangi tempestatem, et desinere ventos : idque eis denunciatur fortasse, quod parva sint, et minime lenta ac crassa (siquidem si crassa et lenta essent, in unum coirent,) quodque brevi absumantur, quanquam falsa imagine saliendi, cum plura sint sibi succedentia, quorum alterum post alterum accenditur, duo referunt, ac interdum unum diuturnius. Hæc igitur portendi hunc in modum possunt.

    [L’étoile d’Hélène peut être annonciatrice de naufrage car, si elle ne déclenche pas de furieuses tempêtes, son exhalaison peut donner naissance à une brume très épaisse ou engendrer un vent de grande puissance. Au contraire, les lueurs de Castor et Pollux sont présages de salut, car leur apparition brise bientôt la tempête et apaise les vents ; et peut-être annoncent-ils cela parce qu’ils sont petits, plutôt légers et ténus (puisque, s’ils étaient lourds et denses, ils se réuniraient en un seul astre), et parce qu’ils brillent brièvement. Cette fausse apparence doit pourtant faire bondir : quand plusieurs événements se produisent, l’un survenant après l’autre, on en distingue deux, alors qu’il s’agit d’un seul et même phénomène persistant. Telle est la manière dont ces présages peuvent être portés].

    Soit une belle illustration du mélange existant alors entre astronomie et astrologie divinatoire.

  5. Suit la transcription en grec des vers 1635‑1637 de l’Oreste d’Euripide, à propos d’Hélène :

    « Fille de Jupiter, elle doit vivre immortelle. Assise dans les profondeurs du ciel, auprès de Castor et de Pollux, elle luira, propice aux marins. »


s.

Ms BIU Santé 2007, fo 239 ro.

Ex D. Moreau.

In declinationibus gravium morborum magna ex parte fiunt paro-
tides, quas et Dioscuros vocant aliqui, à fausto nimirum indicio, quod
solutio ægritudinum instet ? Vide Cassium Iatrosophistam, pro-
blemate 30.
et in illud, scholia Gesneri. Parotides dioscuri dicuntur,
ex eo quod morbi solutionem instare significent, sicut et Castor[es]
seu Dioscuri dictæ stellæ cùm geminæ apparent, in aliqua navis par[te]
prosperi cursus prænuntiæ habentur. Unde Plinius lib. 2. cap. [37.]
ubi de stellis Castoribus ait. Quum geminæ apparent salutares ha[ben-]
tur, et prosperi cursus prænuntiæ : quarum adventu fugari diram illam
ac minacem Helenam ferunt etc. In quem locum Dalecampius sic.
Græci hoc meteoron vocant πολυδευχεα, Latini Castorem et Pollucem.

Quand les parotides commençoient à paroistre, voire mesme in
declinatione morbi,
Mr Marescot disoit qu’il fallait recommencer à
saigner plus que jamais, et saigner en diable et demy. Mr Hautin
en disoit autant. Je l’ay ouy dire à Mess. Seguyn, de La Vigne, et à
M. Guillemeau. Vide Botallum de curandi ratione per sanguinis
missionem, cap. v.

Si Castor et Pollux simul appareant, felicem navigationem portendun[t]
atque prænuntiant : secus si solæ. Vide Novarini Aquas nuptiales, p. 369.
Vide Muretum in variis lectionibus, lib. 6 cap. ii.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits. Consultations et mémorandums (ms BIU Santé 2007) : 5

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(Consulté le 29/04/2024)

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