Séance du mardi 20 janvier 2009

SEANCE COMMUNE AVEC L’ACADEMIE NATIONALE DE MEDECINE : CHIRURGIE ORTHOPEDIQUE
14h45-17h00 - Académie nationale de Médecine

 

 

La chirurgie du poignet et de la main rhumatoïde.

MERLE M (Nancy)

Résumé
L’introduction des biothérapies dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde a favorablement modifié l’évolution de cette maladie réputée douloureuse, invalidante, destructrice. La chirurgie reste cependant un élément incontournable de la chaîne thérapeutique car 30% des patients tolèrent mal les biothérapies.
Le suivi de plusieurs décennies de ces patients nous a permis de cerner avec précision les mécanismes de déformation du poignet et des chaînes digitales (luxation palmaire du cubital postérieur, des os du carpe, inclinaison radiale du poignet, extension du 2ème et 3ème métacarpiens, flexion des 4ème et 5ème métacarpiens, luxation palmaire des 1ères phalanges, luxation de l’appareil extenseur des doigts, rupture des tendons extenseurs et fléchisseurs).
Désormais il est aisé de corriger précocement la déviation radiale du poignet la luxation des os du carpe, le coup de vent cubital, les déformations en col de cygne et en boutonnière, etc. La demande des patients est claire, ils désirent atténuer leur douleur et préserver leur autonomie gestuelle. Lorsque la chirurgie de la main s’impose dans le schéma thérapeutique, les patients ont déjà subit de nombreuses opérations au niveau des épaules, coudes, genoux, pieds et hanches. Ils redoutent la multiplication des interventions au niveau des mains aux suites réputées longues et douloureuses, nécessitant la rééducation et le port d’orthèses.
La technique chirurgicale s’est profondément modifiée depuis deux décennies et bénéficie de toutes les avancées techniques acquises dans le domaine de la traumatologie. En une seule intervention de 2 heures sous anesthésie locorégionale, il est possible de réaliser une synovectomie dorsale du poignet, de ré axer les os du carpe par transfert tendineux ou arthrodèse partielle. La pro supination est aisément rétablie par ostéotomie du cubitus. Les articulations métacarpo-phalangiennes sont ré axées ou remplacées par des implants en silicone. Le pouce en boutonnière bénéficie d’une ré axation par transfert tendineux ou par arthrodèse de l’articulation métacarpo-phalangienne. Les déformations en col de cygne sont réduites par ténodèse.
De nombreuses techniques chirurgicales utilisées autorisent la mobilisation précoce avec la protection d’orthèses dynamiques, ce qui réduit les risques d’enraidissement. Habituellement, l’utilisation de la main dans les activités quotidiennes reprend vers la 6ème semaine post opératoire. L’apport des implants métacarpo-phalangiens restaure un secteur de mobilité de 60° avec un déficit d’extension de 11°, permettant une prise efficace. La force reste difficile à restaurer à cause, d’une part, de l’atrophie musculaire rançon de la corticothérapie au long cours, et d’autre part, de l’impossibilité de développer des implants contraints ou semi contraints au niveau du poignet et des chaînes digitales.
La chirurgie de la main et du poignet rhumatoïde est souvent proposée en dernier ressort au patient, et donc trop tardivement.. La rupture de tendons extenseurs ou fléchisseurs doit être considérée comme une urgence chirurgicale. Une chirurgie précoce de rééquilibrage des chaînes articulaires préserve leur capital ostéo-articulaire. Seule une véritable consultation médicochirurgicale complétée par la présence d’un orthésiste permet de cadencer les traitements et de valoriser leur efficacité.

 

Prothèses totales de la hanche : état de l’art et aspects fondamentaux.

SEDEL L (Paris)

Résumé
La prothèse totale de hanche apparaît comme une avancée thérapeutique majeure de ces 50 dernières années. Si les succès sont la règle, il existe encore quelques incertitudes sur la pérennité de l’intervention chez des sujets jeunes et actifs , des problèmes liés à la luxation des prothèses , à la voie d’abord ainsi que de possibles conséquences de l’utilisation de produits nouveaux ou renouvelées comme les couples métal/métal, les cupules couplées , les prothèses en céramiques mal dessinées, les nouveaux polyéthylènes irradiés ou des insuffisances de rigueur dans le choix ou le dessin des produits.
De plus on assiste à une implication croissante des données financières et industrielles dans la sélection des produits.
Engagé depuis longtemps dans la recherche pluridisciplinaire sur les matériaux de prothèse et leur fixation pérenne dans l’os, nous insisterons sur l’analyse des causes d’échecs actuellement connue : réactions au débris d’usure ou intolérance à certains matériaux.

 

Mise en place des prothèses totales du genou avec assistance par ordinateur : 11 ans d’expérience grenobloise.

SARAGAGLIA D (Grenoble)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2009, vol. 8 (1), 053-058

Résumé
La chirurgie assistée par ordinateur a débuté à la fin des années 1980, par la neurochirurgie stéréotaxique. Les objectifs de cette nouvelle technique étaient d’améliorer la précision du geste opératoire, de diminuer l’agressivité chirurgicale et d’améliorer la traçabilité de l’intervention.
L’histoire de la mise en place des prothèses totales du genou assistée par ordinateur a débuté en 1993, date à laquelle nous avons constitué un groupe de travail composé de 2 chirurgiens (D. Saragaglia et F. Picard), 1 médecin informaticien (P. Cinquin), de 2 ingénieurs informaticiens (S. Lavallée et F. Leitner) et d’un partenaire industriel qui était à l’époque la Société I.C.P France (rachetée en 1994 par la Société Aesculap, Tuttlingen, Allemagne). Lors de cette première réunion, et en tant que chirurgien «senior», nous établissions le cahier des charges de ce que devait être pour nous une assistance par ordinateur. Il ne fallait pas qu’il y ait de scanner préopératoire pour guider la navigation chirurgicale et ceci pour plusieurs raisons : tout d’abord parce qu’à l’époque cet examen ne faisait pas partie du bilan préopératoire d’une prothèse de genou, ensuite parce que nous avions l’intuition qu’un tel examen ne pouvait que compliquer la procédure opératoire et qu’enfin cela aurait été à l’origine d’un surcoût et d’une irradiation non négligeable du patient. Il fallait que l’on ait une référence permanente à l’axe mécanique du membre inférieur du début jusqu’à la fin de l’intervention de manière à placer les guides de coupes perpendiculaires à cet axe mécanique aussi bien dans un plan frontal que dans un plan sagittal. Il fallait pouvoir mettre les guides de coupe « à la volée » sans aucune tige centro ni extra-médullaire. Il fallait enfin que l’intervention dure moins de 2 heures (temps maximal de garrot que nous nous autorisons) et que la procédure soit accessible à tout chirurgien quelle que soit sa compétence en informatique.
Ce projet fut confié à F. Picard qui en fit un travail de recherche dans le cadre de son D.E.A de génie biologique et médical, et à F. Leitner ingénieur informaticien en fin de formation. Après 2 ans de travail, le système fut validé par la mise en place de 10 prothèses du genou sur 10 genoux de cadavre et les résultats furent publiés en 1997 dans plusieurs instances nationales et internationales (CAOS, SOFCOT, SOBCOT etc..).
Après accord du comité d’éthique du CHU de Grenoble du 4/12/1996 la 1ère prothèse assistée par ordinateur fut implantée sur l’être vivant le 21/01/1997 (D. Saragaglia, F. Picard, T. Lebredonchel). L’intervention dura 2 h 15 mn sans problème majeur per-opératoire.
Une étude prospective randomisée comparant cette technique à la technique conventionnelle débuta en Janvier 1998 et se termina en Mars 1999. Les résultats furent publiés dans plusieurs instances nationales et internationales et dans un article princeps de la revue de chirurgie orthopédique. En mars 1999, le prototype que nous avions utilisé dans cette étude donna naissance au modèle définitif qui fut appelé Orthopilot™ (B-Braun-Aesculap, Tuttlingen, Allemagne). Depuis cette époque, de nombreux articles ont été publiés dans la littérature confirmant le bien fondé de cette technique et plus de 150 000 prothèses ont été implantées dans le monde avec le système Orthopilot™. Les logiciels ont évolué (3.0, 3.2, 4.0, 4.2) mais le principe de base est resté le même depuis la création du système.
L’objectif de cette communication est de présenter notre système de navigation, de le comparer aux autres systèmes et de faire une revue de la littérature quant à l’intérêt de la navigation informatisée.

 

Traitement chirurgical des tumeurs malignes primitives osseuses.

ANRACT P (Paris)

Résumé
Le traitement des tumeurs osseuses malignes primitives, ne peut s’envisager que dans des structures spécialisées pluridisciplinaires regroupant des anatomopathologistes, des chirurgiens orthopédistes, des oncologues, des radiologues et des radiothérapeutes, tous habitués au diagnostic et au traitement des ces tumeurs. En cas de suspicion de tumeur maligne, le patient doit être pris en charge dans ce type de structure dès la biopsie. Cette dernière doit être réalisée avant de démarrer le traitement, elle fait partie du traitement et doit être effectué par un chirurgien senior. En effet, une biopsie faite de façon inadéquate peut compromettre le pronostic fonctionnel, voire le pronostic vital, du patient. Cette biopsie peut être réalisée par voie percutanée sous contrôle radiologique avec une aiguille de true-cut ou un trocart afin de prélever des "carottes" de tissu pathologique. Cette technique nécessite un pathologiste habitué à la pathologie osseuse. La biopsie chirurgicale « à ciel ouvert » est préférable pour les tumeurs osseuses primitives, surtout quand une tumeur cartilagineuse est suspectée. Elle est réalisée par une courte voie d’abord située sur le trajet de la voie d’abord qui sera utilisée pour la résection chirurgicale de la tumeur afin que la cicatrice de biopsie soit excisée en monobloc avec la tumeur. Le traitement chirurgical des tumeurs osseuses malignes primitives repose une résection large, c'est-à-dire une exérèse du segment osseux atteint par la tumeur et des éventuelles parties molles adjacentes envahies, en monobloc sans entrer dans la tumeur en conservant une marge de tissu sain en périphérie. Dans la majorité des cas, une reconstruction est nécessaire pour préserver la fonction de la zone réséquée. La reconstruction fait appel aux techniques utilisées habituellement en chirurgie orthopédique : les ostéosynthèses, les greffes osseuses (autogreffe et allogreffe), les prothèses plus ou moins massives, l’association de prothèses et d’allogreffes (reconstructions composites).
Les indications d’amputation sont dues à l’impossibilité de réaliser une résection chirurgicale conservatrice. Il a été démontré qu’une résection conservatrice, quand elle est possible, ne diminue pas la survie des patients atteints d’un sarcome osseux. Actuellement il est possible d’effectuer une résection conservatrice dans plus de 80% des cas. Les indications d’amputations sont : les énormes tumeurs envahissant les vaisseaux et les nerfs dont la résection aboutirait à un membre non fonctionnel, les infections sur tumeur (souvent secondaires à la biopsie), une biopsie effectuée de façon inadaptée (contamination des vaisseaux, contamination des muscles périarticulaires, etc.), récidive locale, etc. L’amputation obéit aux même impératifs oncologiques que les résections conservatrices.