[Ms BIU Santé no 2007, fo 41 vo | LAT | IMG]
Au très distingué M. Thomas Bartholin, professeur royal de médecine à Copenhague. [a][1]
Je vous écris cette très courte lettre à la hâte pour vous aviser que votre ami Martin Bogdan m’est venu voir de votre part, m’a salué et m’a montré votre Spicilegium ex Vasis lymphaticis, etc. que je lui ai aussitôt rendu pour qu’il l’offre à Pecquet. [1][2][3][4] Vous avez voulu me nommer avec honneur en deux endroits de ce Spicilegium et je vous remercie beaucoup de l’affection particulière que vous me portez. [2][5] J’attends dans les prochains jours le paquet que vous m’avez envoyé, pour que je puisse montrer à Riolan la réponse que vous lui avez faite. [3][6] Je vous ai récemment écrit à son sujet par l’intermédiaire de Scavenius. [7] Quand vous pourrez, vous m’enverrez, s’il vous plaît, votre Spicigelium, [2] et ce qui viendra après. Il court sous la presse à Rouen un opuscule qui, dit-on, sera fort piquant contre Riolan ; Mentel en est l’auteur, qui a caché son nom sous celui d’un certain médecin de Rouen, appelé Guillaume de Hénaut ; mais je ne sais pas quand il sera publié. [4][8][9] Vale et aimez-moi. Plus une autre fois.
Votre Guy Patin de tout cœur.
De Paris, ce 31e de mars 1656.
Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Thomas Bartholin, ms BIU Santé no 2007, fo 41 vo.
Thomæ Bartholini D. et Med. Prof. Reg. Spicilegium primum ex vasis lymphaticis, ubi Cl. V. Glissonii et Pecqueti sententiæ expenduntur : Publice in Reg. Acad. Haffn. propositum. Respondente M. Johanne Christiano Stolbergh, Misnico, xxiix Nov. ciɔ iɔc lv. Loco horisque consuetis.
[Premier Spicilège {a} de Thomas Bartholin, docteur et professeur royal de médecine, tiré des vaisseaux lymphatiques, où sont pesés avec soin les jugements des très distingués Glisson et Pecquet ; {b} proposé publiquement en l’Université royale de Copenhague ; disputant M. Johannes Christianus Stolbergh, natif de Misnie, le 28 novembre 1655, aux heure et lieu habituels]. {c}
- Glane d’épis.
- V. notes [34], lettre 433, pour Francis Glisson, et [15], lettre 280, pour Jean Pecquet.
- Amsterdam, Petrus Morsingius, 1655, in‑4o ; réédition (sans l’ordinal primum dans le titre) ibid. Petrus vanden Berge, 1660, in‑12. V. note [16], lettre de Thomas Bartholin datée du 18 octobre 1662, pour de Spicilegium secundum sur le même sujet (Copenhague, 1660).
Bartholin a dédié son Spicilegium primum à Jean Pecquet, Doct. Med. Monspel. felici, lactearum thoracicarum inventori primo, lymphaticorum vasorum fautori illustri [heureux docteur en médecine de Montpellier, premier découvreur des lactifères thoraciques et illustre défenseur des vaisseaux lymphatiques].
Dans une lettre à Bartholin, datée de Paris le 17 juillet 1656 (publiée en 1663, Bartholin a, centurie ii, épître lxxvii, page 648), Martin Bogdan (v. notule {c}, note [28], lettre 477) a parlé de Guy Patin et Jean ii Riolan :
Magnifice Vir,
Riolanus tuam Apologiam habet, quid autem meditetur, nondum retulit Patin, quod promisit. De Riolani mordacitate, tibi æque et forsan melius (qui ipsam sentis indignus) ac mihi conscia, nihil addam, nisi quod pro ariditate cutis, quæ in senibus est, in ipso sit Impudentia ; pro lippitudine invidia ; pro gibbositate Atheismus ; pro tremore membrorum, fluxa inconstantia ; pro curvis digitis, honestos scabendi desiderium, et pro rugis calliditas ; pro tussi maledicentia. [Noble Monsieur, Riolan a votre Apologia, {a} mais pour ce qu’il en penserait, Patin ne me l’a pas encore dit, comme il m’a promis de faire. Je n’ajouterai rien sur la virulence de Riolan, vous la connaissez aussi bien, sinon mieux que moi (vous qui n’êtes pas digne de l’endurer) ; hormis que la sécheresse de la peau qui afflige les vieillards se transforme chez lui en effronterie, son ophtalmie en jalousie, sa gibbosité en athéisme, son tremblement des membres en lâche inconstance, ses doigts noueux en désir de gratter les honnêtes gens, ses rides en rouerie et sa toux en médisance].
- Cette « Apologie » pouvait être le Spicilegium ou la Defensio [Défense] de Bartholin contre Riolan (v. infra note [3]).
Thomas Bartholin a cité Guy Patin en deux endroits de son Spicilegium.
Scripsit ad me Guido Patinus Medicus Parisiensis Eruditissimus, Campanum præter alia symptomata tremore insolito fuisse correptum, in cujus cranio dissecto, substantiæ cerebri serum multum instar seri lactis subvirescens innatabat, cujus portio in spinalem dorsi decidua, tremorem illum initio morbi concitaverat.
[Guy Patin, très savant médecin de Paris, m’a écrit au sujet d’un Champenois qui, parmi d’autres symptômes, était saisi d’un tremblement insolite ; la dissection du crâne trouva une grande quantité de sérosité verdâtre, ressemblant à du petit-lait, qui baignait la substance du cerveau, dont une partie, qui avait coulé dans la moelle épinière dorsale, avait excité ce tremblement au début de la maladie]. {a}
- V. lettre de Patin à Bartholin datée du 28 mars 1652.
Pages 47‑48, au début du chapitre vii (et dernier), Postræma Riolani de Lymphaticis figmenta [Dernières fictions de Riolan sur les lymphatiques] :
Evaserant superiora prælum, quum commode mihi transmitteret Lutetia Guido Patinus Doctor Medicus Parisiensis et Professor Regius, omni encomio major, utriusque amicus, novum CL. Riolani opusculum, nuperæ Dissertationi Pecquetianæ oppositum.
[J’avais envoyé à l’imprimerie ce qui précède, {a} quand m’est arrivé de Paris le nouvel opuscule du très distingué Riolan contre la récente dissertation de Pecquet, {b} que me faisait parvenir Guy Patin, docteur en médecine de Paris et professeur royal ; il surpasse tout éloge et est ami de l’un et de l’autre].
- Les six premiers chapitres du Spicilegium auquel Bartholin en ajoutait un septième, contre Jean ii Riolan.
Le chapitre vi (pages 42‑47) porte le curieux titre de An lympha et lac ex collo D. Paulli naturaliter affluere potuerit ? [S’est-il pu que l’eau et le lait qui se sont écoulés du cou de saint Paul aient eu une cause naturelle ?], avec cette explication introductive :
Antiqua est Traditio a D. Ambrosio et Chrisostomo chartis consignata, S. Paulum Apostolum, quum sub impio Neronis dominatu ad supplicium Romæ duceretur, capite amputato, lactis undam ex collo profudisse.[Selon l’antique tradition fondée sur les écrits de saint Ambroise et saint Chrysostome, {i} une ondée de lait a jailli du cou de saint Paul Apôtre quand on lui trancha la tête à Rome, sur la condamnation de l’empereur Néron]. {ii}
- V. notes [24], lettre 514, pour saint Ambroise, évêque de Milan au ive s., et [4], lettre latine 322, pour saint Jean Chrysostome, évêque de Constantinople au même siècle.
- Après méticuleuse analyse des sources disponibles, Bartholin conclut pertinemment que la section de la jugulaire (gauche) par la hache avait pu provoquer la vidange du canal thoracique, phénomène naturel qu’on a tenu pour un miracle (sujet auquel il portait grand intérêt, v. note [3], lettre latine 30) : soit le mouvement du chyle étayée par les docteurs et Pères de l’Église !
- Responsio ad Experimenta nova anatomica ut chylus hepati restituatur [Réponse contre les Expériences anatomiques nouvelles, où le chyle est restitué au foie] : 4e traité de la seconde partie des Opuscula anatomica varia et nova [Opuscules anatomiques divers et nouveaux] de Riolan (Paris, 1652, v. note [30], lettre 282).
Defensio Vasorum lacteorum et lymphaticorum… [Défense des vaisseaux lactés et lymphatiques…] de Thomas Bartholin contre Jean ii Riolan (Copenhague, février 1655, v. note [1], lettre latine 45).
V. note [6], lettre 14, pour le Clypeus [Bouclier] (Rouen, 1655, mais Guy Patin ne l’avait pas encore vu) qu’un prétendu Guillaume de Hénaut (ou Hénault) aurait écrit pour la défense de Jean Pecquet et dédié à Jacques Mentel. Une fois encore (v. note [5], lettre latine 41), Guy Patin disait ici que Mentel était son véritable auteur.
Il a curieusement paru à Rouen en 1663 un ouvrage intitulé Le Thrône de la médecine, par le Sr de Hénaut… avec les statuts et ordonnances concernant la pharmacie (Jacques Besogne, in‑8o de 108 pages).
Ms BIU Santé no 2007, fo 41 vo.
Clariss. viro D. Thomæ Bartholini, regio Medicinæ Professori, Hafniam.
Brevissimas hasce literas raptim scribo, reddóque amico tuo Martino
Bogdano, qui me nomine tuo convenit, salutavit, ostenditque mihi tuum Spici-
legium ex Vasis Lymphaticis, etc. quod illi statim reddidi offerendum Pecqueto :
In duobus illius Spicigelij locis, me cum honore nominatum voluisti : de quo sin-
gulari tuo in nos amore gratias ago amplissimas. In dies expecto tuum fasci-
culum quem ad me destinasti : ut Responsum tuum adv. Io. Riolanum possim
illi exhibere : De illo ad Te nuper scripsi per Scavenium : cùm potueris mittes
ad me si placet, Spicigelium tuum, et quæ sequentur. Rothomagi currit sub
prælo, tacito nomine Mentelli auctoris, expresso cujusdam Medici Rothom. dicti
Henaut libellus qui dicitur acerrimus futurus adversus Riolanum : sed quando sit
proditurus, nescio. Vale et me ama. Plura aliàs.
Tuus ex animo Guido Patin.