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Résumé Séance Solennelle 20 janvier 2016 Académie de Chirurgie
Allocution du Président Georges MANTION
Mesdames, Messieurs, Je déclare ouverte la séance solennelle de l’Académie Nationale de Chirurgie. Je tiens d’abord à remercier les hautes personnalités qui nous honorent de leur présence : Son excellence Monsieur Amar Bendjama, Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire de la République Algérienne démocratique et populaire. Son excellence Monsieur Vincent Mertens de Wilmars, Ambassadeur du Royaume de Belgique. Son excellence Monsieur Paul Dühr, Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire du Grand-Duché de Luxembourg. Monsieur Domenico La Spina, Premier Conseiller à l’Ambassade de la République d’Italie, (représentant Son excellence Monsieur Giandomenico MAGLIANO). Monsieur RU Zhitao, Attaché scientifique à l’Ambassade de la République populaire de Chine, (représentant Son excellence Monsieur ZHAI Jun). Monsieur Eduardo Nazareno Muñoz, Chargé de la coopération scientifique à l'Ambassade de la République d’Argentine, (représentant SEM María DEL CARMEN SQUEFF). Monsieur Francisco Elías de Tejada, Conseiller Culturel à l’Ambassade du Royaume d’Espagne, (représentant Son excellence Monsieur Ramón de MIGUEL). Madame Le Thy Nguyen, Conseiller scientifique à l’Ambassade de la Confédération Suisse, (représentant Son excellence Monsieur Bernardino REGAZZONI). Son excellence Madame Luca NICULESCIU nous prie d’excuser son absence du fait la visite officielle du 1er ministre de la République de Roumanie.
Le Médecin Général Inspecteur François Pons, Directeur de l'École du Val de Grâce. Monsieur Jean-Louis Fousseret, Maire de la ville de Besançon. Le Professeur Pierre Bégué, Président de l’Académie nationale de Médecine, le Professeur Daniel Couturier, Secrétaire perpétuel et le Professeur Michel Huguier, Président de la 2ème division. Le Professeur Claude Monneret, Président de l’Académie nationale de Pharmacie et Madame Agnès Artiges, Secrétaire générale. Le Professeur Hervé Bazin, Président de l’Académie Vétérinaire de France, le Professeur Christian Dumon, Past Président et le Professeur Patrick Le Bail, Vice-Président. Le Professeur Benoît Lengelé, notre invité d’honneur qui a fait le déplacement depuis la Belgique pour cette occasion.
Messieurs les anciens Présidents de l’Académie Nationale de Chirurgie, Mesdames, Messieurs les représentants des sociétés savantes et des collèges de spécialités chirurgicales, Mesdames, Messieurs les Académiciens, Chers Collègues, Chers Amis, Mesdames, Messieurs,
Je mesure l’insigne honneur d’avoir présidé l’Académie Nationale de Chirurgie au cours de cette année 2015 et le privilège de m’exprimer cet après-midi devant vous, au moment de mettre un terme à ce mandat.
C’est le moment pour moi de remercier toutes celles et tous ceux qui m’ont apporté aide et soutien pendant toute ma carrière et ils sont nombreux dans cette salle. En tout premier lieu, Françoise, mon épouse, à qui je souhaite rendre un hommage publique bien insuffisant au regard des contraintes imposées pendant toutes ces années et aussi à mes parents disparus, qui m’ont laissé débuter en 1964, à Besançon plutôt qu’à Lyon pour des raisons administratives, des études de médecine tellement improbables pour eux.
Dans cette « vieille ville espagnole » à en croire Victor Hugo, l’École de Médecine et le Centre Hospitalier Régional allaient changer de statut pour devenir Faculté autonome et Centre Hospitalier Universitaire. Tout était à faire et beaucoup l’a été, grâce à l’engagement de jeunes professeurs dynamiques, recrutés aux quatre coins de la France. Ce n’est pas un hasard si deux de ces maîtres bisontins sont devenus Présidents de notre Académie : Michel Gillet en 2001 et le regretté Philippe Vichard disparu pendant sa présidence en 2008.
Michel Gillet, mon maître, a su donner à tous les internes de chirurgie de Besançon un enthousiasme pour le métier de chirurgien et a beaucoup l’envie de l’enseigner. Cet enthousiasme et cette envie ne m’ont pas quitté depuis 40 ans. Il m’a aussi appris le respect des malades et de leurs familles en particulier en cas de complication ou de conflit. Déjà les réunions de morbi-mortalité, ramenées de ses déplacements dans le cadre du CNU ou du GTCHU (sigles mystérieux pour moi à l’époque) s’étaient imposées dans le service. Sa recommandation était de « ne pas faire ce métier si on n’est pas optimiste » ; je l’ai adoptée après son départ en 1992 à Lausanne de l’autre côté de la montagne du Jura et essayé de le transmettre à l’équipe qui me succède et en premier lieu son chef de service le Professeur Bruno Heyd.
Michel Gillet a développé avec notre ami Jean-Philippe Miguet une approche curative d’une maladie peu reconnue à Paris (sauf par Yves Chapuis) mais fréquente dans notre région : l’échinococcose alvéolaire. Cette maladie parasitaire considérée comme « négligée » par l’Organisation Mondiale de la Santé est véhiculée par le renard. Elle se développe comme un cancer à l’intérieur du foie et il n’y a pas de traitement médical curatif à ce jour. L’espérance de vie au moment du diagnostic était inférieure à 10 ans dans les années 70-80.
Cette pathologie a été notre motivation principale pour prendre une orientation chirurgicale hépatobiliaire, qui bien que non exclusive, nous a amenés à développer la transplantation hépatique dès 1986. Pour rare qu’elle reste en France, cette parasitose n’en est pas moins présente partout dans le monde avec une incidence et une gravité inquiétantes dans certaines régions en particulier les provinces de l’ouest de la Chine. Notre compétence pour cette maladie a été rendue particulièrement lisible par la reconnaissance en 1997 d’un « centre collaborateur OMS pour le traitement et la prévention des échinococcoses humaines » grâce à l’énergie de mes amies Dominique Vuitton et Solange Bresson-Hadni.
Je suis particulièrement fier d’avoir dirigé de 2005 à 2009 cette structure pluridisciplinaire référente dans le monde entier. C’est la lutte contre cette maladie rare, mortelle, qui m’a permis de développer des relations et de voyager partout dans le monde et en particulier en Chine à partir de 1995 avec la complicité de mon élève devenu un très grand ami le Professeur Wen Hao, ici présent malgré un handicap locomoteur transitoire.
Cet hommage envers mes maîtres ne serait pas complet sans citer Pierre Carayon, mon maître lors de ma spécialisation initiale de gastroentérologie, initiateur en France de la lutte contre les addictions dans les professions de santé ; Henry Duvernoy neuroanatomiste de renommée mondiale qui m’a accueilli pendant de nombreuses années dans son laboratoire, et Francis Weil, soutien toujours fidèle, célèbre pour avoir introduit l’imagerie par ultra son en France dans les années 70. Enfin le tableau ne serait pas complet si je n’évoquais pas le souvenir toujours présent du Docteur Emile Girard Chef de Service à temps partiel, ancien Interne des Hôpitaux de Paris, qui a accompagné mes premiers pas dans un bloc opératoire lors de ma nomination comme externe des hôpitaux au dernier concours de 1967.
Je voudrais vous entretenir maintenant de notre Académie. Nous sommes ici dans le Grand Amphithéâtre du collège de chirurgie édifié par Louis XV pour l’Académie Royale de Chirurgie qui a occupé ces locaux de 1774 à 1793. En fait, le grand projet de cette année 2015 est le retour de l’Académie sur son site historique au moment de sa fondation en 1731 : je veux parler de Saint Côme et de l’amphithéâtre Joubert au 5 rue de l’École de Médecine tout près d’ici.
Il existe un vrai consensus pour ce projet qui a beaucoup de sens avec une légitimité historique et aussi la garantie d’une forte visibilité pour la chirurgie française. Surtout en y associant les Conseils Nationaux Professionnels des 12 Spécialités Chirurgicales. Beaucoup d’énergie et de démarches seront nécessaires, l’objectif est ambitieux mais les volontés sont fortes derrière François Richard chargé de cette mission pour la faire aboutir.
L’année 2015 a été marquée par plusieurs innovations. En premier lieu, la modification de nos statuts permettant à des spécialistes non chirurgiens, « au sens de la qualification ordinale », d’être élus membres associés. La base de la réflexion a été le développement des interventions mini-invasives par ces collègues radiologues, gastroentérologues et cardiologues. Ils avaient, jusqu’à maintenant, le statut, quelque peu frustrant, de membres libres et participaient à la section interventionnelle de l’Académie. Régulièrement, lors de nos séances, ils ont présenté des prouesses thérapeutiques inimaginables il y a encore 10 ans. Ils pourront désormais intégrer les instances décisionnelles de l’Académie.
De plus, l’étymologie grecque du mot chirurgie (« Kheirourgia ») qui ramène à la notion « de travail avec les mains », et à partir d’Hippocrate, « à la thérapeutique médicale comportant une intervention manuelle », s’applique tout à fait à ces spécialistes. Pour toutes ces raisons, cette modification statutaire est légitime et je tiens à remercier le Conseil d’Administration et l’Assemblée Générale d’avoir soutenu cette réforme initiée par Gérard Morvan. Il nous appartient d’accompagner cette évolution prometteuse pour qu’elle soit une source de progrès pour chaque discipline dans le respect des objectifs historiques de l’Académie.
Toujours dans un esprit d’ouverture vis-à-vis des jeunes chirurgiens cette fois, la formation initiale transversale a été mise en place en 2015, en partenariat avec le Conseil National des Jeunes Chirurgiens. La première séance co-organisée par Xavier Martin a eu lieu, les 9 et 10 octobre 2015, « sur les modalités d’exercice de la chirurgie » avec 30 participants, puis la masterclass du 15 décembre sur « les prélèvements d’organes en vue de transplantation » organisée en partenariat avec l’École Française de prélèvement, Benoît Barrou et Emmanuel Bolalewski pour 70 participants. Je remercie tous les experts qui ont acceptés de s’engager avec l’Académie Nationale de Chirurgie pour ces formations innovantes, le succès de leurs interventions laisse augurer d’un bon avenir pour la poursuite de ces formations.
Je souhaite, dans le temps qui me reste, vous parler de l’avenir de la chirurgie ! Cette réflexion est dans tous les esprits du fait des réorganisations structurelles, des lois de Santé qui se succèdent, des réformes des études qui tardent à se mettre en place ou des bouleversements technologiques déjà évoqués.
À côté des analyses extrêmes, développées dans des livres récents par des collègues Académiciens, Guy Vallencien d’une part, avec « la médecine sans médecin : quel avenir pour la chirurgie ? » et Bernard Kron : « chirurgie : chronique d’une mort annoncée », je suis sûr qu’il y a la place pour un accompagnement éclairé qui ne sera pas palliatif.
Si la chirurgie ne doit plus être considérée comme un art, elle reste un exercice difficile. Et pas simplement du fait des progrès techniques permis par la sur-spécialisation, mais surtout parce qu’elle soigne des hommes. Comme nous l’a rappelé le président Iradj Gandjbakhch en 2011, nous devons garder à l’esprit que la chirurgie reste dérogatoire au code civil, qui interdit de violer le principe intangible de l’intégrité du corps humain. Peter Vogt nous a par ailleurs rappelés lors de son discours inaugural au Congrès Allemand de Munich en avril dernier que « résumer la chirurgie à des actes techniques, c’est réduire le chirurgien à un rôle de technicien». Comme vous le savez tous, les exigences de notre métier vont bien au-delà de la technique.
Pour les mêmes raisons, on peut s’interroger à propos des réserves récentes formulées par certains collègues sur leur capacité à prendre en charge les urgences de leur discipline, du fait de leur hyperspécialisation. Ceci nous paraît acceptable dans certaines surspécialités, comme la chirurgie de la main, organisée pour prendre en charge les cas réglés mais aussi les cas urgents. Nous pensons que le métier de chirurgien, dans toute l’acceptation actuelle du terme, ne peut pas s’affranchir de la confrontation aux situations urgentes. À partir du moment, où la compétence est acquise lors de la formation initiale, il paraît nécessaire de l’entretenir au cours de la vie professionnelle sauf à imaginer la formation de chirurgiens urgentistes dans chaque spécialité, avec le risque d’une dévalorisation du métier, voire du service rendu.
L’Académie, qui a survécu à tellement de bouleversements depuis sa création en 1731, continuera à s’engager dans son rôle de magistère moral de notre profession. Imaginez le futur est de l’ordre du rêve, « seul l’imprévisible est sûr » comme aime à le dire François Richard. Accompagner le progrès, diffuser les innovations, transmettre l’enthousiasme pour ce métier fabuleux, tellement gratifiant, restent bien les buts concrets de notre compagnie.
Je ne peux pas terminer ce discours sans remercier le bureau qui m’a soutenu pendant cette année de présidence en soulignant la convivialité et la sérénité des échanges malgré le climat de crise et d’insécurité qui a sévi en France pendant cette période. Je remercie plus particulièrement Philippe Marre, notre Secrétaire Général et Pascale Decauville, Directeur du Développement et de la Communication pour leur implication dans la gestion du quotidien et leur engagement dans l’accomplissement des projets, Georges Casanova pour la rigueur de sa gestion comptable et sa bonne humeur communicative, nos deux secrétaires annuels Gérard Morvan et Philippe Topart que vous allez écouter dans un instant, Bernard Andreassian et Fatiha El Morabit pour le développement de notre revue en ligne et enfin Pascal Bouret, technicien vidéo qui assure en ce moment même avec Raja Fares, la retransmission de cette séance, accessible par tous dans quelques heures sur le site de l’Académie Nationale de Chirurgie sans code ni mot de passe. Bien sûr je n’oublie Henri Judet, héritier d’une illustre lignée d’orthopédistes qui va me succéder dans 8 jours et à qui je souhaite très bonne chance pour son année de Présidence ainsi qu’à notre vice-Président Dominique Franco.
Éminents Invités, Chers Collègues Académiciens, Mesdames, Messieurs, j’espère vous avoir démontré que l’Académie Nationale de Chirurgie n’est pas « une vieille dame endormie se reposant sur les lauriers d’un glorieux passé », je vous remercie de votre attention.
« Nous avons maintenant le plaisir d’écouter le Quatuor Audelma, avec Mathilde Gandar 1er violon, Gabriela Gloanec 2ème violon, Leila Pradel alto et Sarah Catil violoncelle.Nous devons sa présence au Pr Michel GERMAIN. Le Quatuor AUDELMA va nous interpréter le Presto du Quatuor N°3 en Sol Majeur de Wolfgang Amadeus Mozart ».
« Je donne maintenant la parole à Philippe TOPART, Secrétaire Annuel, pour la présentation des travaux de l’Académie de Chirurgie pendant l’année 2015. Je vous prie d’excuser Gérard MORVAN, empêché ».
Résumé Les 17 membres Associés élus Titulaires en 2015 ALLAIRE Éric ARGENSON Jean-Noël BEY Éric CHAKFÉ Nabil DELPERO Jean-Robert DUFFAU Hugues HUBERT Jacques KRETZ Jean-Georges LIVERNEAUX Philippe MENASCHE Philippe PATTOU François RICCO Jean-Baptiste SARAGAGLIA Dominique SEDEL Laurent SEGOL Philippe STERKERS Olivier WURTZ Alain
Les 28 nouveaux membres Associés élus en 2015 ABI LAHOUD Georges neurochirurgie à Paris ARNAUD Axel chirurgie viscérale et digestive à Marseille BODIN Frédéric chirurgie plastique à Strasbourg BOKOBZA Bernard chirurgie viscérale et digestive au Havre BRUANT-RODIER Catherine chirurgie plastique à Strasbourg COSSA Jean-Pierre chirurgie viscérale et digestive à Paris COUDANE Henry chirurgie orthopédique à Nancy DUTEILLE Franck chirurgie plastique à Nantes GIARD Silvia chirurgie sénologique à Lille GILLION Jean-François chirurgie viscérale à Anthony GLEYZE Pascal chirurgie orthopédique à Colmar GRISE Philippe chirurgie urologique à Rouen JOUANNIC Jean-Marie chirurgie gynécologique et obstétricale à Paris LEGEAIS Didier chirurgie urologique à Grenoble LIFANTE Jean-Christophe chirurgie viscérale et digestive à Lyon LUBRANO Jean chirurgie viscérale et digestive à Caen MANSAT Pierre chirurgie orthopédique à Toulouse MARTINOT Véronique chirurgie plastique à Lille MASSIN Philippe chirurgie orthopédique à Paris MAZEL Christian chirurgie orthopédique à Paris MERTL Patrice chirurgie orthopédique à Amiens MILLIEZ Jacques chirurgie gynécologique et obstétricale à Paris MOREAU Patrick chirurgie vasculaire à Béziers POCARD Marc chirurgie viscérale et digestive à Paris PROCYK Stefan chirurgie orthopédique à Ploemeur SABATIER Jean chirurgie vasculaire à Rouen VALVERDE Alain chirurgie viscérale et digestive à Paris ZIMMERMANN Jean-Marie chirurgie viscérale et digestive à Marseille
Les 4 membres Libres cooptés en 2015 : FABRE André-Julien de Paris GANGI Afshin de Strasbourg LARREY Dominique de Montpellier RITZ Patrick de Toulouse
Les 8 membres Titulaires accédant à l’Honorariat en 2015 BARRET André BOCCON-GIBOD Laurent CLOTTEAU Jean-Edouard DE SAINT-JULIEN Jacques JANSER Jean-Claude LE DUC Alain PERISSAT Jacques TRAVAGLI Jean-Paul
La Nomination du 1er Membre d’Honneur : Denys PELLERIN
Résumé L’Accueil des 13 nouveaux Membres à titre étranger en 2015
Le Professeur Juan-Santiago AZAGRA Le Professeur Jorge DEFELITTO Le Professeur Nicolas DEMARTINES Le Professeur Julio DIEZ Le Docteur Isabella DRAGHICI Le Professeur Ciro ESPOSITO Le Professeur Féthi MERAD-BOUDIA Professor PENG Shu You Le Professeur Brigitte PITTET-CUENOD Professor WEN Hao Le Professeur Cristóbal ZARAGOZA-FERNÁNDEZ Professor ZHU Zhijun Le Professeur Messaoud ZITOUNI
Intermède Musical Quatuor AUDELMA : 2ème mouvement du concerto pour violon de Felix Mendelssohn
Proclamation des Lauréats des Prix 2015 destinés aux Jeunes Chirurgiens et Remise des Médailles et Prix honorifiques décernés en 2015
Résumé I- Proclamation des Prix décernés aux jeunes chirurgiens par l’Académie en 2015 : - Le Prix du Forum de Recherche Chirurgical dotation BROTHIER attribué à Amélie CHAU (Lille) - Le Prix de la Recherche Clinique « Jeune Talent Chirurgical » dotation ETHICON, attribué à Nirvana SADAGHIANLOO (Nice) - Le Prix de « l’Innovation Organisationnelle » en Chirurgie, dotation FHF attribué à Guillaume LEBRETON (Paris) - Le Prix de chirurgie mini-invasive ou d’endoscopie interventionnelle, dotation IRCAD attribué à Haythem NAJAH (Paris) - Le Prix de l’innovation en gestes médico-chirurgicaux assistés par ordinateur - dotation Labex CAMI attribué à Jean-Michel LEMÉE (Angers) - Le Prix de l’innovation en orthopédie - dotation EUROS, attribué à Yann GLARD (Marseille) - Le Prix de la « Maîtrise des Risques en Chirurgie » dotation SHAM, attribué à Guillaume CARRIER (Clermont-Ferrand) - Le Prix de recherche appliquée innovante et originale en chirurgie orthopédique dotation MEDICALEX, attribué à Houssam BOULOUSSA (Paris) - Le Prix Junior de Chirurgie cancérologique 2015 dotation Fondation AVEC attribué à Diane MÈGE (Marseille) - Le Prix de l’interne Médaille d’or 2015 à Thomas SEISEN (Paris)
2-MÉDAILLES ET PRIX D'HONNEUR ANC 2015
- Le Prix de l’Académie 2015 attribué à Mme Martine DEVILLERS-ARGOUARC’H - Le Grand Prix de Chirurgie Cancérologique 2015 dotation Fondation AVEC attribué à Dominique ELIAS (Paris)
- LES 7 MÉDAILLES de l’Académie décernées au titre de 2015: La Chaine de l’Espoir La Fondation de l’Avenir L’Academia Argentina de Cirurgia (AAC) La Société suisse de chirurgie viscérale La Société Algérienne de Chirurgie Mini-Invasive et Endoscopique (SACME) La Société Algérienne de Chirurgie Vasculaire (SACV) John Nicholls
- La Médaille d'Honneur 2015 attribuée au Pr Pierre CARLI et au SAMU de Paris - La Médaille Ambroise Paré 2015 est attribuée au Pr Alim Louis BENABID
Évocation de « deux figures exemplaires de la chirurgie carcinologique française au XXème siècle : Henri Redon et Pierre Denoix »
Résumé Séance Solennelle 20 janvier 2016 Académie de Chirurgie
Evocation de Henri Redon et Pierre Denoix par Philippe MARRE
Le Président Georges Mantion: Je donne maintenant la parole à Philippe MARRE, secrétaire général, qui selon la coutume retrace le portrait d’un chirurgien qui a marqué son temps. Le choix s’est porté sur Henri Redon et Pierre Denoix, deux figures exemplaires de la chirurgie carcinologique française au XXème siècle.
Mesdames, Messieurs, Mes chers collègues,
Henri Judet nous a fait revivre ces dernières années les figures de quelques-uns de nos grands ancêtres chirurgiens : Guy de Chauliac, Georges Mareschal, Dominique-Jean Larrey et plus près de nous Alexis Carrel et René Leriche. Je vous propose aujourd'hui de suivre son exemple en évoquant la mémoire de deux grandes figures de la chirurgie carcinologique française, tous deux membres de notre compagnie, Henri Redon et Pierre Denoix. Leurs riches personnalités complémentaires ont marqué l'essor de la prise en charge du cancer en France, et dans le monde au milieu du XX° siècle. Chacun à sa manière, ils ont largement contribué à la connaissance de cette maladie et à la place de la chirurgie dans son traitement.
Henri Redon s'est consacré au soin du patient cancéreux. Il savait le rassurer et gagner sa confiance parce qu'il avait à cœur de lui offrir le traitement adapté à son cas, grâce à sa connaissance approfondie de la maladie cancéreuse. Devenu chirurgien de l'Institut National du Cancer en 1934 à Villejuif, il s'est attaché, d'une part à décrire les techniques chirurgicales qui convenaient à cette maladie et d'autre part à préciser la place de la chirurgie à côté de celle de la radiothérapie naissante dans son traitement. En effet, le développement de la radiothérapie modifiait l'approche du traitement du cancer, avec notamment les travaux de Claudius Regaud et de Marie Curie à l'institut du radium devenu la fondation Curie en 1920. Henri Redon a ainsi publié de nombreux travaux sur le traitement chirurgical des cancers qui ont fait rapidement autorité, comme le rapport sur les indications chirurgicales dans le cancer du sein qui a fait date en 1968. Mais ce sont deux instruments chirurgicaux très simples d'usage quotidien, auxquels il a laissé son nom, qui perpétuent sa mémoire dans les blocs opératoires du monde entier. Le premier est le petit dissecteur très fin, dit de Redon, permettant d'individualiser et de suivre sans les blesser tous les filets du nerf facial au cours des parotidectomies totales. La qualité des suites post-opératoires et des résultats de cette opération qu'il avait parfaitement codifiée a largement contribué à la réputation d'Henri Redon. Son expérience dans cette chirurgie a fait l'objet de plusieurs publications et d'un traité sur la chirurgie des glandes salivaires qui fit autorité en 1965. Le second est le système de drainage chirurgical aspiratif postopératoire des espaces celluleux, notamment après curage ganglionnaire cervical étendu, également dit de Redon. Il fut mis au point avec Jost et Troques et présenté à l'Académie en 1954. Il rend toujours de grands services dans la plupart des spécialités chirurgicales.
Pierre Denoix était son cadet de treize ans. Jeune chirurgien très tôt orienté vers le cancer, il s'est intéressé à la maladie cancéreuse et à la prise en charge de celle-ci davantage qu'au patient cancéreux lui-même. En cette première moitié du XX° siècle, le cancer lui paraissait en effet être l'un des enjeux majeurs de la santé publique. Sur le plan méthodologique, il proposa dès 1943 une classification pronostique des cancers permettant de clarifier la stratégie de leur prise en charge et l'orientation des voies de recherche à développer. Présentée en France sous l'acronyme TGM, Tumeur, Ganglion, Métastase, cette classification fut affinée et développée pour être adoptée en 1952 dans le monde entier sous l'acronyme TNM, Tumor, Node, Metastasis, selon la terminologie anglo-saxonne. Sur le plan de l'organisation pratique de la prise en charge de la maladie cancéreuse, la création des Centres régionaux de Lutte Contre le Cancer par l'ordonnance de 1945 s'inspira largement de l'expérience acquise à l'Institut National du Cancer. Pierre Denoix y participa, devenant l'assistant d'Henri Redon à partir de 1942. Cette ordonnance donnait un cadre et un statut communs à ces centres en se fondant sur les expériences en cours, à Villejuif, mais aussi en province. Comme celle du centre de Lille créé en 1930 à l'hôpital du St Sauveur par Oscar Lambret, éminent chirurgien également membre de notre compagnie.
Ainsi se constitua au milieu de la guerre à l'Institut National du Cancer de Villejuif une équipe chirurgicale très complémentaire. Henri Redon était le grand clinicien et l'excellent opérateur dans la grande tradition chirurgicale française pour laquelle l'intendance devait suivre. Pierre Denoix était l'innovateur et le stratège pour qui justement l'intendance était primordiale dans le projet de maîtrise d'une maladie aussi complexe et encore aussi mal connue que le cancer à cette époque. L'équipe fonctionna de 1942 à 1956 soutenue par la forte personnalité de Gustave Roussy fondateur et directeur de cet Institut.
Henri Redon est né le 24 juin 1899 à Tour de Faure, petit village du Quercy dans une famille de juristes ruraux que connaissait bien ma famille originaire du village voisin. Après des études secondaires au lycée Gambetta de Cahors comme pensionnaire, le décès brutal de son père en 1915 mît sa mère dans une situation financière difficile. Ceci incita Henri Redon à entreprendre des études de médecine à Toulouse, rêvant de devenir rapidement médecin de campagne dans le Lot. Mais la guerre était là et il fut mobilisé en 1917 dès la fin du PCN. Henri Redon reprit ses études en 1919, cette fois à Paris sur les conseils du lozérien Henri Rouvière, professeur d'anatomie à Paris et ami de la famille de sa mère. Reçu à l'internat dès le premier concours en 1923, il fut élève successivement de Charles Dujarier, de Paul Lecène, de Pierre Duval et de Raymond Grégoire, pour devenir assistant de Paul Lecène et aide d'anatomie puis prosecteur en 1928 chez Henri Rouvière. Le décès brutal de Paul Lecène en 1930 bouleversa ce cursus. Henri Redon fut accueilli par Pierre Duval qui l'orienta vers la chirurgie du cancer après sa nomination comme chirurgien des hôpitaux de Paris en 1934. Il se fit alors détacher au tout nouvel Institut National du Cancer construit en face de l'hôpital Paul Brousse de Villejuif qui venait d'être inauguré par Gustave Roussy en présence du Président de la République Albert Lebrun.
L'Institut National du Cancer succédait au Centre Anticancéreux de la Région Parisienne installé à l'hôpital Paul Brousse en 1921 par Gustave Roussy qui y ouvrit cette année-là la première consultation de carcinologie dans son service de neurologie. Gustave Roussy était un neurologue réputé, élève de Jules Déjerine, que la tradition anatomo-clinique avait conduit à s'intéresser à l'anatomie pathologique pour tenter de comprendre les maladies neurologiques qu'il soignait. Devenu professeur d'anatomie pathologique en 1925, il passa naturellement à l'étude du cancer. C'était un homme de grand caractère, né en 1874 à Vevey dans la famille Nestlé. Il avait entrepris ses études de médecine à Genève pour les poursuivre à Paris où il fut reçu à l'internat en 1901. Son choix de se consacrer au cancer était très novateur à une époque où les maladies infectieuses étaient le grand enjeu de la santé publique. Devenu directeur de l'Institut National du Cancer à son ouverture en 1934, il s'entoura d'excellents spécialistes, notamment d'Henri Redon en chirurgie, de Jacques Delarue et de Charles Oberling en anatomie pathologique ainsi que de Simone Laborde, transfuge de la fondation Curie, en radiothérapie. Henri Redon passa alors à l'Institut ses plus belles années professionnelles, devenant chef du service de chirurgie en 1942. C'est à cette époque que Pierre Denoix le rejoignit comme assistant.
Pierre Denoix est né à Paris le 26 octobre 1912 dans une famille d'hommes politiques régionaux originaire de La Bachellerie, dans le Périgord Vert. Après de brillantes études secondaires aux lycées Louis le Grand et Henri IV, il entreprit des études de médecine à Paris en 1930. Reçu à l'internat en 1935, il s'orienta vers la chirurgie, devenant l'élève de Louis Bazy, de Sylvain Blondin, de Bernard Cuneo, de Charles Lenormant et de Joseph Okinczyc. Tout en entreprenant un cursus traditionnel en devenant aide d'anatomie en 1938, Pierre Denoix compléta sa formation par un certificat d'anatomie pathologique et un diplôme d'hygiène industrielle et de médecine du travail avec le projet de se consacrer à la prise en charge des cancers. Mobilisé en 1939, il reprit rapidement son cursus chirurgical, soutenant sa thèse en 1941. Son orientation carcinologique s'affirma en 1942, année où il intégra l'Institut National d'Hygiène devenant responsable de la section cancer de 1942 à 1956 et année où il devint l'assistant d'Henri Redon à l'Institut National du Cancer jusqu'en 1956. Il connut par ailleurs une période difficile à la fin de la guerre qui lui valut d'être interné à Fresnes en 1944 pour faits de résistance. Il fut nommé chirurgien des hôpitaux de Paris en 1948.
A partir de 1945, l'équipe chirurgicale de l'Institut National du Cancer connut une dizaine d'années de grande fécondité. Fécondité clinique avec de nombreuses publications dans tous les domaines de la carcinologie et notamment du sein, de la thyroïde, des glandes salivaires et de l'utérus. Fécondité méthodologique avec les premiers essais cliniques fondés sur la classification TNM et les premières enquêtes statistiques. Fécondité stratégique avec la participation à la création les Centres régionaux de Lutte Contre le Cancer sur le modèle de l'Institut National du Cancer de Villejuif. Fécondité institutionnelle enfin avec la participation à l'élaboration par Robert Debré de la loi sur le plein-temps hospitalo-universitaire et à l'organisation de la prise en charge collective des patients dans les comités d'organes, ancêtres des Réunions de Concertations Pluridisciplinaires actuelles.
Mais l'entente sur laquelle reposait cette fécondité n'était qu'apparente. Des divergences se firent jour entre Henri Redon et Pierre Denoix, surtout après la disparition brutale de Gustave Roussy en 1948. Devenu recteur de l'université de Paris, celui-ci avait été remplacé au poste de directeur de l'Institut National du Cancer en 1946 par René Huguenin. Pierre Denoix en devenait le secrétaire général et l'Institut prenait le nom d'Institut Gustave-Roussy en 1950. Dans cette équipe, Henri Redon incarnait la tradition chirurgicale française dans l'approche du patient et de sa maladie personnelle. L'excellent opérateur qu'il était donnait ses soins à une vaste clientèle dépassant les frontières de la France, le matin à Villejuif à l'Institut National du Cancer et l'après-midi à Paris à la clinique des sœurs Augustines, rue de la Santé. Pierre Denoix incarnait le renouveau et la place grandissante de l'administration dans l'organisation et la stratégie de la prise en charge du cancer. Leur rupture peut être datée de 1956. À cette date, la disparition brutale de René Huguenin laissa vacante la direction de l'Institut Gustave-Roussy. Pierre Denoix fut choisi pour lui succéder après une campagne efficace, campagne dont Henri Redon, également candidat, ne s'est guère préoccupé, estimant que cette direction lui revenait de droit. Mais les temps changeaient et l'homme d'appareil fut préféré à l'homme de l'art.
Henri Redon fut éprouvé par cet échec que ne vinrent compenser qu'imparfaitement la chaire de clinique chirurgicale carcinologique créée pour lui en 1957 et le service de chirurgie de l'hôpital Necker où il fut nommé en 1960. Il y poursuivit son œuvre de soins, d'enseignement et de recherche jusqu'à sa retraite en 1970. Il continua à opérer ensuite encore deux ans chez les sœurs Augustines. Déjà malade il prit sa retraite chez lui à Tour de Faure en 1973 et s'éteignit chez les sœurs Augustines en 1974. Entièrement consacrée à la lutte contre le cancer, la carrière d'Henri Redon fut couronnée par une reconnaissance internationale honorant à travers sa personne l'importance de la recherche chirurgicale française de l'époque. Invité à de nombreux colloques, à présider des congrès, il fut reçu comme membre étranger de plusieurs sociétés savantes et de l'Académie de Médecine de Rome.
Pierre Denoix assura parallèlement sa carrière d'enseignant et de directeur de l'Institut Gustave-Roussy. Devenu professeur titulaire de la chaire de clinique carcinologique en 1966, il exposa dans sa leçon inaugurale ses conceptions novatrices pour l'époque sur l'exercice et l'organisation de la médecine. A la direction de l'Institut Gustave-Roussy, il mena une triple action de développement de la recherche clinique, d'équipement matériel et de restructuration architecturale. Il axa le développement clinique sur les quatre piliers devenus traditionnels dans les centres hospitalo-universitaires que sont les soins, l'enseignement, la recherche et l'information du public. Conscient de la nécessité d'équipements modernes pour traiter le cancer il fit installer à l'Institut Gustave-Roussy le premier betatron en 1953, la première unité française de statistiques en 1956, le premier ordinateur médical en 1968 et le premier accélérateur linéaire français en 1969. Enfin, constatant que la taille de l'Institut National du Cancer devenait insuffisante, il fit décider au milieu des années 1960 la construction d'un nouvel Institut Gustave-Roussy, toujours à Villejuif, sur le terrain des Hautes Bruyères, au-dessus de l'autoroute A6, à l'écart de l'hôpital Paul Brousse. Ce nouvel Institut désigné par l'acronyme IGR, fut inauguré en 1980 et peut être considéré comme l'œuvre de la vie de Pierre Denoix. Un pavillon de recherche y vit le jour en 1981. Pierre Denoix mena en outre une carrière administrative exceptionnelle pour l'époque. En France il fut notamment président de la fédération des Centres de lutte Contre le Cancer et directeur général de la santé de 1973 à 1978. A l'étranger, il fut notamment secrétaire général de l'Union Internationale Contre le Cancer de 1953 à 1958, puis son président de 1973 à 1978. Il assuma également des responsabilités importantes à l'OMS. De réputation mondiale il fut invité à de nombreux colloques, présida plusieurs congrès et fut admis comme membre étranger de plusieurs sociétés savantes et de l'Académie des sciences du Brésil. Il prit sa retraite à St Géniés en Dordogne en 1981 et s'éteignit à l'IGR en 1990.
Voilà brièvement évoqués deux destins exemplaires de chirurgiens français ayant consacré leur vie à la connaissance et au traitement du cancer, chacun à sa manière, chacun selon sa personnalité, leur histoire faisant se croiser des chemins différents mais finalement complémentaires. L'homme de tradition qu'était Henri Redon, l'homme de renouveau qu'était Pierre Denoix, apportèrent leur vision et leur approche personnelles de cette maladie complexe qui dépassait les paradigmes de l'époque. Ils firent faire des progrès considérables, reconnus dans le monde entier, à sa connaissance et à son traitement. Le cancer fut l'une des grandes affaires médicales du XX° siècle en Occident. À l'orée du XXI° siècle la relève de ces précurseurs qu'étaient Henri Redon et Pierre Denoix est assurée. En témoigne par exemple l'avènement de la médecine moléculaire pour laquelle un pavillon vient d'être ouvert à l'IGR appelé maintenant officiellement tout simplement Gustave Roussy.
Intermède musical Quatuor AUDELMA : menuet du quatuor N°5 op. 11 de Luigi BOCCHERINI
Conférence de l’Invité d'honneur, le Pr Benoit LENGELÉ «Chirurgiens, Officiers, Gentilshommes : destins croisés de nos pères au chevet des blessés de Waterloo »