Séance du mercredi 3 juin 2015

TRANSPLANTATION PÉDIATRIQUE
14h30-17h00, Les Cordeliers
Co-Présidence : Georges MANTION (Besançon), Juan TOVAR LARRUCEA (Madrid). Modérateur : Christine GRAPIN-DAGORNO (Paris)

 

 

Introduction générale par le président

MANTION G (Besançon)

 

Introduction de la séance thématique

TOVAR LARRUCEA J, GRAPIN DAGORNO C (Madrid)

 

Transplantation cardiaque pédiatrique - aspects chirurgicaux
Pediatric Cardiac Transplantation - Surgical Aspects

LE BRET E Pôle des cardiopathies congénitales - Centre chirurgical Marie Lannelongue - 133 avenue de la Résistance - 92350 Le Plessis Robinson / Université Paris XI
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2015, vol. 14 (4), 038-044

Résumé
La transplantation cardiaque chez l’enfant est une éventualité qui reste rare, puisqu’elle intéresse environ 20 patients par an en France.
Les receveurs sont de deux types très différents. D’un côté, il s’agit de patients en évolution terminale d’une cardiomyopathie dilatée ou restrictive (60-70 % des cas). La transplantation ressemble alors trait pour trait à une transplantation cardiaque adulte miniaturisée. A l’opposé, dans 30-40 % des cas, la transplantation est une solution thérapeutique pour des enfants porteurs de cardiopathies congénitales souvent multi-opérées. Dans ce dernier groupe de patients, il a fallu développer de nombreux artifices techniques pour faire concorder l’anatomie du receveur au cœur du donneur. Il est ainsi possible aujourd’hui de transplanter des patients avec anomalies des retours veineux, avec transposition des gros vaisseaux, voire en situs inversus, ou encore des patients présentant des montages très particuliers suite à des interventions palliatives.
Les résultats de la transplantation cardiaque pédiatrique sont superposables à ceux de la transplantation cardiaque réalisée chez l’adulte avec une médiane de survie autour de 45 % à 15 ans. Les patients porteurs de cardiopathies congénitales (multi)opérées présentent un risque opératoire plus élevé, mais le devenir à long terme est proche.
La transplantation cardiaque pédiatrique n’est pas qu’une mesure compassionnelle pour des patients arrivés au bout des thérapeutiques conventionnelles, elle permet d’offrir une alternative avec d’excellents résultats fonctionnels.

Abstract
Pediatric heart transplantation is rarely performed in France where almost 20 patients are reported a year.
Two different types of receivers are distinguished: in 60% of cases, patients are suffering from cardiomyo pathy. The operation is exactly the same as for an adult patient except for the size. On the other hand, in 30 to 40% of cases, heart transplantation is the last issue for children with congenital heart diseases who have supported several prior operations. In this group of patients, malformation can present considerable challenges to the operative team. Several publications have addressed quite extensively various surgical strategies aimed at heart transplantation for complex congenital heart disease. Key consideration includes issues of anomalies of systemic return, anomalies of the great arteries or anomaly of atrial situs.
Results of pediatric heart transplant are close to the results obtained in adults with a survival rate around 45% at 15 years. Patients with congenital heart diseases have higher operative risk but same survival during follow-up.
Pediatric cardiac transplantation for end-stage cardiac failure is a reasonable alternative which offers excellent functional results.

 

Transplantation pulmonaire et cardio-pulmonaire chez l’enfant : Revue de la littérature
Pediatric Lung Transplantation: Review of the Literature

GUST L, MERCIER O, FABRE D, MUSSOT S, LE PAVEC J, FEUILLET S, DARTEVELLE P, FADEL E Département de chirurgie thoracique, vasculaire et de transplantation cardio-pulmonaire - Hôpital Marie Lannelongue et Université Paris-Sud Le Plessis Robinson - France
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2015, vol. 14 (4), 032-037

Résumé
La transplantation pulmonaire pédiatrique (TPP) est indiquée en ultime recours dans les maladies pulmonaires après échec du traitement conventionnel et quand le risque vital de l’enfant est engagé à court terme. Depuis la première greffe effectuée en 1986, environ 2000 TPPs ont été effectuées à travers le monde avec un nombre stable depuis 10 ans d’environ 100 procédures par an. Exceptionnelle avant l’âge de cinq ans, la majorité des TPP est effectuée durant la deuxième décennie. Les deux principales indications sont la mucoviscidose et les maladies vasculaires pulmonaires. Les difficultés majeures rencontrées dans la TPP sont la pénurie de donneurs de petite taille imposant le recours à la transplantation de lobes pulmonaires et la prise en charge des complications bronchiques du fait du petit calibre des bronches. Contrairement au foie et au rein, la transplantation à partir de donneurs vivants reste limitée du fait du risque anormalement élevé chez le donneur. Les survies à 1 et 5 ans sont respectivement 75 % et 50 %, similaires à celles rapportées chez l’adulte selon le Registre International de Transplantation Cardio-Pulmonaire. A long terme, la principale cause d’échec de cette transplantation est, comme chez l’adulte, la bronchiolite chronique. Cependant, encore plus que chez l’adulte, la survenue de cette complication pose le problème de la retransplantation pulmonaire chez l’enfant.

Abstract
Since the first lung transplantation in 1986, about 2000 PLT have been performed world-wide, with an annual number stable around hundred per year. Exceptional before the age of five, most lung transplantations are performed in children over 10 years old. The two most common indications are cystic fibrosis and vascular lung disease. The main difficulties of the procedure are the lack of adequate donors, resulting in lobar transplantations, and the management of bronchial complications secondary to the small caliber of the donor bronchus. Unlike liver or kidney transplantation, living donor lung transplantation is unusual because of an unacceptable risk for the donor. 1- and 5-year survival rates are 75% and 50%, respectively; similar to the survival observed in adult lung transplantation (data from the International Society Heart and Lung Transplantation). Moreover, as in the adult population, bronchiolitis obliterans is the main complication during the long term outcome. Thus, the question of retransplantation is even more important for children than for adults.

 

Transplantation hépatique chez le nourrisson et l’enfant

GAUTHIER F (Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre)

Résumé
En France, 70 enfants ont besoin chaque année, à un âge médian de deux ans, d’une transplantation hépatique (TH) pour traiter, le plus fréquemment une maladie congénitale cholestatique souvent cirrhogène (atrésie biliaire dans 60% des TH), moins fréquemment une insuffisance hépatique aigüe grave, une maladie métabolique ou une tumeur. La majorité des enfants a eu une laparotomie avant la TH. Le greffon le plus courant est un lobe gauche issu du partage d’un foie d’adulte décédé ou d’un donneur vivant.
Les résultats globaux d’une expérience de 30 ans sont satisfaisants avec une survie actuarielle à 20 ans de 80% pour les patients et près de 70% pour les greffons. La diminution de la mortalité précoce, en particulier chez les nourrissons, améliore progressivement ces résultats.
Les complications chirurgicales propres à la TH pédiatrique sont liées au volume du greffon, aux risques d’hémorragie et de perforation digestive pendant l’hépatectomie totale d’un enfant déjà opéré, aux anomalies anatomiques du syndrome de polysplénie des atrésies biliaires, aux difficultés de reconstruction veineuse et artérielle et à la précarité de la vascularisation artérielle des voies biliaires des greffons lobaires gauches. Prévention et traitement de ces complications ont progressé avec l’expérience partagée des chirurgiens, anesthésistes, réanimateurs et radiologues concernés.

 

Transplantation intestinale et multiviscérale en pédiatrie

CHARDOT C (Necker, Paris)

Résumé
L'insuffisance intestinale est caractérisée par l'incapacité du tube digestif à assurer les apports nutritionnels nécessaires aux besoins de fonctionnement et de croissance chez l'enfant. Ses principales causes sont le grêle court, les dysmotricités intestinales étendues, et les diarrhées néonatales graves.
Le traitement de première intention est la nutrition parentérale, qui peut dans la plupart des cas être cyclisée et réalisée à domicile après apprentissage des parents, et permet une survie à long terme de 90% des enfants, avec une qualité de vie quasi normale. En cas de grêle court, une adaptation survient avec la croissance, éventuellement aidée par des allongements chirugicaux du grêle, permettant de réduire voire arrêter la nutrition parentérale.
La transplantation intestinale est indiquée en cas de complications graves de la nutrition parentérale: perte des voies d'accès veineux, sepsis répétés, hépatopathie, et/ou altération majeure de la qualité de vie de l'enfant et sa famille. Le greffon, qui provient d'un enfant de taille proche du receveur, comporte l'intestin grêle, et selon les cas: le colon droit, le foie et le bloc duodéno-pancréatique, l'estomac, les reins (greffe multiviscérale). L'intestin est un organe très immunogène et nécessite une forte immunosuppression.
La survie des patients et des greffons à 10 ans est des 50% et 30 %, respectivement. La survie à long terme des greffons semble meilleure en cas de greffe hépatique associée. La qualité de vie est améliorée après greffe dans la plupart des cas: sevrage de la nutrition parentérale, fermeture des stomies digestives. Ces résultats restent nettement inférieurs à ceux de la nutrition parentérale à domicile et font de la transplantation intestinale un traitement rare et de deuxième intention.

 

Transplantation rénale en pédiatrie

GRAPIN DAGORNO C, PEYCELON M, PAYE JAOUEN A, BONNARD A, PHILIPPE CHOMETTE P, EL GHONEIMI A (Robert Debré, Paris)

Résumé
La transplantation rénale est la plus fréquente des greffes de l’enfant.
Elle est cependant beaucoup plus rare que chez l’adulte : elle ne représente que 1 % de l’ensemble des transplantations rénales. L’incidence brute de l’IRCT (insuffisance rénale chronique terminale) chez les moins de 20 ans est de 7,5 par million d’enfants , alors qu’elle est de 1/1000 chez l’adulte. L’âge médian de ces enfants et adolescents est de 13,3 ans et 60,5 % sont des garçons. Treize pour cent de ces greffes ont lieu à partir de donneurs vivants.
La transplantation rénale pédiatrique a deux spécificités sur le plan chirurgical : l’existence plus fréquente des anomalies urologiques, et la nécessité parfois de réaliser une greffe chez des enfants de petit poids (< 15 kgs, voire < 10 kgs)
La greffe en cas d’anomalie du bas appareil urinaire.
Dans 25% des cas l’IRCT est secondaire à une malformation urologique ; cette proportion va jusqu’à 37% chez l’enfant de moins de quatre ans. Dans la moitié des cas, il s’agit d’une anomalie du bas appareil urinaire (principalement les valves de l’urètre postérieur et les vessies neurologiques). Le traitement de l’obstacle sous-vésical et la préparation du bas appareil urinaire sont un préalable indispensable à la greffe. Celle-ci ne peut avoir lieu que si le bas appareil est apte à recevoir le greffon : capacité et compliance suffisantes, absence d’infection chronique, possibilité d’une vidange totale à basses pressions. L’examen urodynamique est indispensable. Dans ces conditions, le pronostic à court et moyen terme est comparable à celui des autres greffes, bien que le taux de complications, notamment infectieuses, soit plus élevé. A long terme (quinze ans et plus), on observe une détérioration plus rapide de la fonction rénale.
La greffe chez l’enfant de petit poids.
L’IRCT survient avant l’âge de 4 ans dans 23% des cas, et avant l’âge de 2 ans dans 10% des cas. Certaines complications existent dans ce cas, notamment lorsque le rein provient d’un donneur vivant adulte, avec une disproportion entre le volume du rein et celui de l’abdomen du receveur : risque de thromboses vasculaires par problème mécanique ou hémodynamique, syndrome du compartiment abdominal. Les difficultés de remplissage augmentent le risque de ces complications.
Le pourcentage de perte du greffon le premier mois post-greffe est plus élevé chez l’enfant de moins de deux ans (10%), mais passé ce cap critique, la survie des greffons à 5 et 10 ans est meilleure que chez l’enfant plus âgé ou l’adulte.
Petit poids et malformations urologiques sont souvent cumulées : chez l’enfant de moins de cinq ans, l’IRCT provient d’une anomalie urologique dans 50% des cas.
Le pronostic de la transplantation rénale pédiatrique est bon, la survie du greffon à dix ans diminuant progressivement de 73,4% chez l’enfant de moins de deux ans à 60,7% chez l’enfant greffé entre 11 et 17 ans, alors qu’elle est de 53,5% à partir de 18 ans.
1 Agence de Biomédecine Rapport Rein 2013