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Première cause de décès des sujets de moins de 40 ans, le traumatisme grave est un problème majeur de santé publique. Cette mortalité en lien avec le traumatisme est secondaire au choc hémorragique et au traumatisme crânien. La majorité des décès survient dans les premières heures de la prise en charge de ces patients. L’organisation de la prise en charge de ces patients diminue la mortalité. Cette prise en charge est multidisciplinaire. Les équipes chirurgicales de toutes les spécialités jouent un rôle central dans la gestion de ces patients en partenariat avec les médecins urgentistes, anesthésistes réanimateurs et radiologues. En salle de déchocage, les équipes chirurgicales concernées doivent être présentes au sein de cette équipe multidisciplinaire pour discuter et réaliser une intervention urgente : levée d’une compression intra thoracique, décision de thoraco et/ou de laparotomie d’hémostase, contention externe d’une fracture grave du bassin, réalignement et immobilisation des fractures des membres, embolisation d’une fracture hémorragique du bassin. A l’issue de ce bilan initial et de la réalisation éventuelle d’un traitement urgent, le bilan lésionnel complet est réalisé à l’aide du scanner corps entier injecté. Après cet examen, plusieurs options sont discutées par l’équipe multidisciplinaire : un traitement non opératoire ; un traitement chirurgical combiné ou non à un geste d’embolisation ; un traitement de radiologie interventionnelle. Après le scanner, des examens complémentaires peuvent être nécessaires. Les différents moments de cette prise en charge initiale du traumatisé grave sont détaillés dans ce texte.
Les limites du traitement non opératoire des traumatismes abdominaux
Le traitement non opératoire a connu un essor important dans la gestion des traumatismes de l’abdomen, permettant une meilleure survie et un meilleur taux de sauvetage d’organe. Il évite de surcroît aux patients les complications d’une laparotomie inutile. Mais cette approche non opératoire n’est pas non chirurgicale : à tout moment, le blessé initialement stable peut présenter des signes évoquant la poursuite d’une hémorragie, une atteinte d’organe creux ou du pancréas, un syndrome du compartiment abdominal… qu’il faudra savoir traiter selon le concept de laparotomie ou de cœlioscopie différée. Nous insistons sur la nécessité d’une surveillance clinique «armée » du blessé initialement non opéré, comportant la disponibilité d’équipes chirurgicales, d’anesthésistes et de radiologues 24h/24. Dans les centres équipés de type Trauma Center la tomodensitométrie abdominale injectée joue maintenant un rôle essentiel, et est réalisée en pratique chez tout traumatisé de l’abdomen stable hémodynamiquement, mais les centres de pays moins dotés ont développé des algorithmes de prise en charge intéressants et efficaces basés sur l’échographie abdominale pratiquée par des radiologues experts. Actuellement les indications de traitement non opératoire augmentent grâce à l’apport de l’embolisation artérielle, initialement développée pour les patients atteints d’un traumatisme rétropéritonéal hémorragique et qui est maintenant réalisable chez des patients présentant des traumatismes hépatiques et, plus récemment, spléniques. Mais cette technique prometteuse n’est pas dépourvue de complications, et ses indications demandent à être prise en charge de manière collégiale et mutidisciplinaire.
Stabilisation et prise en charge différée des traumatismes graves du bassin
Les fractures du bassin ne représentent que 5 % environ de l’ensemble des fractures. Cependant, seulement 30 % de ces fractures sont isolées. Elles sont présentes chez 20 % des patients polytraumatisés avec une corrélation de leur survenue et du score de gravité du traumatisme (ISS) : score moyen 23,3 si présence d’une fracture du bassin. Les lésions associées sont pour 40 % un trauma crânien, 40 % un trauma thoracique, 20 % un trauma abdominal. Le décès survient par choc hémorragique le plus souvent rétro péritonéal. Ces chiffres font prendre conscience de la position centrale que ces fractures occupent au sein du dispositif multidisciplinaire du centre de traumatologie. Notre situation au pied des Alpes Française nous procure un recrutement annuel de 20 à 30 cas traités chirurgicalement, avec 55 % des cas consécutif à des chutes de lieux élevés. La prise en charge débute dès l’étape pré hospitalière par le diagnostic de suspicion devant le type de traumatisme et la manœuvre de Larrey positive (pression des épines iliaques antéro supérieures). Le patient est alors systématiquement immobilisé dans un drapage ou une ceinture spéciale en fermeture de l’anneau pelvien. A l’arrivée en salle de déchoquage les clichés radiologiques thorax et bassin de face vont confirmer le diagnostic. Une échographie diagnostique rapide dépiste une hémorragie intra péritonéale. De manière contemporaine à la mise en place d’un drainage thoracique, une traction fémorale condylienne à 15 % du poids du corps est posée du côté de la lésion postérieure de l’anneau pelvien. Un clamp de Ganz est posé si le patient reste instable sur le plan hémodynamique et s’il n’y a pas de contre-indication (fracture de l’aile iliaque). En cas de persistance de l’instabilité le patient est emmené en salle d’artériographie pour être exploré et embolisé. La situation in extremis du choc peut amené le radiologue à stopper le saignement par un ballon intra aortique. La liberté des voies urinaires basses est assurée par sondage doux en l’absence de signe d’appel de rupture ou par cathéter sus pubien en cas d’hémorragie uréthrale. Un uréthrogramme rétrograde peut être réalisé en urgence. Les fractures ouvertes du bassin sont protégées par une colostomie haute, transverse, systématique. Une fois le patient stabilisé le bilan complet peut être finalisé. Un scanner injecté est systématique réalisé. Sur le plan ostéo ligamentaire, le traitement des lésions ouvertes des membres et des lésions rachidiennes avec atteinte médullaire incomplète peut ensuite être effectué.
Secondairement les lésions pelviennes seront prises en charge pour une fixation de la lésion postérieure par vissage ilio-sacré en décubitus dorsal plus ou moins associé à une synthèse de l’arc antérieur (symphyse). Dans l’atteinte des conditions générales favorable, le patient est maintenu en réanimation en traction transcondylienne, clamp en place. La curarisation joue un rôle dans l’efficacité des moyens orthopédiques externes pour maintenir la réduction et empêcher l’ascension verticale de l’hémi pelvis séparé. Le geste d’ostéosynthèse percutanée différée sur bassin réduit est ainsi simplifié. Cette prise en charge en 2 temps a permis de faire passer la mortalité globale des fractures du bassin de 17 % dans les années 70 à 8 % en 1998. Les complications infectieuses post-chirurgicales ont pu être quasiment éradiquées avec moins de 1 % de complications.
Place de la radiologie interventionnelle vasculaire dans la prise en charge des traumatismes abdominaux The Place of Vascular Interventional Radiology in the Management of Abdominal Traumas
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La place de la radiologie interventionnelle des traumatisés de l'abdomen et du pelvis est actuellement incontournable, essentiellement grâce à l'embolisation qui permet une hémostase endovasculaire rapide, efficace et peu morbide. Parmi les principales indications on retiendra l'hémostase des hémorragies artérielles hépatiques, spléniques, rénales ou de toute autres localisations détectées par scanner chez un patient hémodynamiquement stable, l'embolisation artérielle splénique préventive des grades traumatiques élevés (selon la classification de l'American Association for Surgery of Trauma) et l'embolisation de toute hémorragie pelvienne quel que soit l'état hémodynamique du patient. La mise en place d'un ballon d'occlusion aortique est une autre technique efficace qui permet le sauvetage de patients présentant une hémorragie pelvienne gravissime. Cette place de la radiologie interventionnelle en pathologie traumatique ne se conçoit qu'au sein d'une équipe multidisciplinaire et d'un réseau de traumatologie où les stratégies de prise en charge doivent être bien établies, revues et adaptées pour être en accord avec les recommandations professionnelles et les spécificités locales de chaque centre de traumatologie.
The Place of Vascular Interventional Radiology in the Management of Abdominal Traumas
Interventional radiology is a key factor in the management of abdominal traumas, thanks to embolization which allows rapid and efficient endovascular haemostasis, with a low morbidity rate. The main indications for endovascular treatment are hepatic, splenic, renal or other site of ongoing bleeding detected on CT scans of patients with stable hemodynamic condition, prophylactic embolization of high grade splenic traumas and embolization of any haemorrhagic pelvic traumas regardless of the patient's hemodynamic status. Endo-aortic balloon occlusion is another efficient technique for lifesaving treatment of catastrophic pelvic haemorrhages. The place of interventional radiology in the management of pelvic and abdominal traumas should only be considered within a multidisciplinary trauma team and a trauma network where flowcharts for patient care are established, reviewed and adapted according to professional guidelines and depending on the specific local conditions of each trauma centre.
Réseaux de soins en traumatologie Network for Severe Trauma Patients
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Le concept de « trauma centre » et de réseau en traumatologie dénommé « trauma system » a émergé dans les années soixante aux États-Unis. Les réseaux de soins sont basés sur le triage des blessés et l’orientation vers des hôpitaux spécialisés dans le domaine de la traumatologie. Le triage des victimes de traumatisme sur le terrain repose sur l’évaluation de la gravité afin d’orienter les patients dans des trauma centres adaptés. La désignation et la classification des centres hospitaliers en niveau en fonction de leurs ressources constituent le socle de ces organisations. La valeur ajoutée d’un trauma system est de permettre l’accès à ressources hautement spécialisées pour les patients les plus graves. Les réseaux de soins en traumatologie ont fait la preuve de leur efficacité en réduisant la mortalité consécutive aux traumatismes depuis trente ans.
Network for Severe Trauma Patients
The concept of trauma system was born in the sixties in the USA. These systems are based upon adequate triage and direct admission of severe trauma patients to labeled trauma centers. Triage depends on initial severity in the field to facilitate direct admission in the correct trauma center. Classification of trauma center is the cornerstone of a trauma system. Trauma system allows the most severe patients to be treated appropriately in dedicated trauma center to decrease in-hospital mortality.