Séance du mercredi 7 mars 2018

Prise en charge des cancers du col utérin
14h30-17h00, Les Cordeliers
Modérateur : Fabrice LECURU (Paris)

 

 

Introduction générale de la séance

VILLET R

 

Introduction thématique de la séance

VILLET R, LECURU F

 

L’anatomie chirurgicale en vision haute définition dans l’hystérectomie élargie

VINCENS E

Résumé
L’étymologie commune des termes laparoscopie et cœlioscopie rappelle l’importance de la modalité d’approche visuelle dans ces voies d’abord chirurgicales. Le champ opératoire, rendu visible via une «chaîne vidéo» actuellement de hautes performances, en sort réellement magnifié dans les deux sens de ce mot: c’est à dire «rendu plus grand» et «célébré comme grand». Cette magnification du champ opératoire autorise le «zoom» sur les structures anatomiques et son «partage» éducatif via les enregistrements vidéo facilement réalisables. Cette vision haute définition de l’anatomie chirurgicale au cours d’une hystérectomie élargie facilite notamment la préservation des nerfs végétatifs et celle de la vascularisation urétérale diminuant ainsi les complications principales de cette procédure.

 

Prélèvement du ganglion sentinelle : vers un nouveau standard ?

LECURU F, LEITAO M, MATHEVET P, PLANTE M

Résumé
La biopsie des ganglions sentinelles est proposée en alternative au curage pelvien pour la stadification ganglionnaire des cancers du col utérin de petit stade (Ia1 avec emboles – IIa1) depuis une vingtaine d'années. Le rationnel repose sur l'importance pronostique de l'atteinte ganglionnaire, son impact sur le traitement, mais aussi la toxicité démontrée des curages systématiques et la faible proportion de patientes N+.

Fait assez rare, cette technique a fait l'objet de plusieurs études prospectives bien conduites. Nous savons maintenant que cette technique est facilement faisable en routine, bien tolérée, et avec une bonne valeur diagnostique. La valeur prédictive négative (risque de considérer, à tort, une patiente indemne d'extension ganglionnaire) est proche de 100% si l'on respecte des critères d'assurance qualité relativement simples, connus sous le nom de critères du MSKCC. La technique permet également d'obtenir une information supplémentaire, par le diagnostic de micrométastases et de cellules tumorales isolées ; ainsi que par la mise en évidence de ganglions en dehors des territoires classiques de curage. Enfin, la morbidité post-opératoire et la qualité sont significativement améliorées en cas de prélèvement sentinelle seul vs un curage complet.

Se pose maintenant la question de la validation de cette technique, notamment en vérifiant la survie des patientes. Nous n'avons pas de données aujourd'hui. Un essai est en cours d'ouverture pour vérifier que ma survie des patientes bénéficiant d'un prélèvement sentinelle seul n'est pas inférieure à celle des patientes ayant un curage classique. Les résultats sont attendus dans 8 ans.

 

Faut-il encore faire des curages de stadification ?

POMEL C

Résumé
Le traitement de référence des cancers du col de stades avancés (>4 cm, N +) est la radio-chimiothérapie concomitante. L’Inca recommande que les volumes d’irradiation soient basés sur les examens d’imagerie et/ou sur les résultats d’une stadification laparoscopique lombo-aortique première. En effet les progrès de l’imagerie ne permettent pas toujours d’atteindre la fiabilité de la lymphadénectomie. Cependant celle-ci est grevée d’une morbidité spécifique et engendre une augmentation de la durée opératoire et des pertes sanguines. Seules 2 études dont une prospective, ont comparé la stadification chirurgicale et l’imagerie seule dans cette indication. Elles n’ont cependant pas démontré de bénéfice de la chirurgie voire même un effet potentiellement délétère.

On ne connait pas non plus la part de l’effet des sels de platine à la dose de 40 mg/m2 en hebdomadaire sur une potentielle stérilisation des ganglions situés en dehors des chams d’irradiation.

Un essai prospectif de phase 3 chez des patientes avec des TEP négatives en LA avec randomisation entre curage/absence de curage répondra à une partie de nos questions. A ce jour, et en l’absence d’essai prospectif prouvant le bénéfice du curage lombo aortique, la décision devrait être prise au cas par cas, après discussion avec la patiente.

 

Que reste-t-il des indications d’exentérations pelviennes ?

FERRON G

Résumé
Malgré les progrès de la radiothérapie et des traitements concomitants, la récidive pelvienne en zone irradiée reste un challenge oncologique tant le pronostic est sévère. Les traitements médicaux actuels en particulier chimiothérapique n’ont que peu d’effet en zone irradiée et, associés aux anti-angiogéniques sont générateurs de fistules complexes. Une ré-irradiation est contre-indiquée compte tenu de la morbidité à court terme.

La seule alternative thérapeutique reste l’exentération pelvienne. Mais, d’indication exceptionnelle, elle ne doit être proposée :
-qu’en cas de bilan d’extension négatif, en particulier par TEP-TDM ;
-uniquement dans l’optique d’obtenir des marges saines (R0) avec une planification de la chirurgie sur IRM voir même sur fusion TEP-IRM ;
-par des équipes expertes, afin de donner la possibilité aux patients de bénéficier des gestes de reconstruction complexe (urinaire, vaginal, périnéale, colorectale, vasculaire). Cela nécessite un entourage médical et paramédical exhaustif (stomathérapeute, diététicien, coach sportif, sexologue, assistante sociale…) indispensables à l’amélioration de la qualité de vie.
-qu’exceptionnellement, en situation palliative, en cas de fistule complexe rendant les derniers mois de vie insupportables.

Des espoirs sont attendus en particulier par l’avènement des immunothérapies dans la prise en charge des cancers à HPV.
La prévention primaire et secondaire par une large vaccination anti HPV, par des campagnes de dépistage du cancer du col de l’utérus, par la suppression des facteurs de risque comme l’obésité et le tabac, par la chirurgie prophylactique dans les familles à statut MMR anormal, permettra de réduire considérablement les cancers gynécologiques et leur récidive.

 

Quelle place pour l’immunothérapie dans les cancers avancés du col utérin ?

KURTZ JE

Résumé
Malgré des avancées significatives en oncologie, le pronostic du cancer du col de l’utérus avancé reste très décevant. Il n’existe à ce jour pas de possibilité curative, en dehors de quelques cas très exceptionnels. Le traitement repose toujours sur la chimiothérapie, basée sur les sels de platine et les taxanes, avec un bénéfice significatif bien que limité des antiangiogéniques. Les progrès récents en immuno-oncologie reposent sur la modulation des points de contrôle du système immunitaire. Ils permettent de stimuler la prolifération de clones de lymphocytes reconnaissant des antigènes tumoraux et de contourner les mécanismes d’évasion immune au niveau de la tumeur. L’efficacité de ces traitements est liée à la charge mutationnelle des tumeurs, et à la présence de néoantigènes tumoraux. Le cancer du col est une tumeur immunogénique, en partie dans le contexte de l’infection HPV. Des résultats préliminaires suggèrent une activité des modulateurs de la réponse immunitaire dans le cas de cancers lourdement prétraités. Des essais sont en cours pour cette famille d’anticancéreux en monothérapie ou associés à la chimiothérapie ou à la radiothérapie. Ils permettront peut-être enfin d’obtenir des résultats durables chez la patientes atteintes de cancer du col de l’utérus avancé.