À Georg Friedrich Lorenz, le 10 décembre 1664
Note [4]
« confinant à l’œstrus » ; Juvénal (Satire iv, vers 123‑124) :
Non cedit Veiento, sed ut fanaticus œstro
percussus, Bellona, tuo divinat… [Veienton {a} ne reste pas en arrière ; comme un fanatique saisi par ton œstrus, ô Bellone, {b} il se met à vaticiner…]
Le sens premier d’œstrus est œstre ou taon, illustré par Virgile dans les Géorgiques (v. notes [7] et [8] du Borboniana 4 manuscrit).
La furie que la présence du taon peut provoquer chez les quadrupèdes (comme chez les bipèdes) a fait prendre à œstrus le sens de délire (prophétique ou poétique), ainsi que l’a plaisamment expliqué Rabelais (Gargantua, chapitre xliv) :
« Comme vous voyez un âne, quand il a au cul un œstre junonique {a} ou une mouche qui le poincte, {b} courir çà et là sans voie ni chemin, jetant sa charge par terre, rompant son frein et rênes, et ne sait-on qui le meut car l’on ne voit rien qui le touche. »
- Allusion à l’œstre que Junon envoya harceler Io que Jupiter avait transformée en génisse (v. note [4], lettre 795).
- Attaque.
Bien plus tard, la langue savante adopta œstrus pour désigner la période de l’ovulation chez les mammifères femelles, le temps des parades amoureuses, fureur génitale plus ou moins extériorisée selon les espèces et les individus. Il en est venu les œstrogènes (hormones provoquant l’œstrus) et le préfixe (œstro) de leurs dérivés.
Voilà pourquoi je n’ai pas voulu platement traduire œstrus par « délire ».