[Ms BIU Santé no 2007, fo 126 ro | LAT | IMG]
Au très distingué M. Johannes Antonides Vander Linden à Leyde.
Très distingué Monsieur, [a][1]
Notre ami Piètre m’a dit adieu et s’en est retourné à Amiens, il vous salue de tout cœur. [2] Soit je ne connais pas, soit je ne me rappelle pas ce M. Louis de Saint-Aubin, ou du Buisson. [1] J’ai reçu votre portrait, entier et intact, [3] et l’ai placé à côté de celui de notre Fernel. [4] À ce qu’on m’a dit ici, le fils de M. Blaeu [5] vous remettra rapidement le paquet que je vous ai envoyé car le bateau qui le transporte est parti pour la Hollande. Nul n’a ici entendu parler de Locatelli et personne ne l’a jamais vu ; [6] les œuvres de Planis Campy ne se trouvent nulle part. [7] On ne sait s’il en reste quelques exemplaires cachés quelque part ; à la suite d’une diligente enquête, le syndic des libraires parisiens m’a dit suspecter qu’après la mort du libraire qui avait imprimé ce livre, [8] son épouse les a donnés à des boutiquiers comme marchandise sans valeur, pour en façonner piperis thurisque cuculli. [2][9] Vous trouverez dans mon paquet susdit un Calvus de l’édition de Rome. [3][10][11] Si quelqu’un de chez vous prévoit de venir à Paris, vous pourrez lui confier la première feuille de votre Hippocrate à me remettre, pour que je puisse la montrer au grand nombre de médecins et autres savants qui me viennent voir de partout, et leur en mettre l’eau à la bouche. [4][12] J’attends patiemment votre livre de Scriptis medicis. [5][13] MM. les très distingués Bigot et Vorst vous saluent, [14][15] ainsi que Pierre Petit, qui pense à publier des Problemata medicinalia, tandis que l’imprimeur s’attelle à l’édition de son Arétée. [6][16][17] Tout ici est encore incertain sur la nouvelle édition d’Érasme qu’on doit produire à Rotterdam, on dit même qu’elle n’a pas encore commencé ; je l’espère excellente. [7][18] Je salue MM. les très distingués Vorst, Stevartus et Rompf ; [19][20][21] et je prie M. Stevartus de bien vouloir se souvenir de la Chronica du très distingué Usserius d’Armagh, car il me l’a promis et je lui en rembourserai très volontiers la dépense, [8][22] avec ce que je lui dois déjà d’autre. Je n’ai rien que je puisse ajouter à votre petite liste des auteurs qui ont cité Hippocrate ; je pense pourtant, si ma mémoire ne me trompe pas, que les bienheureux Jérôme, [23] Augustin, [24] Ambroise [25] et Bernard [26] ont dit quelque chose à son sujet ; mais à dire vrai, je n’en ai qu’un vague souvenir. [9] Mes fils vous saluent et vous remercient de votre très agréable souvenir. [27][28] Je m’occupe à rétablir ma santé, qui progresse favorablement de jour en jour. [29][30] Nicolas Fouquet, notre surintendant des finances, est encore en prison, mais les juges que le roi a choisis l’interrogent très fréquemment. [31][32] Vale, très éminent Monsieur, et continuez de m’aimer comme vous faites.
De Paris, ce 22e de mars 1662.
Vôtre de tout cœur, Guy Patin.
1. |
Apparition tout à fait impromptue, unique dans la Correspondance, d’un personnage énigmatique sur qui Johannes Antonides Vander Linden avait interrogé Guy Patin : en 1652, un dénommé Charles Le Gendre, seigneur de La Faye, avait bien acheté la seigneurie et le château de Saint-Aubin-sur-Loire (Saône-et-Loire), et épousé une Marie Du Buisson, fille d’André, seigneur de Beauregard ; mais il peut s’agir d’une coïncidence fortuite, car D’Hozier, dans son article Seigneurs de S. Aubin (Armorial général de la France, registre premier, première partie, Paris, Firmin Didot, 1738, in‑4o, page 259) ne cite de prénommé Louis ni dans leur ascendance, ni dans leur descendance. |
2. |
« des sachets pour le poivre et l’encens » (Martial, v. note [3], lettre 22). V. notes [1] et [6], lettre latine 176, pour le traité de Lodovico Locatelli et pour les Œuvres de David de Planis Campy, et [2], lettre latine 188, pour les imprimeurs qui ont successivement détenu le privilège de ces dernières (Guy Patin parlait ici de Denis Moreau et de sa veuve). |
3. |
V. note [5], lettre latine 91, pour l’Hippocrate de Marcus Fabius Calvus (Bâle, 1526). |
4. |
V. note [11], lettre 726, pour les Opera omnia [Œuvres complètes] d’Hippocrate par Johannes Antonides Vander Linden. On en avait commencé l’impression à Leyde, mais elles ne parurent qu’en 1665, après la mort de l’auteur, par les soins de son fils, Hendrik Vander Linden. Sa préface, datée de Leyde, le 18 avril 1665, n’évoque pas le délai de trois ans qui s’est écoulé entre l’impression des premières feuilles (épreuves) et la parution du livre ; la complexité d’une impression bilingue (grecque et latine) et la mort de l’auteur (le 5 mars 1664) en sont les probables causes. |
5. |
V. note [29], lettre 625, pour la 3e édition (Amsterdam, 1662) des deux précieux livres bibliographiques de Johannes Antonides Vander Linden « sur les Écrits médicaux ». |
6. |
V. notes [3], lettre 731, pour l’Arétée posthume de Pierre Petit (Londres, 1726), et [6], lettre latine 184, pour ses « Problèmes médicaux » qui n’ont pas laissé de trace dans les bibliographies. |
7. |
V. note [4], lettre latine 166, pour le projet de publier à Rotterdam, sa ville natale, les œuvres complètes d’Érasme, ce qui n’a abouti qu’au xviiie s. |
8. | V. note [9], lettre latine 179, pour la « Chronique » de James Ussher (Londres, 1650-1654). |
9. |
L’Hippocrate de Johannes Antonides Vander Linden ne contient pas la liste des saints docteurs et Pères de l’Église qui ont cité Hippocrate dans leurs écrits. L’anthologie qui suit en donne un aperçu.
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a. |
Brouillon manuscrit d’une lettre que Guy Patin, encore affaibli (v. note [1], lettre 717), a dictée à l’intention de Johannes Antonides Vander Linden, ms BIU Santé no 2007, fo 126 ro ; seules la suscription, une correction et la signature sont de la plume de Patin. |
s. |
Ms BIU Santé no 2007, fo 126 ro. Cl. Viro D. Io. Ant. Vander Linden, Leidam. Vir Cl. Amicus noster Pietreus mihi vale dixit et Ambianum reversus est, Teque Tuus ex animo, Guido Patin. |