À Charles Spon, le 3 mai 1650, note 32.
Note [32]

Journal de la Fronde (volume i, fo 207 vo‑208 vo, 29 avril 1650) :

« Cependant les députés étant de retour du palais d’Orléans, rapportèrent que Son Altesse Royale avait répondu qu’elle n’y pouvait pas s’y trouver, disant que Mme la Princesse avait désobéi au roi et que le Parlement ne devait point toucher à sa requête jusqu’au retour de Leurs Majestés. Enfin tout le Parlement étant assemblé dans la Grand’Chambre pour la mercuriale, {a} M. le premier président fit sa harangue à l’ordinaire, dans laquelle néanmoins on remarqua qu’il s’étendit sur ce que la Compagnie avait été dans beaucoup de rencontres le refuge et l’asile des opprimés, et qu’elle devait aussi bien la justice aux grands qu’aux petits ; en quoi il parut assez porté à favoriser le dessein de Mme la Princesse. Après cela, la requête fut lue, par laquelle Mme la Princesse représentait les violences et mauvais traitements qui avaient été faits tant à elle qu’à Mme la Princesse sa fille qu’à Messieurs ses enfants par le cardinal Mazarin, abusant du nom et de l’autorité du roi ; et demandait qu’il plût au Parlement de la recevoir en sa protection et de lui nommer un lieu où elle pût être en sûreté dans Paris afin de pouvoir demander justice pour Messieurs ses enfants. Sur cela il fut arrêté qu’il serait sursis à faire droit sur la requête jusqu’au retour du roi et que les mêmes députés qui avaient déjà été chez M. le duc d’Orléans y retourneraient pour lui donner part de cette résolution, et le prier de vouloir donner un lieu de sûreté à Mme la Princesse en attendant le retour de Sa Majesté. Ces deux députés étant retournés au palais d’Orléans, et M. Payen des Landes ayant fait voir la requête à Son Altesse Royale, elle lui dit qu’elle s’étonnait fort de ce qu’il s’en était chargé après le refus de tant d’autres puisqu’il savait bien que Mme la Princesse s’était rendue criminelle, n’ayant pas voulu obéir aux ordres du roi ; et quant à la sûreté qu’ils prétendaient lui faire donner, il ne pouvait pas < y > consentir, attendu que cela choquait directement l’autorité du roi, mais qu’il assemblerait le Conseil pour délibérer sur ce qui était à faire, et qu’elle leur rendrait réponse à cinq heures du soir. Étant retournés au Parlement, ils y rendirent compte de ce que Son Altesse Royale leur avait dit, sur quoi l’on opina ; et presque toutes les voix allant à donner sûreté à Mme la Princesse jusqu’à ce qu’on pourrait délibérer sur la réponse du Conseil, l’on proposa divers lieux pour la mettre en sûreté et les premiers avis étaient de la mettre dans les Carmélites ; et sur cela M. Coulon {b} dit qu’il < la > fallait mettre en un endroit d’où elle ne pût pas se sauver en cas qu’elle ne réussît pas dans cette affaire, étant à craindre qu’elle n’apportât du trouble à l’État si elle pouvait gagner le chemin de Stenay. D’autres ayant été d’avis de lui envoyer demander en quel endroit elle désirait se mettre, cette opinion fut suivie ; à quoi elle fit réponse qu’elle serait bien aise s’il plaisait à la Cour que ce fût chez le président de Nesmond ou le président Viole ; sur quoi quelques-uns dirent à M. le premier président qu’elle serait mieux chez lui, mais il fut jugé à propos de ne la point mettre chez aucun président ; ce qui lui ayant été rapporté, elle fit instance pour être mise en quelque lieu en l’enclos du Palais, ce qui lui fut accordé à son choix, et elle fut logée dans la maison du sieur de La Grange, maître des comptes.

L’après-dînée, le Conseil s’étant tenu au palais d’Orléans, les mêmes députés y étant retournés le soir pour savoir la résolution de Son Altesse Royale, elle leur dit qu’elle ne pouvait consentir du tout qu’on donnât aucune protection à Mme la Princesse, mais qu’il fallait qu’elle se mît en résolution d’obéir aux ordres du roi, et qu’elle se retirât à Chilly {c}ou en quelque autre maison sur le chemin de Berry en attendant le retour de Leurs Majestés, pour marque qu’elle s’était mise en devoir d’obéir aux ordres du roi. Cependant elle fut fort visitée le soir de ce jour-là jusqu’à une heure après minuit. Ces visites furent encore hier continuées toute la journée. »


  1. V. note [6], lettre 252.

  2. V. note [39], lettre 294.

  3. Aujourd’hui Chilly-Mazarin (v. note [4], lettre 345).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 3 mai 1650, note 32.

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(Consulté le 29/04/2024)

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